Lafarge en Syrie : l’entreprise réclame 200 millions d’euros à d’anciens dirigeants
Lors d’une audience, Lafarge (et son propriétaire suisse Holcim) ont réclamé 200 millions d’euros à Bruno Lafont, ex-PDG, et à quatre autres personnes.
Pour rappel,l’entreprise française Lafarge est soupçonnée d’avoir versé, entre 2013 et 2014, cinq millions d’euros en taxes et achats de matières premières à des groupes jihadistes, dont l’organisation État islamique, pour maintenir l’activité d’une cimenterie à Jalabiya, alors que la Syrie s’enfonçait dans la guerre.
En 2022, le cimentier avait plaidé coupable aux États-Unis et payé une sanction financière de 778 millions de dollars.
Une bataille juridique
Lafarge et son nouveau propriétaire suisse Holcim se retournent désormais contre Bruno Lafont, PDG du cimentier entre 2007 et 2015, et trois autres anciens cadres du groupe, ainsi qu’un homme d’affaires syrien.
Le 27 janvier 2025, au tribunal des activités économiques de Paris, le groupe a demandé 200 millions d'euros de réparation du « préjudice subi ».
« Cette action est délirante : personne ici n'a 200 millions d'euros, et Lafarge le sait », s'est indigné maître Quentin de Margerie, avocat de Bruno Lafont.
L’ex-PDG nie avoir eu connaissance de versements en Syrie et conteste toute implication. Selon lui, Lafarge et Holcim ont plaidé coupable en 2022 sans l’en avertir et sont allés à l’encontre de sa présomption d’innocence. Dans ce contexte, il leur réclame de son côté des dommages et intérêts.
D'autres procès prévus
Bruno Lafont et sept anciens dirigeants de Lafarge seront jugés devant le tribunal correctionnel de Paris fin 2025 pour « financement d'entreprises terroristes » et, pour certains, non-respect de sanctions financières internationales.
Par ailleurs, un autre procès devrait se tenir devant les assises pour Lafarge – l’entreprise étant également poursuivie pour complicité de crimes contre l’humanité.
Le tribunal des activités économiques de Paris doit rendre son délibéré le 1er avril, mais pourrait décider de retarder son jugement à une date ultérieure à celle des procès au pénal, comme le demandent Lafarge et Holcim.
Claire Lemonnier (avec AFP)
Photo de une : Adobe Stock