Lafarge en Syrie : la justice française réexaminera le dossier le 21 novembre
Lafarge, désormais filiale du groupe suisse Holcim, est soupçonnée d'avoir versé, en 2013 et 2014, plusieurs millions d'euros à des groupes jihadistes, notamment l'État islamique (EI), ainsi qu'à des intermédiaires, afin de maintenir l'activité d'une cimenterie à Jalabiya, en Syrie, alors même que le pays était en proie à la guerre.
Sur ce site, opérationnel depuis 2010 et dont la construction a coûté plusieurs centaines de millions d'euros, Lafarge a maintenu ses salariés syriens en poste jusqu'en septembre 2014, les exposant ainsi à des risques d'extorsion et d'enlèvement, tandis qu'elle avait évacué ses employés de nationalité étrangère dès 2012.
La Cour de cassation ordonne la réouverture des débats
Depuis 2018, la société Lafarge SA est mise en examen pour mise en danger de la vie d'autrui au préjudice de ses employés syriens. Cependant, elle plaide que seule la loi syrienne était applicable à la relation de travail avec ces employés. En conséquence, elle affirme que sa mise en examen devrait être annulée, car la mise en danger de la vie d'autrui ne peut être fondée que sur la violation d'une obligation de prudence ou de sécurité inscrite dans le droit français, et non dans une loi étrangère.
« Une telle analyse pourrait amener la Cour de cassation à s'interroger sur l'éventualité d'une cassation sans renvoi que les parties n'ont pas discutée dans leurs écritures », conclut la Cour de cassation qui ordonne « la réouverture des débats ».
Me Catherine Bauer-Violas, avocate des parties civiles, estime que la chambre criminelle « évoque l'éventualité d'une cassation sur la mise en danger de la vie d'autrui de la société Lafarge dès que le droit du travail syrien serait applicable et non le droit du travail français ».
Pour cette dernière, la juridiction « semble n'avoir pas voulu d'elle-même, ce qu'elle était pourtant en mesure de faire, mettre un terme à la mise en examen de la société Lafarge et demande aux parties de prendre elles-mêmes position sur une cassation avec ou sans renvoi ». Si la Cour de cassation a définitivement validé en 2021 la mise en examen pour financement d'entreprise terroriste, la défense du groupe français continue de se battre pour faire annuler les poursuites pour les deux autres infractions.
Marie Gérald (avec AFP)
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