Baromètre Qualitel : retour vers le futur du logement

Pour la 8ème édition de son baromètre, l’association Qualitel a entrepris un voyage dans le temps, avec la perception du logement entre passé et présent.
Le point de vue des différentes générations sur le futur de l’habitat a également été abordé.
Une « conscience écologique des jeunes générations, et pas que »
Les sondés se sont en premier lieu exprimés sur les équipements du futur. Laure-Anne Geoffroy-Duprez, présidente de l’Union des architectes (UNSFA), remarque dans les résultats une « conscience écologique des jeunes générations, et pas que d'ailleurs ».
Par exemple, les logements éco-responsables feront partie du futur pour 86 % des sondés dans chaque catégorie d’âge. Les 18-24 ans sont 86 % à penser que la domotique sera répandue dans les logements, contre 89 % chez les 25-49 ans et 87 % chez les 50 ans et plus. Même sentiment pour l’accessibilité pour les personnes en perte d’autonomie, à laquelle croient 84 % des 18-24 ans, 85 % des 25-49 ans et 84 % des 50 ans et plus.
Les jeunes sont toutefois plus conscients des effets climatiques sur leur logement. 58 % des 18-24 ans s’attendent à faire des travaux de rénovation énergétique dans le futur, contre 38 % des 50 ans et plus. Sur les travaux d’adaptation aux aléas climatiques (montée des eaux, canicules, etc.), ils sont respectivement dans ces classes d’âge 62 % et 32 % à penser y être confrontés dans l'avenir. 42 % des plus jeunes pensent devoir déménager à cause du réchauffement climatique, face à 12 % des sondés les plus âgés.
Au total, 40 % de l’ensemble des répondants pensent devoir rendre leur logement plus résistant aux aléas climatiques et 48 % réaliser des rénovations énergétiques.
Une réticence des séniors à adapter leur logement au vieillir chez soi
Passons à un autre enjeu du futur : vieillir chez soi. La baromètre Qualitel 2024 montre que 67 % de 65 ans et plus projettent de vieillir dans leur logement actuel.
Bémol toutefois : 49 % des sondés dans cette catégorie d’âge trouvent que leur logement ne pourra être aménagé et adapté aux personnes âgées ou à mobilité réduite. Heureusement, ce sentiment décline en fonction de la date de construction du logement qu’ils habitent. 72 % de ceux logés dans un habitat d’avant-guerre (entre 1900 et 1944) ont cette impression, contre seulement 27 % chez ceux logés dans un logement d’après 2014.
L’Agence nationale pour l'information sur le logement (ANIL) a constaté que, sur les 3 000 séniors sollicités pour une étude, ces derniers « sont plutôt bien logés, plutôt en maison individuelle, plutôt en sous occupation. Une partie effectivement ne sont pas forcément conscients de la nécessité d'adapter », selon sa directrice générale Roselyne Conan.
N’occultons toutefois pas la précarité des locataires séniors d’un logement social. « 24 % des plus de 65 ans en parc social sont au seuil de pauvreté, contre 9 % pour la population générale. C’est assez fort », rapporte Joachim Soëtard, directeur des Affaires publiques et de la Communication au sein de l’Union sociale pour l’habitat (USH). Il souligne également l’isolement social des habitants séniors, aussi bien dans le parc social que le parc privé, et la nécessité « d'adaptation du tissu relationnel ».
Roselyne Conan acquiesce, en reprochant une « approche du grand âge (…) quelque fois trop biomédicale ». D’autant qu’à côté du confort du logement (47 %) ou des soins à proximité (46 %), les répondants de 65 ans et plus au baromètre Qualitel sont seulement 28 % à citer le calme comme critère pour bien vieillir chez soi. D’où l’intérêt de l’habitat intergénérationnel et de diversifier l’offre de logements afin de proposer à « chacun quelque chose qui puisse correspondre à ses envies, et puis qui redonne goût à habiter, à être bien chez soi, bien dans son quartier, dans son immeuble », abonde la directrice générale de l'ANIL.
« Ces tissus de pavillon qu'on a conçus, aujourd'hui, il faut les réfléchir autrement. Il faut penser à les densifier, peut-être moins séparer les maisons, parce qu'il y a souvent un pavillon habité par un couple âgé ou une personne seule, ce n’est pas quelque chose d'enviable pour eux, ni pour la société », propose également Laure-Anne Geoffroy-Duprez de l'UNSFA.
Pascal Boulanger, président de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) de France, soutient que le critère qui prime avant tout, c’est celui « du logement choisi et non pas imposé. Il faut faire admettre les personnes âgées qu'elles doivent changer de logement. Parce que sinon, même s'il est parfait, ce sera un logement subi ».
Les préférences d’aménagement varient selon le type d’habitat. Pour la maison, les 65 ans et plus envisagent davantage l’installation d’une chambre et d’une salle de bain en rez-de-chaussée (31 %), de barres d’appui dans la salle de bains et les toilettes (26 %), et de rampes d’accès pour les entrées (26 %). Pour l’appartement, les sondés privilégient, sans surprise, la présence d’un ascenseur ou d’un monte-escalier (39 %), avant les barres d’appui dans la salle de bains et les toilettes (33 %) et le remplacement d’une baignoire par une douche.
Les jeunes générations davantage pessimistes vis-à-vis de leur parcours résidentiel
La 8ème édition du baromètre Qualitel s’est penchée évidemment sur l’avis des jeunes Français sur leur parcours résidentiel futur. Le pessimisme est malheureusement au rendez-vous, car 78 % des 25-34 ans pensent que la vie des futures générations dans leur logement ne sera pa meilleure que la leur à leur âge, voire pire.
Quand on demande aux 18-24 ans si les jeunes auront les moyens de venir propriétaires, 54 % répondent non, tandis que les 25-34 ans sont 65 % à l’affirmer. Cette dernière catégorie d’âge est proche de l’état d’esprit d’autres générations, comme les 35-49 ans (63 %) et les 50-64 ans (62 %).
Parmi les 18-24 ans, 4 sur 10 pensent ne pas avoir les moyens de devenirs propriétaires de leur résidence principale. Et ce bien que le sujet intéresse 84 % d’entre eux, voire est une source d’inquiétude (49 %) . Il faut dire que 59 % des sondés dans cette classe d’âge et actifs habitent chez leurs parents par contraintes budgétaires ou difficultés à trouver leur propre logement.
Les perspectives ne sont guère mieux face à l’idéal de la maison avec jardin. Si 74 % des 18 ans et plus pensent que les générations futures en rêveront toujours, elle leur sera inaccessible pour 55 % d’entre eux.
Cela n’empêche pas les 18-24 ans de se projeter dans une maison (77 %), neuve (69 %) et dans la campagne (52 %).
37 % dans ce segment générationnel se déclarent prêts à vivre dans un habitat partagé. Plus précisément, 61 % sont ouverts à l’idée de partager un espace de loisirs (home cinéma, bibliothèque, salle de jeux), 36 % un espace extérieur (jardin, terrasse), voire une salle de sports. Ils sont cependant plus réticents à partager une buanderie/laverie (29 %), un salon (26 %), une cuisine (25 %) ou un espace de coworking (16 %).
Les plus jeunes sondés sont aussi séduits (64 %) par le concept de logement évolutif, en fonction des besoins des occupants tout au long de la vie.
Des tendances sur lesquelles « il faut accompagner les jeunes générations. Ce sont des modes de vie différents et aspirations différentes entre les espaces qu’ils veulent partager, ceux qu’ils veulent garder. C’est une autre problématique technique, mais qui est réelle », défend Antoine Desbarrières.
Virginie Kroun
Photo de une : V.K