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Bâtiments réversibles : l’AQC invite à une mise en œuvre souple

Publié le 22 décembre 2021

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Face aux besoins croissants en logements et à la vacance de certains bâtiments et bureaux devenus obsolètes, la construction des bâtiments réversibles est une solution de plus en plus envisagée en France. Mais comment mettre en oeuvre ce modèle de modularité et d’évolutivité ? Un rapport de l’AQC livre ses conseils pour répondre aux principales interrogations.
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Alors qu’elle est à ses balbutiements en France, l’architecture réversible est une réponse à plusieurs enjeux de la construction neuve d’aujourd’hui. D’abord celui de la décarbonation, dont les objectifs ont été définis par la future RE2020

Vient aussi l’urgence de lutter pour la sobriété foncière et contre l’étalement urbain, tout en endiguant l’obsolescence et la vacance des bureaux, plus 900 000 m2 étant dans cette situation en Île-de-France. Ces derniers font par ailleurs l’objet d’un AMI lancé par Action Logement. Sans compter les transformations urbaines et les modes de vies, reflet des propriétés immobilières et architecturales.

Modulable, hybride, évolutif, démontable… Le bâtiment réversible présente des qualités permettant de décliner ses usages, du bureau au logement, plus généralement.

Pourtant, malgré ses avantages, le concept architectural a ses limites. Un dernier rapport de l’Agence Qualité Construction (AQC) pour la Direction de l'Habitat, de l'Urbanisme et des Paysages (DHUP), du Ministère de la Transition Écologique. Concentré sur 52 programmes de réversibilité de bureaux en logements et des témoignages d’acteurs de ces projets, le document tend à dégager des enseignements et bonnes pratiques, de façon à assurer la qualité de ces opérations.

Raisonner les investissements

 

La phase amont d’un projet de réversibilité n’est pas aussi évidente qu’un projet linéaire et traditionnel. Une approche standardisée et une organisation en silo vont donc à contre-sens de l’opération selon l’AQC. Celle-ci recommande davantage une approche locale, transversale et prospective, de manière à anticiper au plus long-terme la durée de vie d’un bâtiment. Et à échelle aussi bien architecturale qu’urbaine. 

Tant des calculs et d’objectifs qui doivent se matérialiser sous la forme d'un cahier des charges précis par le maître d’ouvrage, afin que les acteurs du projet soient sur la même ligne et que chacun connaisse son rôle. 

Une anticipation d’investissements matériels et humains tout au long de l’opération va aussi de soi pour le maître d’ouvrage, afin d’éviter des surcoûts. Surcoûts déjà présents dans les surdimensionnements pour donner naissance à des zones fusibles, où l’on peut percer et enlever des éléments de la structure. Des travaux réglementaires peuvent ainsi prendre place, comme l’agrandissement du vitrage, lors de la transformation de logements en bureaux, par exemple.

La rémunération du maître d’œuvre est également dispendieuse, car l'interessé doit réaliser un séquençage de la vie d’un bâtiment en deux finalités. L’AQC conseille d’ailleurs à cet acteur d’effectuer ce travail avec un économiste.

De plus, le caractère innovant de la réversibilité peut impacter le budget, par la nécessité de financer des expériences préalables avant mise en œuvre, des formations dédiées aux acteurs voire de nouveaux métiers. 

Le rapport de l’AQC conseille aux maîtres d’ouvrage de raisonner plus globalement les financements à amorcer dans la réversibilité. Ceux-ci seraient plus avantageux du point de vue matériel, technique, mais aussi foncier, pouvant réduire d’un tiers le budget de la construction neuve.

 

Répondre aux règlementations sans être freiné

 

Aujourd’hui les réglementations de la construction continuent à être un frein à la réversibilité, car elles varient selon la destination du bâtiment. De récentes mesures législatives tendent à assouplir ces cadres rigides. C’est le cas par exemple de la loi Elan, qui propose une hauteur réglementaire intermédiaire de 25 m à 50 m de haut, pour faciliter la transformation d’un immeuble de bureau, classifié grande hauteur à partir de 28 m, en logement, classifié comme tel également dès les 50 m.

Une flexibilité dont l’AQC invite les maîtres d’ouvrage à faire preuve, en anticipant des seuils maximums imposés par certaines normes sécuritaires du bâtiment. 

Pour la performance acoustique, en intérieur comme en façade, les critères en logement sont les plus exigeants, (d’au moins 53 dB des bruits aériens contre 45-50 dB pour les bureaux) et devraient donc servir de référence pour la réversibilité selon le rapport. En ce qui concerne l’accessibilité, c’est l’inverse, car la largeur des couloirs doit être d'1,40 m minimum pour les bureaux d’1,20 m pour les logements.

Afin d’ajuster ces calibrages, l’AQC invite à tirer des leçons de la réversibilité de la transformation de l’existant. Ce type d’opération donnerait effectivement des idées sur la réorganisation de l’espace, dont, par exemple, la mise en place d’une double hauteur au rez-de-chaussée d’un logement collectif. Cela permet d'installer un duplex, tout en présentant une qualité fonctionnelle pour un commercial cherchant à s’établir dans l’immeuble.

 

Une traçabilité rigoureuse à chaque étape du chantier

 

Tout au long des travaux de réversibilité, le rapport de l’AQC appelle à la vigilance. Vigilance vis-à-vis de la performance de certains matériaux, surtout du côté des façades et des menuiseries.  Le maître d’œuvre doit donc vérifier leur qualité et d’éventuelles erreurs d’information données, pouvant engager sa responsabilité.

La sécurité des ouvriers sur le terrain est à anticiper via le dossier des ouvrages exécutés (DOE), censé décrire dans le détail les tâches exécutées, mentionnant les outils, compétences et précautions employées. Les DOE sont exploitables dans les 10 à 15 ans suivant la livraison, afin de guider les équipes impliquées dans la transformation du bâtiment. Pour une meilleure gestion de ces données, le rapport de l’AQC recommande le recours BIM.

Par ailleurs, il convient que les professionnels prévoient un diagnostic de la structure et du second-œuvre du bâtiment, dans le cas d’une potentielle détérioration de ces derniers par les usagers. Un élément utile dans le cas d’une surélévation, où un bureau technique peut intervenir et vérifier que la structure est suffisante pour supporter le poids ajouté.

La commission de sécurité doit par ailleurs être prévenue la réversibilité du logement pour qu’elle prenne en compte la conformité logement mais aussi bureau. 

Lorsque le bâtiment trouve acquéreur, celui-ci doit connaître cette réversibilité et disposer des plans de travaux, car le coût initial sera à sa charge. L’information doit être aussi transmise à la copropriété, pour que celle-ci formule dans son règlement des clauses permettant une transition plus simple durant la vie du bâtiment.

Toujours côté règlement, l’opération peut s’affranchir d’un dépôt de demande d’autorisation d’urbanisme en mairie, tant que les travaux ne touchent pas les structures porteuses ni les façades, sans emprise de 20 ou 40 m2 sur les sols et planchers.

En parallèle, l’AQC invite les acteurs des opérations de réversibilité de bien prévoir l'éventuel chevauchement de la responsabilité d’assurance décennale des constructeurs entre les deux vies du bâtiment,  encadrée par la loi Spinetta du 4 janvier 1978. 


Virginie Kroun

Photo de Une : Adobe Stock

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