93% des Français trouvent leur logement décent (étude)
Le ministère de la transition écologique a annoncé hier la publication d’un décret élargissant la définition d’un « logement décent » ; un texte qui permet d’exclure les premières passoires énergétiques du marché locatif. Si la loi définit la décence d’un logement selon 4 piliers (sécurité, santé, confort et performance énergétique), que pensent les Français de leur lieu de vie ? A travers une enquête, la CDI-Fnaim se propose de répondre à cette question ; une thématique qui sera d’ailleurs l’élément central des 1eres Assises Nationales du Diagnostic Immobilier que le groupement organise le 20 janvier prochain sous un format 100% digital.
Pourquoi ces Assises ? Elles visent notamment à « prendre régulièrement le pouls de la population » par rapport aux informations et conseils apportés par les diagnostiqueurs, à l’acquéreur par exemple lors de transactions immobilières, ou encore au bailleur souhaitant ou devant engager des travaux de rénovation énergétique, explique Thierry Marchand, Président de la CDI-Fnaim. L’événement réunira les professionnels du secteur ainsi que des politiques pour « réfléchir sur le bien-fondé de ce que nous faisons au quotidien. La décence est apparue comme le thème le plus porteur du moment ». Elle est « aujourd’hui au cœur de la vie sociale de nos concitoyens », un phénomène accentué par la COVID-19. « On s’est rendu compte qu’on avait besoin de vivre dans un logement assez grand, sain », poursuit-il. L’étude a ainsi démontré que la décence était « au carrefour de la vie de tout un chacun ».
Des logements majoritairement décents mais…
Dans le cadre de cette étude, plus de 3 000 personnes ont été interrogées sur la vision qu’ils ont de la décence en général, et sur la perception qu’ils ont de leur propre logement quant à la décence, précise Jennifer Laroussarias, Formatrice et consultante chez AUBE. Elle explique également que l’enquête, ayant été réalisée par voie électronique du fait de la crise sanitaire, a exclu les Français en situation de grande précarité.
Les interrogés déclarent à 93% trouver leur logement « décent ». Attention cependant, cette vision peut ne pas refléter la réalité. Jennifer Laroussarias cite l’exemple d’une voiture que l’on pourrait supposer « superbe ». « Mais vous ne connaissez rien au moteur et n’allez pas voir ce moteur. Et en réalité, cette voiture a quelques problématiques ». C’est souvent la même chose avec le logement, souligne-t-elle.
Les Français définissent la décence selon 5 critères : la présence de toilettes dans le logement tout d’abord à 43%. « Une présence nécessaire avec une notion d’intimité ». A ce sujet, Thierry Marchand rappelle que le décret récemment publié ne rend pas obligatoire d’avoir des toilettes à l’intérieur du logement, pouvant ainsi se retrouver sur le palier… Une solution qui, bien que peu confortable, reste néanmoins bien plus adaptée que des toilettes installées sous l’évier, comme on le voit dans certaines annonces sur internet. « Vous avez des propriétaires qui louent des choses qui dépassent l’entendement », pointe-t-il.
Deuxième critère, la conformité de l’installation électrique (32%). Si les interrogés y accordent de l’importance, plus de 2/3 des installations électriques dans les logements ne respectent pas les conformités nécessaires minimales, dévoile le président de la CDI-Fnaim. A ce propos, il rappelle les chiffres d’une étude Promotelec qui démontre que sur 200 000 incendies d’habitation qui ont lieu chaque année, 50 000 sont de source électrique. On compte également plus de 3 000 victimes d’électrisations par an, des accidents qui concernent très souvent de jeunes enfants. Thierry Marchand souligne ainsi l’intérêt du diagnostic électrique et insiste sur l’importance de mettre en exergue les problématiques observées. Trop souvent, les travaux nécessaires ne sont pas réalisés.
En troisième position, vient la notion de chauffage, la présence de fenêtres sur l’extérieur et une bonne isolation (21%). « On est sur du confort ». Ce critère est un peu la traduction de « la peur, la crainte de ne pas pouvoir se chauffer. Beaucoup de logements sont encore mal isolés, sont des passoires voire des épaves thermiques pour certains. Il y a aussi le problème social de ne pas pouvoir financer son chauffage ».
Le 4e élément cité est l’absence de menaces pour la santé des occupants (19%). « Quand on parle de menaces pour la santé, on va parler de ventilation ». Thierry Marchand indique : « On estime aujourd’hui que 90% des logements ont une ventilation défectueuse, déséquilibrée ou absente ». « Plus on va vers de la rénovation énergétique, plus on va mettre des fenêtres en double vitrage très performantes et étanches à l'air. Et on oublie l'essence même de la ventilation ». Une bonne qualité de l’air intérieure est pourtant primordiale.
L’absence de menaces, c’est aussi « de ne pas avoir d'infestation ». « Malheureusement, compte-tenu des changements climatiques, les petits insectes vont avoir une fâcheuse tendance à se développer de façon plus importante », explique Jennifer Laroussarias.
Et enfin, cinquième critère, la salubrité du logement évoquée à 18%, avec une vigilance portée sur les moisissures dans les logements.
Les seniors priorisent les critères techniques
Selon l’étude, les jeunes sont plus nombreux à trouver leur logement indécent. Ce peut être lié au fait qu’ils sont plus nombreux que les + de 60 ans à vivre dans un appartement. Les interrogés estiment qu’une surface de logement de 33 m2 est adaptée pour se sentir confortable dans son logement… à condition de vivre seul ! Les jeunes intègrent davantage de critères dits de confort (transports en commun, espace vert, baignoire, sécurité du quartier, luminosité) contrairement aux + de 60 ans qui eux priorisent les critères techniques tels que la ventilation et l’installation électrique aux normes.
Alors que les actions en faveur de la rénovation se multiplient (France Relance, MaPrimeRénov’), l’efficacité énergétique n’est pas toujours une priorité, notamment chez les 7% de Français qui déclarent leur logement indécent. On suppose ici que ces personnes vivent dans des logements indignes, et que les inquiétudes sont donc tout autre. Et ils sont 64% à juger que l’impact écologique d’un logement détermine sa décence.
Dernier élément de l’étude, la décence et les nouveaux usages. 21% des sondés évaluent la décence de leur logement par le prix, le voisinage, la présence de commerces ou commodités de proximité.
Rose Colombel
Photo de une : ©Adobe Stock