Travailleurs détachés : les fraudeurs s'adaptent constamment
Malgré le déploiement de tout un arsenal législatif, « le rythme de progrès pouvant en être attendu ne paraît pas à la hauteur de l'enjeu », avance l'étude d'impact, sur le projet de loi réformant le droit du Travail.
Et pour cause, l'adaptation des fraudeurs aux nouvelles contraintes est « constante » et « la complexité des montages frauduleux est aujourd'hui relevée par l'ensemble des corps de contrôle ».
Au cours de ces dernières années, « un marché économique du détachement s'est constitué et organisé. Ce développement massif s'est accompagné de pratiques déviantes qui ne s'expliquent pas
seulement par le coût réduit du travailleur détaché », souligne l'étude.
Parmi les fraudes relevées, des « niveaux de salaire versés, inférieurs à notre salaire minimum, des primes non payées ou des heures supplémentaires effectuées sans limite et non majorées, le non-paiement ou remboursement de frais de transport ou de logement, des conditions d'hébergement indignes, le rattachement illicite à un régime social plus avantageux ».
Certains secteurs sont particulièrement touchés, comme le BTP, les transports de marchandises et l'agriculture.
Au cœur de ces fraudes, les décideurs ou utilisateurs de main d’œuvre qui organisent des montages illégaux : abattoirs, grandes entreprises de transport qui créent des filiales dans des pays européens afin de faire des salariés détachés en France, maîtres d'ouvrage d'envergure du BTP qui se défaussent sur des entreprises donneuses d'ordre de second rang, appels d'offre comportant des offres anormalement basses, etc.
+ 10 % de travailleurs détachés
Selon l'étude, le phénomène s'amplifie en raison de l'augmentation très forte du nombre de détachements déclarés en France, « 230 000 tous secteurs confondus en 2014, soit +10 % par rapport à 2013 ».
La main d'oeuvre polonaise représente la première nationalité détachée en France, devant les salariés de nationalité portugaise, puis roumaine.
C'est dans le domaine des entreprises de travail temporaire que la hausse est la plus significative avec +26 % de déclarations en 2014.
Ce chiffre ne représente cependant qu'une « appréciation » sans commune mesure avec l'ampleur réelle du « phénomène », puisque, précise l'étude, « il existe une sous-déclaration avérée, mais qu'il est cependant impossible de quantifier objectivement ».
Parmi les mesures préconisées, l'étude demande la transposition définitive de la directive européenne de 2014 concernant le détachement de travailleurs et la concurrence sociale déloyale.
Une seule mesure législative reste à prendre afin de permettre l'exécution en France de sanctions administratives prononcées par un État membre à l'encontre d'une entreprise française.
Celle-ci doit permettre de recouvrer des amendes administratives prononcées par un autre État membre à l'encontre d'un prestataire de services français ayant enfreint sur le territoire de cet État membre sa réglementation en matière de détachement de travailleurs.
Quelques chiffres clés1300 contrôles en moyenne par mois depuis septembre contre 600 en juin139 amendes pour près de 700 000 euros d’amendes en cumulé 15 arrêts de chantier 2 suspensions de PSI en Corse, dans le secteur du BTP Depuis juillet, plus de 600 PV dressés |
C.T (avec AFP)
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