Le hangar agricole pour stocker son matériel de chantier ?
Lancée fin 2021, la plateforme Mon Hangar permet aux exploitants agricoles de louer leurs terrains, hangars et entrepôts inexploités aux particuliers et autres professionnels. Parmi les utilisateurs, la start-up compte 20 % d’entreprises du BTP, dont une grande majorité de TPE et PME, pour stocker à la fois leurs engins de chantiers voire des matières premières encombrantes (marbre, pierre, bois etc...), qui peuvent représenter du stock mort et de rebord.
Le procédé, tout aussi pratique qu’il soit, n’a pourtant rien de révolutionnaire. « Pour la petite anecdote, depuis 1945, après la guerre, la plupart des bâtiments étaient bombardés, détruits. Les seuls bâtiments qui tenaient encore debout, c’étaient ceux des agriculteurs. Donc, historiquement, les entreprises et particuliers ont toujours le réflexe de stocker chez les agriculteurs du coin, puisque c’était le seul bâtiment qui tenait debout à 20 km à la ronde », nous raconte Joris Baco, fondateur de Mon Hangar.
Une pratique mature, mais qui manque de structure et de numérisation, souvent éxercée « à l’arrache » et « sans contrat » nous rapporte Joris Baco. C’est là que Mon Hangar intervient, en centralisant près de 500 hangars agricoles sur toute la France, avec tout l’accompagnement que cela implique. D’un côté par la recherche de ces hangars, de l’autre par la contractualisation de ces échanges, en passant par la mise en place d’une interface de transaction et de facturation, pour gérer les flux financiers.
Un échange d’espaces de stockage digitalisé et mieux structuré
Mon Hangar se présente comme un tiers de confiance entre loueur et locataire, un peu comme Airbnb dans l’hébergement. Et comme Airbnb, Mon Hangar prélève également une commission au locataire, qui varie selon la complexité du dossier, la durée de stockage, le montant et la surface recherchée.
« Si ce n’est que la grosse différence avec Airbnb, c’est que la commission est prélevée à la fois chez le propriétaire de l’appartement et le locataire, sachant qu’ils prélèvent 20-25 % », compare Joris Baco. « Alors que chez nous par exemple, si l’agriculteur veut 1000 euros par an pour un stockage de 200 m2, on va rajouter notre commission sur son prix à lui, ce qui fait qu’il aura ses 1000 euros et c’est le locataire qui viendra supporter notre commission », détaille-t-il.
Mais qu’en est-il de l’assurabilité du service, surtout en cas de dégradation des matières premières ou vol des engins stockés ? « Dans la grande majorité des cas, l’agriculteur est déjà assuré pour une activité de stockage et pour son bâtiment », nous répond le fondateur de Mon Hangar.
Même cas du figure pour l’entreprise locataire, qui est déjà assurée pour son matériel et ses propres marchandises, mais doit prendre une option supplémentaire pour stocker chez un tiers. D’ailleurs, en 2023, Mon Hangar développera son propre dispositif d’assurance, inclus dans le prix de service. Il s’agit d’une option complémentaire permettant de rembourser les franchises - prélevées sur les fonds versés par l’assureur - en cas de casse de matériel, par exemple.
Limiter les dépenses des entreprises du BTP
Aux projets de Mon Hangar s’ajoute le transport des véhicules et de matériels, qui étendra la chaîne de stockage. Il faut dire que Joris Baco a pour ambition d’étendre son maillage de hangars agricoles à 5000 lieux de stockage d’ici fin 2023-début 2024, afin de réduire la distance de 45 minutes entre le locataire et le local, à moins de 20 minutes. Le tout pour des prix deux à trois fois moins chers que chez les professionnels du stockage.
De quoi réduire les dépenses des PME et TPE du secteur, déjà en proie aux hausses de prix de matières premières, des énergies et de l’essence. Si les leviers financiers pour réduire l’inflation ou la mutualisation des ressources ont déjà été envisagés pour faciliter le quotidien des professionnels du BTP, la diversification des espaces de stockage semble être une autre source d’économies.
« En moyenne on est à 20, 30, 40, 50 m2 minimum de stockage. En ville ça coûte une fortune, à la périphérie des villes le marché est tellement saturé que le m2 s’envole », commente le fondateur de Mon Hangar. Mais ce qu’apprécient les entreprises, en particulier du BTP, dans la plateforme, c’est sa flexibilité. Le fondateur explique « que si on va voir un pro du stockage à proximité, souvent on doit s’engager sur des baux de trois, six, neuf [ans]. Alors que nous, c’est un mois minimum et après le temps qu’il faut ». Temps qu’il faut pour accomplir le chantier ou toute autre activité nécessitant le service de Mon Hangar.
Cap vers l’économie circulaire ?
Mais au-delà de sabrer les dépenses d’une entreprises du BTP, Mon Hangar incite à limiter la construction d’espaces de stockage. Une tendance impactante pour l’environnement, entre les fortes émissions de CO2 dans la construction et l’artificialisation des sols, au cœur de l’actualité du BTP.
« Depuis 2017, je crois que c’est l’équivalent de 50 millions de m2 qui ont été construits pour répondre à la demande stockage en France. Alors que nous, on veut être capables de proposer les plus de 100 millions de m2 disponibles en France chez des agriculteurs », nous rapporte Joris Baco. D’autant qu’entre le permis de construire et l’utilisation d’un bâtiment de stockage flambant neuf, il faut attendre deux à trois ans. Mon Hangar, de son coté, propose une mise en relation en moins d’un mois.
En investissant dans les hangars agricoles, les entreprises du BTP investissent également dans l’économie locale et contribuent au renouvellement du monde agricole. Sûrement une nouvelle façon d’entretenir le lien entre souveraineté agricole en France et verdissement du BTP, déjà engagée par exemple avec la récente commercialisation du biofioul F30.
Propos recueillis par Virginie Kroun
Photo de Une : Mon Hangar