Fréjus : la mosquée menacée de démolition
Depuis 2013, la mosquée de Fréjus, construite au cœur d'un ensemble immobilier où est présente une forte communauté d'origine maghrébine, n’a cessé d’être au centre de nombreuses polémiques.
En octobre 2013, la commune de Saint-Raphaël, voisine à celle de Fréjus, avait saisi le tribunal correctionnel pour contester la validité du permis de construire de la mosquée dénonçant par la même occasion la complicité du maire de l’époque, Elie Brun (ex-UMP) dans la délivrance de cette autorisation administrative.
Un an plus tard, le maire frontiste David Rachline avait pris un arrêté exigeant l’arrêt du chantier : les travaux n’auraient pas débuté dans les deux ans suivants la délivrance du permis de construire originel.
En décembre 2014, l’Association El Fath saisissait à son tour le tribunal administratif de Toulon qui suspendait alors l’exécution de l’arrêté pris par le Maire de Fréjus.
En septembre 2015, l’association plaidait l’ouverture de la mosquée auprès du Tribunal administratif, un référé d’ouverture finalement rejeté.
Le 28 octobre 2015, la préfecture décidait de mettre la Ville en demeure d’ouvrir le culte musulman de La Gabelle. M. Rachline annonçait alors la tenue d’un référendum.
Le 10 novembre dernier, le Conseil d’Etat ordonnait finalement au maire FN de Fréjus d’ouvrir les lieux sous 8 jours et sous peine d’amende de 500 euros par jour de retard.
Un retournement de situation qui remet en question l’existence de la mosquée
C’est aujourd’hui la demande de démolition de la mosquée qui vient raviver les tensions à Fréjus, une requête durement critiquée par l’association cultuelle El Fath.Le tribunal correctionnel devra rendre son jugement le 26 février 2016 à 13h30 et statuer sur le caractère frauduleux ou non de l’obtention du permis de construction par l’association.
Dans son réquisitoire, le procureur de la République a cherché à démontrer que l’association n’était pas propriétaire de l’intégralité des terrains au moment où elle a déposé sa demande. Le représentant du parquet estime qu’elle en était devenue propriétaire suite à un « montage juridique ».
Le procureur a demandé des peines d’amende pour l’association El Fath (60 000 euros) et pour son président Driss Maaroufi (30 000 euros). Mais il s’est surtout attaqué à l’ancien maire de Fréjus, M. Brun pour lequel il a demandé 18 mois d’emprisonnement avec sursis et 150 000 euros d’amende.
La démolition de la mosquée permettrait de restituer les terrains. Le lieu de culte s’étend sur 1 500 m2 et peut accueillir au moins 700 personnes. Le procureur a demandé que ces mesures de restitution se mettent en place dans un délai de six mois avec une astreinte de 500 euros par jour de retard.
La commune s'est portée partie civile et son avocat a demandé lui aussi la démolition du bâtiment.
La requête est bien sûr fortement condamnée par Me Moad Nefati, avocat de l’association El Fath, qui dans sa plaidoirie a déclaré « Démolir une mosquée, c'est un réquisitoire sans précédent. Ce sont des réquisitions que même en Espagne et en Andalousie au XVe siècle on n'aurait pas envisagées », a-t-il pointé, en avertissant le tribunal : « Vous êtes devant un dossier de liberté fondamentale, une atteinte grave à la liberté de culte », une liberté que la justice est justement là, selon lui, pour protéger.
R.C (Avec Afp)