Fondation Abbé Pierre : « on peut être à la fois propriétaires, pauvres et mal-logés »
« L'habitat indigne ne concerne pas que des locataires victimes de marchands de sommeil : on peut à la fois être propriétaires et pauvres et mal-logés », a expliqué à l’AFP Julia Faure, responsable du programme "SOS Taudis" de la Fondation Abbé Pierre. Selon la fondation, 1,3 millions de personnes vivent actuellement « dans des logements qui menacent leur santé et leur sécurité ».
Grâce au programme « SOS taudis » 2 000 logements ont pu être rénovés depuis 2012. Mais avec l’effondrement de deux immeubles à Marseille, en novembre 2018, causant la mort de huit personnes, l’habitat indigne est plus que d’actualité.
Des propriétaires pauvres
L’habitat indigne est très présent dans les centres villes anciens et les copropriétés dégradées mais il touche en réalité tout le territoire : villages, zones rurales ou villes de taille moyenne. Parmi les personnes vivant dans ces taudis, la Fondation explique que « dans un cas sur deux, les occupants sont des propriétaires pauvres qui n’ont pas les moyens de réaliser des travaux de rénovation ou de se loger dans un logement décent ».
Elle pointe du doigt ces habitats dangereux, notamment pour les enfants : « problèmes d’humidité, logements mal ventilés, murs fissurés, plafond risquant de s’effondrer ou encore installations électriques vétustes ».
« Un cercle vicieux »
De nombreux ménages trouvent sécurité et stabilité dans l’accès à la propriété, contrairement aux logements en location qui ont vu leur prix exploser. « Cela peut se traduire par l’acquisition d’un logement peu cher dans une copropriété dégradée ou d’un logement à rénover en zone péri-urbaine, voire rurale, dont les travaux se révèlent rapidement trop couteux », décrypte la Fondation Abbé Pierre.
C’est notamment le cas de madame T., installée dans la Somme avec ses deux enfants, dont l’association a recueilli le témoignage poignant : « Nous nous étions installés en 2011 avec mon mari en sachant bien qu’il y aurait des travaux à faire, mais on ne pensait pas que c’était à ce point. Nous étions dans un cercle vicieux, on n’arrêtait pas de chauffer pour rien et on dépensait toujours plus. La seule chose qu’on avait pu prendre en charge rapidement, c’est le changement des fenêtres et le poêle à granulés, mais ce n’était pas suffisant », explique-t-elle. Cette mère de famille a pu bénéficier du programme SOS taudis, par l’intermédiaire d’un organisme local et de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH). Finie la moisissure sur les murs, les nuits tous ensemble « dans la même pièce pour ne pas avoir froid ».
2 000 taudis rénovés
Le plan SOS taudis de la Fondation Abbé Pierre fonctionne grâce à un partenariat avec plus de 50 associations présentes su tout le territoire, travaillant sur un « accompagnement global et durable, à la fois social, technique, juridique et financier ». Entre 2007 et 2011, le programme avait déjà aidé 1 600 ménages. Depuis 2012, les 2 000 taudis rénovés ont représenté 9 millions d’euros d’aides : « Les deux tiers des logements qui ont été rénovés étaient des habitats indignes, un tiers des logements qui avaient besoin de rénovation énergétique car les gens qui y vivaient avaient froid », a détaillé Julia Faure.
En janvier, la Fondation Abbé Pierre a demandé au gouvernement la mise en place d'« un plan national de résorption sur 10 ans », estimant que « la lutte contre l'habitat indigne doit faire l'objet d'une action plus soutenue de la puissance publique ». Des mesures de renforcement de la lutte contre l’habitat indigne avaient alors étaient prises par le Gouvernement.
L. C.
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