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Quel impact le flou politique peut-il avoir sur la rénovation énergétique ?

Publié le 16 juillet 2024

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Quelques jours après les résultats des élections législatives, Pierre-Marie Perrin, directeur des affaires publiques d’Hellio, revient sur les conséquences du flou politique sur l’actualité de la rénovation énergétique.
Quel impact le flou politique peut-il avoir sur la rénovation énergétique ? - Batiweb

Quel impact les élections législatives ont-elles eu et vont-elles avoir dans les prochains mois ?


Pierre-Marie Perrin : Nous sommes quand même dans une situation assez étrange pour nos sujets de rénovation énergétique avec la dissolution et cette Assemblée nationale qui a du mal à se mettre en place. Et en même temps, on se rend compte qu'il y a quand même des aspects positifs parce cela aurait pu être pire. On pense que nos sujets vont quand même être préservés, et qu'il y a quand même un consensus sur les objectifs à atteindre et sur la pérennité des dispositifs.


À part le Rassemblement national, qui avait des problématiques sur la sobriété énergétique, sur les aides à la rénovation, et qui était plus centré sur la place du nucléaire, les autres partis étaient quand même plus à dire qu'il fallait accentuer la rénovation énergétique, l'efficacité énergétique, le maintien des dispositifs, donc c’est plutôt positif pour nous.


Cette dissolution de l’Assemblée a-t-elle mis tous les sujets en stand-by ?


Pierre-Marie Perrin : On voit quand même que, malgré tout, il y a des sujets qui sortent, il y a des décrets qui vont être publiés. Je pense notamment aux taux d’écrêtement. Avant, pour les rénovations dites d’ampleur, le taux d’aide ne pouvait pas dépasser 90 % pour les ménages très modestes.


Maintenant, le montant cumulé de l'ensemble des aides perçues avec MaPrimeRénov' en cas de rénovation globale ne pourra pas dépasser 100 %, mais on pourra aller jusqu'à 100 % du montant TTC pour les ménages très modestes, 90 % du montant TTC pour les ménages modestes (au lieu de 80 % dans la dernière mouture de MaPrimeRénov'), et puis 80 % pour les ménages intermédiaires (au lieu de 60 %), et enfin 50 % pour les ménages aisés (au lieu de 40 %).

Donc, normalement, les taux de couverture par les aides vont être plus importants à partir du 1er janvier 2025.


Concernant MaPrimeRénov’, que pensez-vous du fait que les mono-gestes soient de nouveau autorisés pour les passoires thermiques jusqu’à fin décembre ? Selon vous, quelle doit être la suite ?


Pierre-Marie Perrin : Nous prônons toujours la stabilité et la visibilité, à moyen ou long terme. Et là c'est vrai qu'on a eu quand même beaucoup de revirements, de changements de cap en 6 mois. Le mono-geste c'est bien, parce qu'il y a des ménages qui ont déjà fait des gestes de rénovation dans les années précédentes et qui, du coup, n'ont pas forcément besoin de passer par une rénovation globale, mais ont encore des gestes de travaux à faire. Nous, on souhaite de la stabilité pour la filière, et pas des à-coups. Et si, en plus, il y a des changements politiques importants, cela n'aide pas.


Plus largement, comment se porte le marché de la rénovation énergétique actuellement ?


Pierre-Marie Perrin : Côté MaPrimeRénov’, on voit avec les changements, dont Mon Accompagnateur Rénov’ qui a quand même poussé les délais d'instruction, et les résultats de l'ANAH, que les chiffres du premier trimestre sont quand même en chute libre.


Sur les CEE, il y a une incertitude. Tant que la filière n’a pas de visibilité sur l’importance de l’obligation qu’il y aura en 6ème période, il y aura un attentisme. Le Pôle national des certificats d'économie d'énergie avait une durée d'instruction, normalement de deux mois, qui a été considérablement ralentie en début d'année.


Pouvez-vous nous en dire plus sur vos propositions pour simplifier et accélérer la rénovation énergétique ?


Pierre-Marie Perrin : Il y a un vrai sujet sur les copropriétés, parce qu'il y a 500 000 copropriétés en France et accélérer leur rénovation énergétique, c'est compliqué, parce que la durée de travaux est plus longue. Le temps pour convaincre les copropriétaires et les syndics est également plus long.


Nous avons notamment une proposition qui consisterait à donner une bonification en cas de mise en place d'un contrat de performance énergétique pour les copropriétés, afin d'assurer le suivi des économies d'énergie réalisées après les travaux. Pour nous, c'est vraiment important d'aider les copropriétaires à suivre leur consommation énergétique, à inscrire des contrats de performance énergétique dans le but de bonifier les travaux, bonifier les aides et, en même temps, piloter les travaux effectués.


Pour travailler sur la précarité énergétique et le mono-geste, on pourrait très bien créer des contrats à long terme, qui permettraient de commencer avec une rénovation par geste, et de l’échelonner dans le temps pour arriver à une rénovation globale d’ampleur entre 4 et 5 ans après, et contractualiser ce parcours par étapes.


Nous sommes également l’un des lauréats de l’appel à projet de l’Ademe, qui consisterait à créer un opérateur ensemblier, responsable des économies d’énergie des projets, et capable de se rémunérer sur les économies d’énergie réalisées post-travaux. C’est-à-dire qu’un acteur comme Hellio pourrait très bien dire à un ménage modeste ou très modeste « Je vais porter votre reste à charge, et pendant 5 à 7 ans, je vais me rémunérer sur les économies d’énergie qui auront été réalisées grâce au travaux ».


Et puis il y a un autre vrai sujet : les économies réelles d’énergie. Parce qu’aujourd’hui on donne les aides, mais on est en incapacité, notamment pour les ménages, de mesurer les économies d’énergie réalisées et le retour sur investissement. Il ne faudrait pas que dans 10 ou15 ans, on se réveille et qu'on se rende compte que l’argent public est parti mais que les rénovations qui devaient être efficaces ne le sont pas. Donc on aimerait mettre en place des critères d'obtention des aides, ou en tout cas de suivi.


Propos recueillis par Claire Lemonnier
Photo de une : Adobe Stock

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