La loi 3DS définitivement adoptée par les députés et sénateurs
C’est officiel : la loi pour la « décentralisation, différenciation, déconcentration et simplification » (3DS) a été définitivement adoptée. D’abord par les députés (154 voix pour, 18 contre et 12 abstentions) ce mardi 8 février, puis par les sénateurs (301 voix pour et 32 voix contre) ce mercredi 9 février.
Déposé le 12 mai 2021 par Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, le texte tend vers « une nouvelle étape de la décentralisation ». Ce qui signifie plus de souplesse et de poids accordé aux collectivités locales, sur leur politique de logement ou plus largement urbaine.
Revoir les obligations de déploiement du logement social
Comme l’évoquaient la ministre chargée du Logement Emmanuelle Wargon et son cabinet ce mardi, la loi 3DS comporte un large volet Logement. A commercer par la pérennisation, au-delà de 2025, de l’article 55 de loi SRU, imposant aux collectivités un seuil minimum de logement sociaux (20 à 25 %).
Qui dit maintien permanent des obligations, dit maintien permanent voire amélioration des sanctions vis-à-vis des communes déficitaires. La loi 3DS renforce notamment le contrôle et le prélèvement financiers des collectivités concernées. Prélèvements qui seront versés à l’intercommunalité délégataire des aides à la pierre ou à l’Établissement Public Foncier (EPF) du territoire.
Un rapport adressé au préfet se chargera de désigner par fléchage un autre bénéficiaire et ainsi poursuivre autrepart les constructions de logements sociaux. « Le taux de majoration du prélèvement SRU d’une commune en cas de carence sera désormais directement proportionnel à l’écart entre le nombre de logements sociaux réalisés et l’objectif », précise le Ministère de la Transition Écologique.
D’après un bilan 2020, 1100 communes restent déficitaires dont 280 sont carencées. La loi 3DS adapte par ailleurs les objectifs de rattrapage triennal, fixé à 33 % du déficit de logement sociaux.
De nouvelles mesures d’exemption à l’obligation SRU sont toutefois appliquées pour les communes présentant des champs captants d’eau potable ou des zones exposées au recul du trait de côte. Celle pour cause de faible desserte par les transports en commun saute et laisse place à un critère d’isolement ou de difficultés d’accès aux bassins de vie et d’emplois environnants. L’élargissement de l’exemption pour cause de faible tension sur la demande de logement social aux agglomérations de moins de 30 000 habitants a été retenu.
Redéfinir le rôle des acteurs de la politique locale
Le texte donne aussi naissance au contrat de mixité sociale (CMS), pour mieux s’adapter aux contraintes des communes. « Il ouvre la possibilité d’adapter ces objectifs de construction, avec un plancher fixé à 25% du déficit, en fonction de la situation et des difficultés de la commune », développe le ministère de la Transition Écologique.
Déterminant les moyens mis en œuvre en ce sens, le contrat est signé entre le maire, le président de l’intercommunalité et le préfet. Ce dernier sera le seul à apprécier les conditions locales qui légitimeraient un tel réajustement.
Pour plus de mixité sociale, les territoires déjà soumis à la loi égalité-citoyenneté de 2017, auront, à compter de la promulgation de la loi 3DS, huit mois pour signer une convention intercommunale d’attributions (CIA). Le document fixe les objectifs d’attribution de logements sociaux aux ménages modestes, en dehors des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV).
« En l’absence de conclusion de la convention, il reviendra à l’intercommunalité la responsabilité de fixer à chaque bailleur les objectifs correspondants. A défaut, chaque bailleur se verra assigner par la loi l’objectif d’attribuer au moins 25% des logements sociaux en dehors des QPV aux 25% des ménages les plus modestes », détaille le Ministère de la Transition Écologique. Autre ajout dans la CIA : l’objectif d’attribution aux travailleurs dits « clés », selon les besoins et des bassins d’emploi locaux.
La loi 3DS tend à conforter le modèle des offices fonciers solidaires (OFS), déjà adopté par nombreuses collectivités. Leur but ? Proposer l’accession sociale à la propriété des appartements 30 % moins chers, par rapport aux moyennes des prix du marché. Le texte autorise désormais les collectivités à déléguer le droit de préemption urbain aux OFS ou de garantir leurs emprunts. Le propriétaire a ainsi le droit à diversifier les fonctions de son bien au départ dédié au logement (commerces, bureaux...)
Dans le cadre de l’encadrement des loyers, qui se poursuit jusqu’à novembre 2026, la loi 3DS responsabilise les communes, devant respecter certains critères dans leurs candidatures. Les annonces immobilières ont aussi obligation de mentionner le plafond de loyers minimum attribué à chaque typologie de logement.
Le texte se penche également sur le transfert de compétences d’un échelon territorial à un autre sur certaines zones. Cela se traduit entre autres par la garantie du transfert des routes nationales prioritairement aux départements, en collaboration avec les régions. La responsabilité du préfet du département est également dans l’attribution de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) et dans la gouvernance territoriale de l’Office français de la biodiversité (OFB) et des agences de l’eau.
Les communes ont quant à elle la possibilité de transférer des compétences « à la carte » à leur intercommunalité ou d’impliquer le maire dans la procédure d’autorisation pour porter atteinte à un alignement d’arbres. En outre, les élux locaux, en particulier ruraux, devront être mieux représentés au sein des commissions départementales de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), de l’agence nationale de l’habitat (ANAH) et des conférences territoriales de l’action publique (CTAP).
Virginie Kroun
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