Sols argileux : la Cour des Comptes mise sur plus de transparence et d’assurance
Le phénomène touchait encore plus de 10 millions de maisons en 2019, selon le Service de la Donnée et des Études Statistiques (SDES). Le retrait-gonflement des argiles (RGA) continue de contrarier les sols et par extension la tenue de l’habitat. Ce n’est donc pas pour rien que ses dégâts sont inscrits en France dans le régime des catastrophes naturelles - dit « Cat Nat » depuis 1989.
« Le phénomène de retrait-gonflement des sols argileux est le fruit de la combinaison d'une situation géotechnique et d'une succession d'épisodes climatiques : sur certains sols argileux, une succession de phases d'hydratation et de phases de sécheresse peut entrainer des dégâts sur les constructions », rappelle la Cour des Comptes dans communiqué publié mardi 15 février.
Communiqué faisant état d’un rapport sur l’« historique » tout comme les « travaux parlementaires et administratifs » consacrés à la gestion du RGA. L’urgence se fait sentir, alors que la Cour des Comptes a été saisie par le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques de l'Assemblée nationale fin 2020.
Une prévention mise en place tardivement
Premier constat de la Cour des Comptes : un déploiement tardif des mesures de préventions sur le RGA. « La connaissance du phénomène, pourtant ancienne, ne s'est accompagnée d'aucune politique efficace de prévention, jusqu'à l'intervention de la loi du 23 novembre 2018, dite loi ÉLAN, qui fixe des règles de construction dans les zones à risque », déplore-t-elle.
Mais est-ce que cela suffit ? Pas pour la Cour des comptes, dont le rapport met l’accent sur un contrôle de la mise en œuvre en conformité aux dispositions de la loi ÉLAN. Plus spécifiquement aux constructions d’avant 2020, la recherche est encouragée pour contrecarrer l’apparition du phénomène.
Pour plus de prévention des risques, la Cour propose également de privilégier l'information envers les acheteurs de biens immobiliers potentiellement exposés.
Revoir la prise en charge assurantielle
Selon le rapport, le RGA rassemble 36 % des sinistres liés aux catastrophes naturelles, voire la moitié des plus coûteux. Bien que, d’après l’étude du SDES citée auparavant, la majeure partie des territoires concernées par les sols argileux soient basés dans la partie Nord-Est et Sud de la France, il s’étend peu à peu sur « toutes les régions métropolitaines et plus de la moitié du parc de maisons individuelles », estime la Cour des Comptes.
Celle-ci met en cause les « effets du dérèglement climatique et les diverses projections réalisées la Caisse centrale de réassurance (CCR) et la Fédération française de l'assurance (FFA) ».
Des facteurs environnementaux dont l’ampleur et la gravité grandissantes pourraient bien changer le caractère du RGA, associé au régime des catastrophes naturelles. En se basant sur les conclusions en mars dernier du Conseil général de l'Environnement et du Développement durable (CGEDD) et de l'Inspection générale des finances (IGF) et l'Inspection générale de l'administration (IGA), la Cour préconise une refonte du régime assurantiel.
Le ministère du Logement n’a pas attendu ce compte-rendu pour s’emparer du sujet. Lors de la présentation des mesures de la loi 3DS ce mardi 8 février, le cabinet ministériel décrivait le RGA comme un phénomène loin d’être « exceptionnel », à l’origine de « vrais drames » selon Emmanuelle Wargon. Si un fonds d’urgence dédié est à l’étude, la ministre estime que tout le régime assurantiel est à revoir. Elle évoque notamment un projet d’habilitation à légiférer par ordonnance, qui sera rédigée par Bercy et appliquée normalement dans un délai de douze mois. L'objectif ? Mieux revoir le système en fonction de l’évolution du RGA dans le temps.
Virginie Kroun
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