Discours d’Elisabeth Borne : les annonces concernant le BTP
« Trop longtemps, notre vie politique n’a été faite que de blocs qui s’affrontent. Il est temps d’entrer dans l’ère des forces qui bâtissent ensemble (…) Je n’ai qu’une boussole qui sera celle de mon gouvernement : bâtir pour notre pays ».
Le vocabulaire utilisé par Elisabeth Borne, lors de son discours de politique générale adressé à l’Assemblée nationale ce mercredi 6 juillet, est imagé. Énergie, dette, pouvoir d’achat, retraites, défense… Bien que le ton englobe tous les sujets de la politique défendue par la Première ministre pour son mandat, on ne peut s’empêcher de penser qu’ils introduisent bien les annonces impliquant le secteur du BTP.
Vers la nationalisation d’EDF pour plus d’indépendance énergétique
Le mot compromis a souvent été employé lors du discours de la Première ministre aux députés. Compromis dans les idées politiques de tout un chacun, face à différents dossiers du quinquennat, y compris la transition énergétique.
Elisabeth Borne a ainsi réitéré le soutien du gouvernement d’un mix énergétique entre nucléaire et renouvelables, annoncé par Emmanuel Macron à Belfort, en février dernier. Il s’agit là d’un levier pour « remplacer nos dépenses en faveur des énergies fossiles, par des solutions décarbonées », objectif mis en avant par l’occupante de Matignon.
Un levier visant par extension l’atteinte des objectifs de neutralité carbone mais également d’indépendance au gaz russe et au pétrole, sur fond de guerre en Ukraine. L’ambition d’une souveraineté énergétique de la France devient donc une priorité du nouveau gouvernement Borne, que ce soit vis-à-vis du gaz, du pétrole, mais aussi de l’électricité.
C’est dans cette idée que l’État détiendra 100 % du capital d’EDF, ce qui reviendrait à la nationalisation de l’énergéticien. « Cette évolution permettra à EDF, de renforcer sa capacité, à mener dans les meilleurs délais des projets ambitieux et indispensables, pour notre avenir énergétique », affirme Elisabeth Borne. Projet notamment de construire six réacteurs nucléaires EPR 2 et de développer les énergies renouvelables.
À l’heure actuelle, EDF est détenu à 84 % par l’État. Depuis son entrée en bourse en 2005, le groupe enchaîne les tensions financières, entre retards et coûts de la construction de l’EPR de Flamanville, et la vente d’électricité bon marché pour contenir la facture des ménages et petits professionnels. Selon deux communiqués séparés d’EDF et du ministère de l’Économie et des finances, le processus de succession du PDG d'EDF Jean-Bernard Lévy est déjà lancé et devrait se dérouler au plus tard en mars 2023.
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Pilier d’une loi d’orientation énergie-climat présentée en septembre prochain, cette souveraineté énergétique penche également vers le verdissement des industries. Cet objectif bénéficiera d’ailleurs d'une partie des 50 milliards d’euros réunis par le plan France 2030. Mais au-delà de l’aspect énergétique, d’autres leviers comme le réemploi sont encouragés, de l’industrie au consommateur final.
« Les outils ont été mis en place lors du précèdent quinquennat. Il faut maintenant pleinement s’en emparer », appuie Elisabeth Borne. Pour rappel, la REP Bâtiment visant à instaurer les principes d’économie circulaire au sein de la filière, se prépare et s’appliquera au plus tard d’ici janvier 2023.
Massifier la rénovation dans les logements
« Pour la plupart des Français, le logement est la première dépense. Nous voulons qu’il soit abordable pour chacun », insiste la Première ministre.
Parmi les actions concrètes, le gouvernement compte sur le plafonnement des loyers, un « pacte de confiance » avec les bailleurs sociaux, mais aussi davantage de construction de logements en zone tendues. Une mesure déjà encouragée durant le premier quinquennat Macron, avec la prolongation et le réajustement de la loi SRU.
Face aux tensions sur l'approvisionnement et en énergies, « nous devons éviter toutes les consommations inutiles dans le domaine du logement. Nous amplifierons le succès de MaPrimeRénov’, pour rénover 700 000 logements par an », a également déclaré Elisabeth Borne.
Un dossier confié à Olivier Klein, nouveau ministre délégué au Logement et à la Ville. Son expérience en tant que président de l’Agence Nationale de la Rénovation Urbaine (ANRU) est sûrement un atout sur lequel se reposeront Elisabeth Borne et Christophe Béchu, nouveau ministre de la Transition écologique et de la cohésion des territoires, suite au remaniement. De son côté, l'Agence national de l’habitat (ANAH) entend bien relever le défi, décrivant 2021 « comme l’année de l’amplification énergétique ».
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Mais l’aide MaPrimeRénov’, englobée dans le dispositif France Rénov, n’ira probablement pas sans le dispositif MaPrimeAdapt’. Ce dispositif devrait permettre aux séniors de réaménager leur logement et « de vieillir sereinement » chez soi, rappelle la Première ministre, sans pour autant détailler la suite pour ce dispositif, dont le contenu devait être précisé en janvier.
Adapter le régime des retraites à la pénibilité du travail
Le pouvoir d’achat faisait partir des premiers sujets par la Première ministre, qui présentera en Conseil des ministres ce jeudi 7 juillet, des « textes d’urgence ». Ces derniers proposent notamment prolonger le bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l’électricité, d’augmenter les salaires et baisser les charges pour les indépendants.
Trois mesures qui devraient soulager les TPE et PME constituant le monde du bâtiment. Reste à connaître le montant de ces aides et leur impact sur la lutte contre les pénuries et le coût de matières premières, mais aussi celles concernant la main d'oeuvre.
À propos du recrutement, le discours d’Elisabeth Borne met l’accent sur le « plein emploi », en misant particulièrement sur l’apprentissage et la découverte des métiers dès le secondaire. « Avec les collectivités, nous ferons en sorte que chaque élève puisse découvrir et connaître des métiers, notamment ceux de l’artisanat, de l’industrie, du tourisme, les métiers d’art », promet-elle. D’autant que dans le BTP, l’apprentissage est une voie valorisée, notamment via l’expérimentation d’une aide par le CCCA-BTP.
Côté retraite, une déclaration d’Elisabeth Borne n’a pas manqué de provoquer un mélange d’applaudissements et d'indignation au sein de l’hémicycle : « Pour la prospérité de notre pays et la prospérité de notre système par répartition, pour bâtir de nouveaux progrès sociaux, pour qu’aucun retraité avec une carrière complète n’ait une pension inférieure à 1 100 euros net par mois, pour sortir de situations où le même métier ne garantit pas la même retraite : oui, nous devons travailler progressivement un peu plus longtemps », a-t-il estimé.
Et la Première ministre d’assurer que si réforme des retraites il y aura, celle-ci « ne sera pas uniforme, et devra prendre en compte les carrières longues et la pénibilité ». Un point sur lequel les professionnels du BTP l'attendront au tournant, la plupart ayant commencé une carrière très tôt/jeune et pour qui le compte pénibilité, mis en place en 2017, ne fait pas l’unanimité.
« Par l’innovation, par la technologie, par l’évolution des carrières, nous pouvons, nous devons améliorer les conditions de travail, et faire en sorte que nos compatriotes ne finissent plus leur carrière brisés », insiste cependant Elisabeth Borne, pouvant rappeler l'intérêt des exosquelettes, comprenant de nouvelles solutions sur le marché du BTP.
Pour regarder en intégralité le replay du discours de politique générale d’Elisabeth Borne, le replay ci-dessous :
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Virginie Kroun
Photo de Une : Youtube - Gouvernement