Les ordonnances pour répondre à l'urgence de construire des logements
D’ici la fin du mois d’avril, le gouvernement va déposer au Parlement un projet de loi d'habilitation qui vaudra autorisation de légiférer une fois adopté. Assimilées à des règlements, les ordonnances entrent en vigueur dès leur publication. Elles ne prennent toutefois valeur législative qu'après avoir été ratifiées par le Parlement dans un délai fixé.
MESURE N°1
Raccourcir les délais de procédure des grosses opérations de construction de logements
La déclaration de projet est une voie d’évolution possible, qui permet de gagner du temps en coordonnant les législations, mutualisant les étapes afin d’emporter la mise en compatibilité des documents d’urbanisme pour permettre la réalisation d’un projet reconnu d’intérêt général. L'émergence et la réalisation de projets d'aménagement, notamment en matière de logement, se heurtent très souvent au caractère figé des documents de planification.
Dans le domaine des procédures d'urbanisme, la déclaration de projet doit être mise en avant, renforcée et modernisée. Celle-ci va être simplifiée pour permettre d'affirmer l'intérêt général d'une opération devant les citoyens, gage d'acceptabilité du projet, en améliorant en amont la concertation des citoyens et l’évaluation environnementale ; de mettre en compatibilité les documents d'urbanisme (plan local d’urbanisme, schéma de cohérence territorial) ; d'adapter des normes supérieures.
MESURE N°2
Créer un géo-portail de l'urbanisme accessible à tous
Ce portail comporte un enjeu réglementaire de niveau européen imposant une standardisation des données pour faciliter leur partage. La mise à disposition en ligne des règlements d'urbanisme, des servitudes d'utilité publique et de tout autre document relatif au droit de l'urbanisme opposable sur chaque parcelle du territoire est un instrument qui favorise l'égal accès de tout citoyen à une information de qualité et validée, notamment, par les collectivités et l’État. Il appartient à l’État d'en être l'initiateur et le garant, car ce guichet unique d’informations sur l'urbanisme en France implique de fait une totale standardisation des données numérisées. Outre l’amélioration de la connaissance des politiques publiques d’urbanisme, ce géo-portail est un vecteur de modernisation de l’administration.
MESURE N°3
Assouplir le taux maximal de garantie d’emprunt pour les opérateurs d’aménagement
Les initiatives, publiques ou privées, se heurtent à la défiance des prêteurs, alors même que l’aménagement engendre par nature un décalage entre les recettes et les dépenses, et donc un besoin massif de recourir à l’emprunt pour financer les acquisitions foncières et les travaux d’équipement et d’aménagement. Il convient donc de mettre en place un accompagnement public ou parapublic permettant de redonner une capacité de projection aux acteurs publics et privés chargés de conduire ces opérations et, partant, les moyens d’atteindre l’objectif de 500 000 logements neufs par an assigné par le président de la République.
Permettre aux collectivités d’accorder aux aménageurs à qui elles ont concédé leurs opérations d’aménagement, des garanties d’emprunt allant jusqu’à 100 % (au lieu des 80 % actuellement autorisés par le code général des collectivités territoriales). Trouver les moyens de garantir le financement de l’aménagement pour faciliter l’accès au financement bancaire « classique ».
MESURE N°4
Lutter contre les recours malveillants et accélérer le traitement des contentieux en matière d’urbanisme
L’une des pistes à l’étude consiste à augmenter le seuil maximal de l’amende pour recours abusif pour créer un effet dissuasif et éviter les recours dilatoires (relèvement de 3 000 à 10 000 € minimum). En effet, aujourd’hui, dans les cas où le juge reconnaît le recours comme abusif, l’amende qu’il peut infliger à l’auteur de ce recours est limitée à 3000€. En comparaison au préjudice financier subi par le titulaire d’une autorisation d’urbanisme pour un projet immobilier ou un projet éolien victime d’un recours abusif, on peut qualifier cette amende de dérisoire et de non dissuasive.
Il faut par ailleurs que les recours parfaitement légitimes contre les permis de construire, qui permettraient la réalisation de logements, soient jugés plus vite qu'aujourd'hui. L’objectif est de réduire par deux le délai de traitement de ces recours devant la justice administrative. Un groupe de travail est chargé d’expertiser le sujet. Les conclusions de ces travaux sont attendues d’ici la fin du mois d’avril et pourront être transcrites par voie d’ordonnances.
MESURE N°5
Faciliter la transformation de bureaux en logements et favoriser la densité en zone tendue
Pour faciliter la construction de logements, il faut créer les conditions favorables à l'optimisation de l'utilisation des ressources foncières disponibles pour la construction de logements, quitte à autoriser des dérogations aux règles du PLU. Objectif : réduire les obligations de réalisation de places de stationnement à la charge des constructeurs de logements, dès lors que le projet est situé à proximité d’une station de transport collectif ; favoriser les alignements de faîtage entre bâtiments mitoyens ; faciliter la réalisation des opérations de surélévation d'immeubles de logements en Ile-de-France ; transformer les bureaux en logements : plus de 2,5 millions de m2 de bureaux sont vacants en Île-de-France, dont 500 000 m2 le sont depuis 4 ans et plus.
Le projet de loi « logement et urbanisme », qui sera présenté en Conseil des ministres en juin, comportera un certain nombre de dispositions structurelles, qui poursuivront cette modernisation des documents d'urbanisme en favorisant la densité plutôt que l’étalement urbain. Sont ainsi à l’étude des dispositions facilitant la densification du tissu pavillonnaire ou l’idée de rendre caducs les anciens POS dans un délai de 3 à 5 ans s'ils ne sont pas remplacés par des PLU, idéalement intercommunaux.
MESURE N°6
Sécuriser les opérations en vente en l’état futur d’achèvement
La garantie intrinsèque va être supprimée. Elle sera remplacée par l’obligation pour le promoteur, pour toutes les opérations de VEFA dans le domaine de l’habitat, de fournir une garantie financière, qui devra, en cas de défaillance du vendeur, apporter les fonds nécessaires à l’achèvement de l’immeuble. Cette disposition permettra de sécuriser les opérations de vente en l’état futur d’achèvement, en protégeant les acquéreurs des préjudices financiers importants engendrés par l’inachèvement de l’immeuble du fait de la défaillance financière du vendeur. Cette disposition, contribuera à restaurer un meilleur climat de confiance entre les candidats à l’accession d’un logement neuf et les professionnels de ce secteur.
La création d'un nouveau contrat de « vente en l’état futur de parachèvement » a pour but de permettre la vente sur plan d’appartements « prêts à aménager » situés au sein d’immeubles neufs. Les acquéreurs disposeront de logements clos, couverts avec l’arrivée de tous les fluides. Ils auront la possibilité de concevoir et de réaliser l’aménagement intérieur de leur logement (pose des cloisons, revêtement de sol et des murs, installation de la salle de bains, etc.).
MESURE N°7
Faciliter la gestion de la trésorerie des entreprises du bâtiment par une adaptation de la législation
Les entreprises du secteur du bâtiment sont d'abord pleinement éligibles aux dispositifs de soutien à la trésorerie mis en place par la Banque publique d'investissement depuis le début de l’année 2013, en particulier les 500 M€ de crédits de trésorerie dégagés depuis le 3 janvier, et le dispositif de préfinancement du crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE). Dans le cadre des marchés publics, le cahier des clauses administratives générales relatives aux marchés de travaux publics sera modifié pour réduire les délais de production du décompte général après réception des travaux.
MESURE N°8
Favoriser le développement du logement intermédiaire
Un statut du logement locatif intermédiaire va être défini (respect d’un plafond de loyer de niveau intermédiaire, ainsi que de plafonds de ressources du locataire), afin qu’il puisse être prescrit par les collectivités. Ce type de logement pourrait être limité aux zones où le développement d’un parc locatif intermédiaire est prioritaire, c’est-à-dire les zones tendues, où il existe un écart important entre les loyers pratiqués dans le parc social et les loyers de marché. Il serait réservé aux logements neufs, afin d’encourager à la construction. Afin d’enclencher cette mobilisation pour le logement intermédiaire, la Caisse des dépôts, au travers de sa filiale, la Société nationale immobilière, lancera cette année la construction de 10 000 logements intermédiaires.
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