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Le bail mobilité amplifie-t-il la crise du logement ?

Publié le 07 juin 2024

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Le bail mobilité, qui dure entre 1 à 10 mois, séduit de nombreux propriétaires à l'approche des Jeux olympiques de Paris 2024. Pourtant, certains d'entre eux exploitent ce dispositif pour en faire de la localisation touristique classique, selon les experts du secteur.
Le bail mobilité amplifie-t-il la crise du logement ? - Batiweb

Introduit par la loi Elan en 2018, le bail mobilité était une belle initiative pour « faciliter l’accès au logement des jeunes travailleurs », selon Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM). Mais à l’approche des JO, certains bailleurs pourraient en abuser pour en faire « un mauvais usage », avertit-il. 

Selon le réseau d'agences Lodgis, spécialisé dans la location meublée, les baux mobilité ont augmenté de 2,8 points au premier trimestre 2024 par rapport à l'année précédente. Environ « 15 % à 20 % » des propriétaires ont consulté Lodgis pour « un projet de localisation JO, notamment en bail mobilité ».

 

Des avantages… et des dérives

 

Plus flexible qu'un meublé classique et fiscalement avantageux, le bail mobilité est aussi moins contraignant qu'une location touristique. La plateforme Airbnb précise d’ailleurs aux bailleurs que les voyageurs sous bail mobilité ne payaient pas de taxe de séjour. Face à la pénurie de logements à Paris, de nombreux jeunes travailleurs et étudiants se voient contraints de signer ce type de caution, sans toujours en remplir les critères.

Pour certains, la fin du bail pendant les JO crée une situation très inconfortable. Joachim, par exemple, employé dans l'informatique et originaire de Bordeaux, doit trouver une solution avant la fin de son bail mobilité en juin. « Je dois négocier du télétravail pendant deux mois pour pouvoir retourner à Bordeaux où j'aurai un logement pendant les Jeux », dit le jeune homme de 23 ans.

Mais que faire si l'entreprise refuse ? Son colocataire Tom Ignacio, intérimaire, sera « obligé de vivre chez des amis, le temps de trouver un logement pendant les Jeux ».

Certains salariés doivent quitter leur logement en juin pour y revenir en septembre. « C’est une porte ouverte à une précarité accumulée des locataires », souligne le sénateur Ian Brossat (PCF).

Bon nombre de propriétaires utilisent également ce bail pour contourner l'encadrement des loyers à Paris, en innocentant le logement comme la résidence secondaire du locataire ou en pratiquant une « location saisonnière bis », ce qui leur permet d'éviter les réglementations municipales, note David Rodrigues, responsable juridique de l'association CLCV (Consommation, logement et cadre de vie).

 

Vers une réglementation plus stricte ?

 

Le député Inaki Echaniz (PS) a déposé en mars une proposition de loi pour lutter contre les congés locatifs abusifs. Selon lui, ces pratiques restent trop souvent « impunies » et les locataires subissent encore trop de pressions « pour quitter les logements rapidement ».

« On crée des contrats dérogatoires au droit commun pour des publics ciblés, mais dès que le marché se tend, cela devient une forme de démantèlement de la protection du locataire si on ne met pas en place les moyens de contrôle nécessaires », analyse Sarah Coupechoux, chargée d'étude à la Fondation Abbé Pierre.

Le gouvernement souhaite cependant continuer à promouvoir ce bail, qui fait d’ailleurs partie d’une des mesures du projet de loi logement, discuté au Sénat à partir du 18 juin. Il prévoit notamment de l'étendre au logement social pour « faciliter le logement des apprentis ou des salariés en formation ou en scène ».

 

Marie Gérald

Photo de Une : AdobeStock

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