Matériaux de construction : la filière encore dans la tourmente
La morosité plane toujours au sein de l’Union nationale des industries de carrières et de matériaux de construction (Unicem).
« Les urgences s’accumulent sur le front social mais aussi économique et les secteurs de la filière construction, qui traversent une crise sans précèdent, sont en attente des mesures de soutien pour consolider les conditions d’un redressement », lit-on dans sa note de conjoncture de septembre.
La baisse des taux et la désinflation « constituent un terreau favorable mais à ce jour insuffisant pour endiguer l’ampleur du marasme dans le logement neuf », indique l’Unicem. « Si des points bas semblent désormais atteints du côté de la construction ou de la promotion, il convient à présent d’accompagner le redémarrage du cycle par des dispositifs efficaces et ambitieux à la hauteur des enjeux socio-économiques et de la récession de la filière BTP dont les secteurs amont et aval, à commencer par celui des matériaux de construction, en paient aujourd’hui le prix », poursuit l’union.
Ainsi, sur le troisième trimestre, l’indicateur matériaux progresse certes d’1,4 % par rapport aux trois mois précédents, mais décline de -5,8 % sur un an. Pour le troisième mois consécutif, la tendance reste haussière, après +0,9 % en août. Le volume du panier de matériaux des huit derniers mois recule de 7,2 % sur un an. Le rythme se révèle toutefois plus modéré que celui sur douze mois glissants (-9,7 %).
En glissement trimestriel, redressement dans l’activité BPE…
« Les tuiles et briques, le ciment et le BPE restent, sans surprise, les matériaux du panier les plus impactés par la crise de la construction résidentielle », souligne l’Unicem.
Côté béton prêt à l’emploi (BPE), les livraisons plongent après « deux mois de léger redressement ». Plus précisément de 6,1 % par rapport à août et de 12,2 % par rapport à l’an passé. Signe positif toutefois depuis deux ans : au T3 2024, les volumes produits se redressent d’1,5 % en glissement trimestriel. Les niveaux restent toutefois inférieurs de 10,4 % à ceux d’un an auparavant.
Cumulées sur les neuf premiers mois de l’année, les livraisons de BPE diminuent de 12,9 %, tandis que, sur douze mois, les volumes produits passent en dessous 34 millions de m3. « Un niveau historiquement bas, en cohérence avec les records enregistrés par les mises en chantier de logements », commente l’Unicem.
Si l’INSEE constate de meilleures perspectives chez les professionnels du bâtiment en octobre, l’activité ne s’arrange pas dans certains segments d’activité : « Dans le gros oeuvre, l’activité prévue continue de se dégrader, notamment dans le bâtiment neuf hors-logement, tandis que, du côté du logement, les perspectives sont un peu moins mauvaises », est-il écrit dans la conjoncture Unicem.
… comme celle des granulats
La production de granulats retrouve des couleurs également, avec +2,9 % entre le T2 2024 et le T3 2024. Elle se retire toutefois de 2,4 % en glissement annuel. À fin septembre, les volumes produits atteignent à peine 276 millions de tonnes (Mt), face aux 341 Mt enregistrés en moyenne sur les 20 dernières années (-20 %)
L’activité sur ce segment enregistre +4,1 % d’août à septembre et +3,1 % sur un an. Les travaux publics jouent beaucoup dans la balance, bien que selon la Fédération nationale des travaux publics (FNTP) les affaires ne sont pas au beau fixe en septembre. « Perturbés par une forte pluviométrie, les travaux ont reculé en septembre, freinant le cumul des facturations depuis janvier (+ 1,6 % contre + 2,1 % à fin août en volume, CVS-CJO) mais les carnets restent dynamiques (+ 8,3 %) », lit-on dans la note de conjoncture.
« À l’approche du scrutin des municipales en 2026, le secteur s’inquiète d’un retournement du cycle électoral précipité par les coupes budgétaires de l’État et autres mesures de réduction des dépenses qui « plomberaient » les investissements des collectivités locales », abonde l’Unicem.
À l’échelle des neufs premiers mois de 2024, l’activité granulats perd 5,1 % sur un an, contre -6,4 % en cumul sur douze mois glissants.
« Ces derniers jours, le vote négatif par l’Assemblée nationale du volet recettes du projet de Loi de finances s’est soldé par un rejet de l’ensemble du budget dont la version initiale sera donc transmise et débattue au Sénat. Dans ce contexte parlementaire très fragmenté, les enjeux politiques d’une réduction des déficits publics divisent les élus, tant sur les arbitrages des recettes que sur ceux des dépenses… », s’inquiète également l’Unicem.
Virginie Kroun
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