Photovoltaïque : la France devrait s’inspirer de ses voisins européens
La Commission de régulation de l’énergie (CRE) vient de publier les nouveaux montants de la prime à l’autoconsommation et des tarifs de vente du surplus pour les installations photovoltaïques raccordées entre le 1er août et le 31 octobre 2024. La prime à l’autoconsommation enregistre une baisse de 13 % (pour les installations ≤ 3 kWc) et de 17 % (pour les installations ≤ 9 kWc) par rapport au trimestre précédent.
Ces baisses vont à l’encontre du besoin des particuliers d’accéder à un photovoltaïque moins cher, souligne Hello Watt. Dans certains pays européens, des mesures financières incitatives ont au contraire contribué au développement du photovoltaïque résidentiel.
Le soleil n’est pas synonyme d’un bon état de forme pour le marché du photovoltaïque
Pour son étude, Hello Watt s’est attaché à comparer et expliquer les disparités de développement entre huit pays européens. Et le premier constat que l’on peut tirer de cette étude est que ce ne sont pas les pays les plus ensoleillés qui sont les mieux équipés en panneaux photovoltaïques.
En effet, parmi les huit pays étudiés, l’Espagne, la France et l’Italie sont les pays les plus ensoleillés de l’étude, mais sont également ceux qui tirent le moins profit de leur potentiel de toitures.
À titre de comparaison, les Pays-Bas dominent le classement, avec près d’un logement sur cinq équipé de panneaux photovoltaïques, suivi de la Belgique (16 % de logements équipés), de la Pologne (7,3 %), du Royaume-Uni - pays le moins ensoleillé des huit pays étudiés (4,3 %) - et de l’Allemagne (4,2 %) fin 2022. La France ne compte quant à elle que 1,6 % de logements équipés, soit environ 600 000 foyers à la même période.
Des prix de l’électricité bas et des installations coûteuses
Comment expliquer de telles disparités ? Dans un premier temps, il ressort de l’étude que le prix de l’électricité influence l’essor du photovoltaïque. En Espagne et en France, pays étudiés les moins équipés en photovoltaïque, le prix du kWh d’électricité est inférieur à 21 centimes d’euro au 1er janvier 2023. Des prix bas qui n’incitent pas les particuliers à produire leur propre électricité.
À l’inverse, dans tous les autres pays étudiés, le prix du kWh dépassait 47 centimes d’euro au 1er janvier 2023. Un facteur qui entraîne le plus souvent le développement d’un marché photovoltaïque national d’envergure.
En plus du prix de l’électricité, le prix des installations résidentielles ont également un impact direct sur la croissance du marché, et réciproquement. En 2024, les marchés les plus développés proposent les installations les plus abordables pour les particuliers, ce qui favorise l’adoption des panneaux sur les toitures.
Si les particuliers sont de plus en plus nombreux à équiper leur logement de panneaux photovoltaïques, ils sont logiquement mieux informés sur les prix. Cela réduit ainsi le risque d’abus et contribue à la baisse du prix moyen. Un cercle vertueux en somme, puisque les prix bas développent le marché, et un marché développé tire les prix vers le bas.
Les Pays-Bas et la Belgique, où le photovoltaïque résidentiel est le plus développé, proposent aujourd’hui les installations les moins chères du marché. En France, les prix très élevés de certains installateurs tirent la moyenne des prix vers le haut, et le coût moyen d’une installation de 6 kWc (environ 15 panneaux) s’élève à 15 500 € en 2024, soit près du double des prix observés aux Pays-Bas et en Belgique.
Des prix tirés vers le haut et des réglementations contraignantes
Un cercle vicieux pour le marché français. Si ce dernier peine à se développer pour les raisons précédemment soulevées, les particuliers ont de facto davantage de difficultés à s’informer sur les prix du solaire. Une situation dont peuvent profiter certains installateurs pour pratiquer des prix bien trop élevés. Ces prix sont perpétuellement tirés vers le haut, ce qui freine le développement du marché hexagonal.
Autre frein au développement du photovoltaïque : les réglementations françaises. Ces dernières sont souvent bien trop contraignantes. À titre d’exemple, la TVA sur les installations supérieures à 3 kWc est à 20 % en France, tandis qu’elle est réduite, voire nulle dans les autres pays. Notre pays pâtit également de démarches administratives longues et complexes qui ajoutent un surcoût aux projets solaires.
10 mesures pour combler notre retard
Pour tenter d’inverser la tendance, Hello Watt propose 10 mesures pour accélérer le développement du photovoltaïque résidentiel en France.
Six d’entre elles sont inspirées de ce qui se fait chez nos voisins européens et des aides à la rénovation énergétique pour baisser le prix pour les consommateurs. Les voici :
- Abaisser la TVA à 5,5 % et l’uniformiser pour toutes les puissances ;
- Cibler les aides sur les ménages moins aisés, à l’image de MaPrimeRénov’, et permettre aux installateurs de déduire du devis la prime à l’autoconsommation plutôt que de la verser un an après les travaux ;
- Mettre en place des aides pour l’accès aux batteries et aux outils de suivi de la production solaire permettant d’augmenter le taux d’autoconsommation ;
- Étendre l’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) au solaire photovoltaïque ;
- Simplifier les démarches administratives, particulièrement complexes en France et sans équivalent en Europe, en supprimant la déclaration préalable de travaux ;
- Faire évoluer le système d’obligation d’achat qui ralentit considérablement les projets des particuliers, et le rendre indépendant d’EDF ;
Les quatres autres mesures proposées visent à protéger les consommateurs et éviter des prix trop élevés, qui nuisent au développement du marché. Hello Watt souhaite notamment :
- Interdire la vente en porte-à-porte ;
- Étendre le délai légal de rétraction à la vente en salons et en foire ;
- Interdire les crédits pour les montants d’installations solaire trop élevés ;
- Sanctionner les pratiques frauduleuses de récupération de TVA.
Jérémy Leduc
Photo de une : Adobe Stock