Remaniement ministériel : Jacques Mézard quitte le Gouvernement
Jusqu’à présent « ministre auprès du ministre de l’intérieur », elle est la « Madame des Collectivités locales ». Son objectif ? « Faire de la pédagogie » et éviter que le fossé d’incompréhension ne se creuse entre les élus du terrain et l’exécutif.
Un bilan en demi-teinte
Jacques Mézard quitte aujourd'hui un ministère où il n'a pas toujours été « heureux ». Il avait notamment déclaré « On n'est pas au gouvernement pour être heureux, mais pour travailler. Tant que le président me fait confiance, je n'ai pas de raison de bouger contrairement à ce qui se dit ! ».Rappelons que Jacques Mézard n’a pas été épargné pendant ses 16 mois de mandat à la tête du ministère. Dès juillet 2017, suite à l’annonce de la baisse des APL, il fait face à la colère des bailleurs sociaux. Il se fera même huer quelques mois plus tard, à Strasbourg, lors du Congrès HLM.
Bien qu’investi dans le plan Action cœur de Ville, lancé en mars 2018, maires et élus lui ont souvent reproché un « désintérêt » pour les banlieues et la politique de la ville.
Autre dossier majeur, le projet de loi Elan. On se souvient notamment de la mobilisation des architectes qui dénonçaient des mesures « contre-productives » et le manque d’ambition du texte. Ou encore, celle de l’association DAL (Droit au Logement) qui pointait un texte « anti-pauvres ». Sans oublier l'inquiétude des bailleurs sociaux qui vont devoir se réinventer et penser de nouveaux financements.
Regagner la confiance des élus
Jacqueline Gourault arrive ainsi à la tête d’un « grand ministère » qui devra non seulement poursuivre les réformes mais aussi et surtout regagner la confiance des élus qui accusent les conséquences de la baisse des dotations. Des élus qui se retrouvent aujourd’hui au cœur d’une nouvelle polémique, la hausse de la taxe d’habitation. Un dossier épineux qui se veut être une priorité. En effet, à l’horizon 2022, cette sera définitivement supprimée. L’heure est ainsi au dialogue.Ce dialogue, Jacqueline Gourault devrait pouvoir le mener aisément. Réputée pour sa bonhomie et un certain franc-parler, elle a toujours été présentée comme « le couteau suisse du ministère de l’Intérieur ». Fidèle de François Bayrou, mais d’une loyauté absolue envers Emmanuel Macron et Edouard Philippe, elle s’est très vite imposée au sein du gouvernement, se rendant même « indispensable ».
Elle sera épaulée par Sébastien Lecornu, auparavant secrétaire d’Etat auprès du ministre de la transition écologique et solidaire, qui sera chargé des relations avec les collectivités territoriales, et Julien Denormandie, qui passe de secrétaire d’Etat auprès du ministre de la cohésion des territoires à ministre chargé de la ville et du logement.
Jacques Mézard fier de ce qui a été accompli
Lors de la passation de pouvoirs, Jacques Mézard s'est dit fier « de ce que nous avons accompli, en peu de temps, sur tant de chantiers décisifs pour l’avenir de notre pays ». S’adressant à Jacqueline Gourault, Sébastien Lecornu et Julien Denormandie, il a déclaré « Vous serez trois ministres en charge du Ministère de la Cohésion des territoires. C’est bien. Avec un périmètre élargi aux collectivités locale, ce que j’avais préconise au Président de la République ».« Nous avons conduit notre action dans un contexte budgétaire très difficile. Oui, ce ministère aura été celui qui aura contribué le plus, avec le ministère du travail, aux efforts d’économies. Cela n’a pas été simple, mais qui peut nier que des efforts sont nécessaires ? En tous cas, nous les avons assumés ensemble, avec loyauté ».
« De ce jour, je reprends cette liberté qu’en fait, je n’ai jamais abandonnée parce qu’elle est consubstantielle à ce que doit être un homme politique. Parce que la loyauté, ce n’est pas le silence mais le dialogue. Parce qu’être ministre, ce ne peut être l’exécution des directives d’une haute administration compétente et intelligente mais celui qui fixe les objectifs à son administration ».
« Madame la Ministre, je vous transmets les clefs d’un Ministère dont les grandes réformes, sur tous les sujets, sont sur les rails. Les politiques publiques qu’il porte ont connu je le crois des impulsions fortes, nous nous y sommes attelés sans relâche, quelles que soient les nécessités budgétaires », a-t-il conclu.
La profession réagit
Dans un communiqué, la FFB se félicite « du double message que porte la nomination du nouveau gouvernement Philippe pour le secteur du bâtiment ».La nomination de Julien Denormandie comme chargé de la Ville et du Logement est positive : « Il a porté, en lien avec Jacques Mézard, le projet de loi Elan et connapit donc bien le secteur. Cette continuité va dans le bon sens, alors que le décrochage du logement neuf se fait ressentir depuis le début 2018. L'enjeu est fort ».
Le maintien du champ du logement élargi aux relations avec les collectivités territoriales et piloté par Jacqueline Gourault « illustre l'importance du logement et des métiers qui en découlent dans ce qui constitue une priorité d'avenir ».
Pour Jacques Chanut, Président de la FFB, « Jacques Mézard, par son implication auprès du secteur et son attention aux besoins de nos concitoyens sur tout le territoire, a souvent permis d’éviter le pire. Je souhaite rencontrer au plus vite Jacqueline Gourault, afin d’évoquer les moyens de sortir de la nouvelle crise du logement qui se dessine hors métropoles. »
De même, la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) « se réjouit de pouvoir poursuivre le travail » avec M. Denormandie et salue l'élargissement du périmètre de l'ensemble du ministère de la Cohésion des territoires. « Ce nouveau ministère pourrait créer les conditions d'un meilleur dialogue entre les collectivités locales et les maîtres d'ouvrage, et libérer ainsi la construction », espère-t-elle.
De son côté, Jean-Louis Dumont, président de l'Union Sociale pour l'Habitat (USH), a salué : « Nous avons désormais un ministre de la Ville et du Logement de plein exercice ».
Françoise Nyssen remplacé par Franck Riester Le gouvernement a également annoncé la nomination de Franck Riester, député Agir et ex-LR, à la tête de du ministère de la Culture. Il remplace Françoise Nyssen en poste depuis le mois de mai 2017. Manque de vision et de charisme, difficultés d’expression à l’oral… Françoise Nyssen a parfois eu du mal à s’imposer. Le projet de loi Elan aura également eu raison de l’image de la ministre, les architectes ayant vivement dénoncé la suppression de l’obligation de concours pour les bailleurs sociaux. Elle est également visée par une enquête judiciaire. La justice examine la régularité de travaux d’agrandissement réalisés au sein d’Actes Sud, maison d’éditions qu’elle dirigeait avant d’être ministre. Ces travaux sont venus modifier un immeuble classé et auraient du faire l’objet d’une autorisation délivrée par les Bâtiments de France et de l’architecte en chef des Monuments historiques. Ce qui n’a pas été le cas, selon le Canard enchaîné. Un fait quelque peu incohérent alors même que le ministère de la Culture est censé défendre le patrimoine immobilier national. |
R.C (avec AFP)
Photo de une : Compte Twitter @MezardJacques