Les incendies et explosions restent en tête des sinistres les plus coûteux
Fin 2021, AGCS, entité d’Allianz spécialisée en assurance des grands risques industriels, passait en revue dans son Baromètre des risques les 30 000 sinistres qu’elle a indemnisés entre 2016 et 2020, pour un total de 11 milliards d’euros.
Dans son nouveau baromètre, diffusé ce mardi 11 avril, ce sont 22 705 réclamations d’assurances entre le 1er janvier 2017 et le 31 décembre 2021, pour 12,8 milliards d'euros, qui ont été analysés.
« Les valeurs à risque ont augmenté. Les coûts de construction s’envolent, face à la hausse des prix de l’énergie et des matières premières. Les remplacements sont plus chers et prennent plus de temps. Les matériaux peuvent aussi être indisponibles, en raison de problèmes de logistique, de transport et de chaîne d’approvisionnement. Les dommages matériels et les interruptions d’activité risquent donc d’être nettement plus coûteux qu’avant la crise du Covid », développe Blanca Berruguete, directrice mondiale des solutions sectorielles pour la construction chez AGCS.
L’interruption de l’activité et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement en tête des risques 2023
À tel point que les professionnels du génie civil et de la construction considèrent les interruptions d’activité et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement, comme premier risque de sinistre en volume du secteur en 2023, cité par 39 % de 161 répondants. Et ce devant les catastrophes naturelles (34 %, 2ème place), la diminution de la main d’oeuvre qualifiée (23 %, 4ème) et la conjoncture macroéconomique - entre l’inflation et les programmes d’austérité à l’échelle mondiale - (20 %).
« Les matériaux sont non seulement beaucoup plus chers - le coût du ciment, du bois, de l'acier, du verre et de la peinture a augmenté au cours de l'année dernière, dans certains cas d'environ 50 %, alors que l'inflation dans le secteur de la construction était de l'ordre de 11 à 25 % dans des pays comme les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Allemagne - mais ils peuvent souvent être tout simplement indisponibles en raison de goulets d'étranglement au niveau de la logistique, du transport et de la chaîne d'approvisionnement », lit-on dans le baromètre (en anglais).
Autre facteur à risque entrant dans le classement en 2023 : la crise énergétique, marquée par tensions d’approvisionnement et des prix sur fond de guerre en Ukraine. Évoquée par 24 % des interrogés, elle arrive à la troisième place. Mais à moyen et long terme, AGCS y voit un catalyseur de la transition écologique et l’adoption d’approches plus durables, en cohésion avec une construction bas carbone.
La crise énergétique, un vivier d’activité… mais aussi des défauts de production
« La transition vers une énergie durable et l’adoption de méthodes de construction modernes transformeront le paysage des risques, avec des changements radicaux dans la conception, les matériaux et les processus de construction (…) Pour atteindre les objectifs de décarbonation, une évolution rapide sera probablement nécessaire. Elle supposera une coopération étroite entre assureurs, courtiers et clients pour partager les données et les expériences permettant de souscrire des risques qui pourraient être inédits », indique notamment Blanca Berruguete.
Certes, le déploiement des énergies renouvelables (solaire, éolienne…), d’infrastructures de transports électriques (bornes de recharge…) ou de défenses contre les tempêtes et inondations sont un plus pour le secteur. Cela peut toutefois entrainer des risques de défauts des production, sachant que les produits défectueux sont la troisième cause de sinistre la plus coûteuse (10 %) et la deuxième plus fréquente (13 % en nombre).
« Par exemple, la construction modulaire permet de réduire les déchets de construction, de raccourcir les délais et de moins perturber l'environnement. Cependant, elle soulève également des inquiétudes quant aux scénarios de pertes répétitives », expose AGCS dans son baromètre.
Sans compter les défauts de fabrication et d’entretien (8 %) et les pannes de machines (7 %), qui occupent respectivement la quatrième et la cinquième place des causes de sinistres en valeur.
27 % de la valeur des sinistres proviennent des incendies et explosions
Mais la première place des sinistres les plus coûteux revient - comme au précédent baromètre - aux incendies et explosions, concentrant 27 % de la valeur sur les cinq dernières années.
« Malgré des améliorations significatives dans la gestion des risques et la prévention des incendies, le feu restera toujours un danger important en raison de la nature du travail dans le secteur, qui implique souvent des flammes nues, comme le soudage, l'application de chaleur avec des équipements tels que les chaudières à goudron chaud ou la production d'étincelles pendant le travail du plomb et le meulage. L'exécution de ces activités à proximité de matériaux combustibles, qui sont nombreux sur les chantiers de construction, ne fait qu'accroître le risque de sinistre », relève-t-on dans le baromètre AGCS. L’entité d’Allianz recommande l’évaluation et la mise à jour régulières des pratiques prudentes d'atténuation des incendies (prévention, extinction, plans d'urgence…).
En deuxième place nous trouvons les catastrophes naturelles, avec 19 % des coûts. Elles sont la cause des sinistres la plus fréquente (18 %). « L’évaluation des risques sur les chantiers doit prendre davantage en compte l’impact des événements extrêmes, tels que les feux de forêt, les crues soudaines et les glissements de terrain. Le changement climatique accroît la fréquence et la gravité de ces événements. Les coûts des dommages matériels et des interruptions d’activité pourraient donc augmenter rapidement », en conclut AGCS.
Virginie Kroun
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