« Les bâtiments de demain seront autant producteurs que consommateurs d'énergie » (Eaton)
En définissant cinq point clés « à surveiller » pour le secteur du bâtiment en 2022, Laëtitia Tran-Rodeghiero, building manager chez Eaton Electrical France, voit une « opportunité » de fournir un environnement urbain correspondant aux besoins futurs. Sans efforts, elle prévient qu'« il faudra plusieurs années au secteur pour répondre pleinement aux besoins et à l’évolution des modes de vie ».
Une seconde vie pour les bâtiments ?
Pour Laëtitia Tran-Rodeghiero et pour la plupart des acteurs du secteur, une chose est certaine : la fréquentation des bureaux ne sera plus jamais la même. En effet, de nombreuses entreprises ont officialisé le télétravail plusieurs jours par semaine, la conséquence étant qu’une partie de leurs locaux ne sont plus utilisés à 100 %.
Une question se pose alors : comment utiliser la surface non-occupée par des employés et comment optimiser la rentabilité de cette surface non-utilisée ? « Il faut accompagner les propriétaires et gestionnaires de bâtiments pour garantir la sécurité des personnes et des biens malgré ces transformations, et pour intégrer la transition énergétique que nous vivons actuellement dans cette transformation ».
Parallèlement, elle souligne que les entreprises devront faire de « réels efforts » pour relever les défis de la réaffectation des bâtiments, qui constituent selon elle « des opportunités importantes » pour répondre à l’évolution des besoins immobiliers.
Approfondir la gestion de l’énergie et la digitalisation du secteur
Ces évolutions observées surviennent alors que des changements avaient déjà été opérés dans l'optique de répondre à la « pression » réglementaire et sociale pour une plus grande efficacité énergétique. La building manager d’Eaton estime qu’il faudrait trouver de meilleures approches, notamment en termes de conception, de modernisation et systèmes de gestion de l’énergie des bâtiments pour répondre au besoin d’électrification.
« Les bâtiments de demain seront autant producteurs que consommateurs d'énergie. Mais pour leur permettre d’être producteurs d’énergie, il faudra les concevoir ou les moderniser en prévoyant des flux bidirectionnels entre eux et leurs utilisateurs, par exemple en chargeant les véhicules électriques aux heures de faible demande », souligne t-elle. Dans un autre temps, elle explique qu’il sera nécessaire d’équiper les bâtiments de systèmes de gestion de l’énergie « intelligents », permettant ainsi par exemple de détecter les moments où il est le plus opportun de consommer.
Toujours dans ce processus de changement de paradigme, Laëtitia Tran-Rodeghiero soutient l’idée que les technologies et les approches dites « traditionnelles » ne suffisent plus aujourd’hui, et que la digitalisation du secteur doit être perçue comme « catalyseur ». Elle précise : « L’objectif premier sera d’assurer l’autonomie des bâtiments et de leur permettre ensuite de réinjecter l’énergie qu’ils auront produite ». Laëtitia Tran-Rodeghiero note toutefois que ce concept concerne à ce stade les sites importants (stades, gares, aéroports, etc) car il est nécessaire d’avoir une capacité de réinjection de plusieurs mégawatts.
Par ailleurs, elle indique qu’il est « indispensable » d’identifier le profil de risque de cybersécurité des bâtiments. Pour elle, « la sécurité doit être redéfinie » et « ces éléments doivent être considérés comme faisant partie d’un système global et non comme des questions distinctes pouvant être traitées de manière isolée ».
Intensifier la connexion avec les autres secteurs d’activités
« De nombreux facteurs tels que les préoccupations sur le climat ou bien la pression du public pour répondre à des besoins changeants vont impacter les évolutions de ce secteur », explique Laëtitia Tran-Rodeghiero Elle évoque ainsi la nécessité d’impliquer « un ensemble de larges parties prenantes » confrontées, elles aussi, à leurs propres défis de transformation. L’objectif ? Intensifier les connexions entres les différentes industries.
Laëtitia Tran-Rodeghiero parle alors de « couplage sectoriel », c’est-à-dire l’électrification des transports et des bâtiments tertiaires et industriels. Par exemple, un bâtiment produisant de l’énergie le dimanche, mais n’en consommant pas ce jour-là, peut réinjecter cette énergie non consommée dans les services d’une ville (transport électriques). « Ce système permettrait d’accélérer et soutenir la décarbonation du secteur, grâce à un réseau plus résilient, à une production décentralisée et à une utilisation intelligente de l’énergie qui s’adapte à l’offre », conclut-elle.
Propos recueillis par Marie Gérald
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