Le mal-logement concerne 1,2 million de franciliens
L’Ile-de-France est particulièrement touchée par le mal-logement. Dans un nouveau rapport, la Fondation Abbé Pierre pointe en effet les difficultés à se loger dans « la région la plus riche de France ».
« La région concentre 33% des habitants en bidonvilles, près de 34% des demandes d’HLM, 41% des expulsions locatives effectives, 64% des recours DAHO et 59% des recours DALO, 61% des ménages en Priorités Urgentes DALO restant à reloger, 63% des situations de surpeuplement accentuée », liste ainsi la fondation.
L’Ile-de-France, qui représente 18,2% de la population nationale, est celle qui affiche les plus fortes disparités : la proportion de ménages pauvres y a augmenté deux fois plus vite que dans le reste du territoire entre 2004 et 2012. Et si les franciliens gagnent 26% de plus que les autres Français (le revenu moyen des ménages atteignant 4 117 euros par mois), les loyers sont 56% plus chers dans la région.
Des bas revenus qui impactent l’accès au logement
« L’évolution des prix de l’immobilier déconnectés des ressources de nombreux franciliens, à la location comme à l’acquisition, constitue une des explications majeures de la crise du logement en Ile-de-France », souligne la fondation Abbé Pierre.
Elle poursuit : « En quarante ans, alors que les revenus ont été multipliés par 7,2, les prix d’achat l’ont été par 13,9 et les prix à la location par 10,1 ». Les employés et ouvriers sont les plus impactés par cette tendance : s’ils représentaient 27% du marché de l’acquisition de logements anciens en 1998, cette proportion est descendue à 19%.
Et pour ce qui est de la location de logements, les ménages pauvres du parc privé ont multiplié par deux la part de leurs ressources consacrés au logement : 40,8% en 2013 contre 20,1% en 1998.
Accélérer la production de logements
La Fondation Abbé Pierre estime que le mal-logement se doit également à un rythme de production de logements « encore insuffisant ». « Pour accueillir de nouveaux ménages tout en garantissant la qualité de leur résidence, pour rattraper le déficit accumulé et pour compenser le parc de logements qui disparaît chaque année, au début des années 2010, les besoins annuels de construction ont été estimés à 70 000 logements par an par le schéma directeur de la région Ile-de-France (SDRIF) et la loi du Grand Paris », souligne-t-elle.
Malgré une année 2018 dynamique avec 81 000 logements construit en Ile-de-France, l’évolution « ne présage en rien l’atteinte d’une moyenne de 70 000 logements par an jusqu’en 2030 compte tenu du retard déjà pris depuis l’estimation des besoins », les chiffres faisant état de 66 000 logements commencés par an entre 2014 et 2017, et 55 400 logements entre 2010 et 2013.
« Entre 2019 et 2030, il resterait à construire 935 100 logements soit près de 78 000 logements par an pour les douze prochaines années », poursuit la fondation.
Elle dénonce également l’incertitude planant sur le financement du logement social (baisse des aides directes de l’Etat et de la Région prélèvement sans précédent sur les bailleurs sociaux…). Elle précise : alors que le Schéma Régional de l’Habitat et de l’Hébergement (SRHH) a validé, fin 2016, un objectif de production de 37 000 logements sociaux par an, la moyenne annuelle depuis 2012 est de 30 500 agréments.
Concernant les mises en service de logement social, elles s’élevaient à 18 450 logements en 2013… contre seulement 15 900 unités en 2015 !
Sur les 4 millions de personnes mal logées que compte le territoire, « 1,2 million vivent dans la région la plus riche de France », résume la fondation. « Les efforts et les ambitions » pour répondre à cette problématique « restent insuffisants et l’avenir d’un logement digne pour tous semble encore bien incertain, notamment pour les franciliens modestes », conclut-elle.
R.C
Photo de une : ©Adobe Stock