Label RGE : à quand « des avancées sincères » ?
Les financements de la rénovation énergétique n’étaient pas l'unique levier de massification discuté lors des rencontres de la CAPEB, ce mercredi 24 mai.
Camille Galtier, maire de Manosque - où sont menés différents projets de rénovation urbaine -, évoque un manque d’artisans, et encore plus sur les territoires ruraux. « Ma ville c’est 25 000 habitants, néanmoins on reste dans un territoire rural. On n’a pas 100 artisans sur 10 km2 », déplore-t-il.
Un constat nuancé par David Morales, vice-président en charge des affaires économiques de la CAPEB. « Des artisans, il y en a, on est nombreux, on maille le territoire. Si on veut faire de la rénovation, vous pouvez en trouver partout. Mais trouver des artisans RGE, c’est peut-être un petit peu plus difficile ». Il ajoute : « On aime de moins en moins ça le "RGE". C’est tellement compliqué ! (…) On a envie de participer, on a envie d’être là, mais il faut trouver une solution pour que ce soit plus facile pour nous », rappelle-t-il.
16 % des entreprises du bâtiment qualifiées RGE
« On a relevé que 16 % des entreprises uniquement étaient qualifiées RGE, alors qu'on sait que ce label est décisif pour obtenir une aide MaPrimeRénov’. Le coeur du problème est aussi sur l’accompagnement, notamment du financement. Parce que les ménages ont un reste à charge. Je rappelle que la dotation de l’État c’est 4 milliards d’euros par an en termes de budget, pour soutenir la rénovation. On a 70 milliards de travaux, rien que pour les F et G », complète de son côté Loïc Cantin, président de la FNAIM.
« Bruno Le Maire a dit, au mois de novembre 2022, qu’il fallait multiplier par 4 les entreprises qualifiées RGE. Cette qualification, il faut la revoir, il faut la booster, mais il faut donner des signes positifs d’accompagnement, parce que beaucoup d’artisans réfutent ce dispositif de qualification, qui est lourd, coûteux, et qui faut renouveler de façon régulière. Donc ce dispositif, à mon avis, n’est pas la panacée pour accompagner la rénovation énergétique. Il y a de bons artisans qui ne sont pas qualifiés RGE, c’est pas un critère essentiel », abonde l’intéressé.
Mais pour David Morales, l’objectif c’est surtout « de faciliter tout ça, on a des propositions, on en a fait à la Première ministre », résume le vice-président en charge des affaires économiques de la CAPEB.
Des propositions réitérées par le président de la confédération auprès du ministre du Logement Olivier Klein lors des rencontres de la CAPEB.
Certes, en termes de transition énergétique des bâtiments, les artisans sont formés « et on est dans les règles de l’art. Maintenant il faut nous inciter à aller sur le marché. Et là c’est une autre démarche qui doit éviter la contrainte, donc comment on facilite le quotidien en entreprise pour accéder à ce marché-là ? », s'interroge Jean-Christophe Repon.
Vers un Conseil de la rénovation énergétique ?
Une vision qu’Olivier Klein semble soutenir, en particulier « si on veut aller vers des rénovations plus globales, plus performantes. L’idée qu’à un moment l’artisan soit capable d’embrasser tous les besoins d’un chantier, qu’on puisse avoir des réponses groupées entre différents artisans, différents métiers et qu’on ait pas une solde de pièces administratives à demander, ça ça doit être continué à être fait, pour qu’un dossier puisse être tout à la fois bien constitué et simple. Si on veut qualifier les chantiers il faut avoir des contrôles de qualité et faire en sorte que le contrôle ait lieu, si nécessaire, au bon moment », expose notamment le ministre du Logement.
Malgré ces bonnes intentions, le président de la CAPEB réclame « des avancées sincères » sur la simplification et la fiabilité. « On voit bien que l’expérimentation lancée sur l’audit chantier n’est pas satisfaisante, puisqu’elle est plus contraignante », clame l’intéressé. Et surtout, le modèle « n’a pas évité la fraude ».
« C’est pour ça aussi que dans l’objectif de massifier, de rénover en nombre, il faut qu’il y ait un Conseil de la rénovation énergétique, une capacité d’avoir un lieu d’écoute et d’arbitrage, pour la mise en application de ces changements. Parce qu’actuellement on voit bien qu’on partage une vision, mais on ne voit pas de modification. Et les artisans sont pragmatiques, ils ont la vision du bon sens et ont besoin d’avoir quelques signes forts assez rapidement sur ces points-là », évoque Jean-Christophe Repon au ministre.
Ce à quoi, Olivier Klein, qui croit « beaucoup » à la qualification « Chantier par chantier » répond : « Méfions nous du rajout de contrôle supplémentaires. Soyons pragmatiques aussi ensemble pour trouver la bonne réponse ». Selon le ministre, il convient d’ « éviter la paperasse et être efficace ».« On peut pas déconstruire et puis il y a quelques entreprises qui sont dans cette démarche-là », rassure Jean-Christophe Repon. « Mais pour ceux qui veulent y aller ponctuellement, il ne faut pas leur interdire juste à cause de la complexité », nuance-t-il. Et cela ne se joue « sur le contrôle supplémentaire mais sur la conformité, afin d’éviter notamment les écarts de résultats et puis surtout la fraude ».
Le ministre a reconnu que les fraudes au label RGE ont ralenti beaucoup de dossier MaPrimeRénov’. « Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain. C’est 1,5 million de chantiers et c’est quelques milliers de dossiers qui ont pris du retard à cause de fraudes. On a écoulé une grande partie des stocks et l’Anah s’en donne les moyens », affirme-t-il.
Pas d’avancées fortes donc sur la simplification du RGE. Peut-être que de prochaines Assises du BTP permettront de dessiner des solutions concrètes. Souhait que Jean-Christophe Repon nous a confié à l'occasion des rencontres de la CAPEB.
Virginie Kroun
Photo de Une : A.A