La formation des artisans du BTP « répond à des enjeux et à une stratégie »
Batiweb : L'éco-construction est une révolution culturelle dans le milieu du bâtiment, les entreprises doivent se former très rapidement pour répondre aux enjeux du Grenelle de l'environnement. Que propose Socotec dans ce domaine ?
Jean-François Gayot : Nous avons développé plusieurs formations dédiées à ce que l’on appelle les « métiers verts ». Nous avons monté fin 2008 avec un démarrage début 2009 une formation appelée « chargé d’étude énergie et développement durable » dans la logique de donner aux professionnels du bâtiment, principalement à des personnes qui ont un niveau bac +2 avec des connaissances des règles thermiques, tous les éléments qui permettent d’envisager un projet d’amélioration énergétique et d’intégrer toutes les énergies de substitutions que sont l’énergie solaire, le photovoltaïque ou la biomasse. Cette formation, qui dure 16 jours, permet de donner au stagiaire une vision de 360° de la problématique, y compris de la filière économico-financière : quels sont les financements, quel est le retour sur investissement etc… A la fin de la formation, on délivre au stagiaire un certificat Socotec. Et nous sommes en train de monter un dossier pour que l’on délivre un titre RNSCP (Répertoire national des certifications professionnelles ndlr).
Cette nouvelle approche ne vise pas uniquement de nouveaux métiers mais correspond à la demande du maître d'ouvrage de faire réaliser un ensemble de travaux d'amélioration énergétique par une ou plusieurs entreprises ?
Il faut une approche plus pragmatique. Si l’on veut construire les choses dans une logique viable, il faut d’abord se pencher sur le diagnostic. Pas un DPE, ce n’est pas suffisant, il faut un diagnostic précis qui prévoit un programme d’amélioration et qu’en fonction de chaque disposition, des coûts soient envisagés et que des plans sur retour d’investissement soient édités. Et à partir de là, nous pourrons raisonner plus globalement. Par exemple, nous avons travaillé avec un grand partenaire qui est une collectivité territoriale, le département du Nord. Elle avait un objectif de départ et des questions : en finançant des bâtiments dans la logique du développement durable, comment peut-on aider les entreprises pour qu’elles nous donnent des réponses conformes à ce que l’on attend ? Comment peut-on à l’issue de la construction mener un audit pour savoir si ce qui a été livré est bien conforme à ce que nous avons acheté ?
La période actuelle est difficile pour les petites entreprises qui ont entrepris une démarche d’évolution des compétences des salariés pour répondre aux nouveaux marchés et à la transition vers la construction durable ?
Les professionnels doivent être motivés pour se former, mais il va aussi falloir les y obliger. Cela a toujours été très difficile de faire venir l’artisan en formation. Il n’en éprouve pas vraiment le besoin. Pour l’artisanat, capter ce marché de la rénovation est sans aucun doute indispensable, mais à condition de s’organiser. La FFB et la Capeb essaient de faire en sorte qu’ils soient dans la capacité de répondre à cette demande. De son côté, Socotec offrira un certain nombre de formations. Mais comme nous sommes dans une logique de changement, il faut aussi que les artisans changent d’objectifs et trouvent d’autres enjeux. Aujourd’hui, les entreprises plus importantes s’organisent, elles ont bien compris que le fait d’introduire dans des projets de construction des éléments du développement durable devenaient un argument commercial. Et c’est en train de changer, ces entreprises passent à l’acte.
Il y a un programme qui s’appelle Energie Bat sur lequel j’ai travaillé. La difficulté de ce programme, est qu’il a été conçu par des gens qui ont chacun une vision différente sur le sujet. Aujourd’hui la problématique de l’artisan, est qu’il est souvent « mono-activité » L’électricien fait de l’électricité et il ne fait pas d’isolation thermique. On se rend compte que, notamment pour l’existant, si l’on veut pouvoir apporter des solutions pertinentes et performantes, il faut avoir une vision sur plusieurs corps d’état. La formation est soit un outil, soit une conséquence à un moment donné.
Il faut former 120 000 professionnels à la rénovation énergétique d’ici à 2012 estime le gouvernement. Un chiffre adéquate selon vous ?
Il faut d’abord se poser une question : former à quoi ? Dans tout les cas de figure, la formation est un outil qui répond à des enjeux et à une stratégie. Nous proposons nous des formations pour répondre aux enjeux de l’économie d’énergie. Nous montons une formation sur la conformité des panneaux solaires par exemple. Car nous nous sommes rendus compte que les professionnels concernés sont des couvreurs qui n’ont pas forcément les compétences de l’électricien, au niveau de l’onduleur par exemple. Mais là, nous sommes sur une conséquence. Les formations adéquates sont en train de se créer.
Propos recueillis par Bruno Poulard
Pour en savoir plus : Espace formation Socotec