« L’emploi des femmes dans le BTP va forcément augmenter », d’après Susana Mendes, secrétaire générale d’Yprema
Quel a été votre parcours avant Yprema ?
Susana Mendes : Après l’obtention d’un BAC A5 (littéraire et langues vivantes), j’ai commencé des études supérieures à la Sorbonne, avant de me réorienter vers un BTS Secrétaire de rédaction en 1984. Ce cursus était davantage en cohérence avec ma volonté de me lancer dans le monde du travail rapidement. J’ai été diplômée en 1986, et j’ai décroché mon premier job à 21 ans dans une PME du BTP spécialisée dans la construction de gymnases à ossature bois et de parcs aquatiques. J’y suis restée 8 ans avant d’intégrer Yprema.
En quoi consiste l'activité de l’entreprise ?
S. M : Yprema est une PME qui dispose de 9 sites, dont 7 en Île-de-France, sur lesquels elle réceptionne les bétons de déconstruction, les déconstructions de voirie et les terres inertes. Ces matériaux sont, suivant un process bien défini, transformés en matériaux routiers (granulats) et vendus directement sur place aux entreprises de Travaux publics.
Comment avez-vous réussi à vous imposer dans un secteur traditionnellement réservé aux hommes ?
S. M : J’ai intégré Yprema en 1994. Cette société ne comptait alors que 25 salariés et 2 sites de production. Nous avons un dirigeant « visionnaire » qui sent les évolutions et sait les anticiper, et la politique sociale est très importante au sein de l’entreprise. J’ai donc pu évoluer en même temps que la structure s’est développée, grâce à la promotion interne et à la formation interne et formation continue.
Je suis secrétaire générale depuis 2013. Auparavant, j’étais DRH. Mon ancien poste, mon appartenance au comité de direction, mon ancienneté qui me procure une véritable connaissance de l’histoire et de l’organisation d’Yprema, et le fait que j’ai participé au recrutement de la quasi-totalité de nos salariés, m’ont facilité les choses.
Par ailleurs, pour être acceptée, il faut être à l’écoute des besoins et des attentes des collaborateurs, tout en prenant en compte les impératifs de l’entreprise et en sachant qu’on ne pourra jamais faire l’unanimité.
Enfin, dans un milieu majoritairement masculin comme le BTP, les relations entre hommes et femmes sont plus apaisées.
Quelles ont été les difficultés auxquelles vous avez été confrontée, voire auxquelles vous faites face encore aujourd’hui ?
S. M : À chaque fois qu’on évolue et que l’on prend un nouveau poste, il faut un temps d’adaptation pour prendre en main la fonction et adapter son organisation, mais ce qui est, selon moi, le plus difficile, c’est de bien manager ses collaborateurs, d’adapter son mode de management à chaque personnalité. En matière de gestion des ressources humaines, j’ai eu aussi à gérer parfois des personnalités difficiles, qu’on ne peut pas détecter lors d’un entretien d’embauche.
Comment percevez-vous l’évolution du secteur du BTP par rapport à la place des femmes ?
S. M : En moyenne, l’effectif féminin représente environ 10 à 12% de l’effectif total, et on le trouve majoritairement dans les services administratifs. Chez Yprema, l’effectif féminin représente 3 fois plus, soit 33%, et nous avons réussi à féminiser certains postes de l’exploitation, comme l’accueil commercial sur site, où les salariés assurent :
- le contrôle qualité des matériaux entrant et sortant ;
- le conseil commercial sur l’utilisation de nos matériaux ;
- l’enregistrement des ventes et le suivi des chantiers.
C’est un poste qui est en relation directe avec les chauffeurs et les clients et il est majoritairement occupé par des femmes. Compte tenu de la pénurie de main-d’œuvre observée en Île-de-France, avec la forte activité du BTP, tractée notamment par les chantiers du Grand Paris Express, l’emploi des femmes dans le BTP va forcément augmenter, puisqu’on voit déjà des femmes « conducteur de travaux », « conducteur d’engins » ou « chauffeur Poids lourds ». Cette pénurie de main-d’œuvre va faire qu’on va avoir de plus en plus recours aux femmes et, ce d’autant plus que les entreprises du BTP s’organisent pour créer leur propre centre de formation afin de former eux-mêmes leurs futurs collaborateurs.
Propos recueillis par Fabien Carré
Photo de Une : ©Yprema