Féminisation du secteur du BTP, où en est-on ?
Si la part des femmes dans le bâtiment a bien progressé depuis l’an 2000 passant de 8,6% à 12,3% en 2018, les chiffres sont encore déplorables ! Ainsi, malgré les initiatives lancées par les syndicats professionnels et les entreprises pour renforcer l’attractivité des métiers du BTP, de nombreux efforts sont encore à faire.Un travail de pédagogie devrait notamment être engagé pour mettre à mal les idées reçues et faire du BTP, un secteur plus égalitaire.
La FFB précise que « c’est dans la catégorie des cadres que la proportion des femmes progresse le plus rapidement (19,4% en 2018 vs 18,4% en 2017) ». « De la même façon, en formation initiale, plus le niveau est élevé, plus le nombre de femmes augmente. » Elles représentent 45,8% des employés et techniciens et seulement 1,5% des professionnels intervenant sur les chantiers.
Christine Petiteau, présidente des groupes Femmes dirigeantes de la FFB, estime cette année encore que « dans les années qui viennent, 40% des entreprises seront à reprendre dans le secteur. Les femmes repreneurs constituent un réel atout pour la performance des entreprises ! ».
La FFB indique que plus d’une entreprise sur deux sont dirigées ou codirigées par une femme. Elle fait aussi état de 25% de femmes à l’École Supérieure des Jeunes Dirigeants du Bâtiment (ESJDB). Quant à la situation au sein même du syndicat ? 10% des mandataires de la FFB sont des femmes et 3 000 femmes sont membres des 94 groupes Femmes dirigeantes de la FFB.
La réglementation se renforce pour plus de parité
Alors que l’égalité entre les femmes et les hommes a été déclarée « grande cause du quinquennat », chacun des ministères a pris des engagements. Muriel Pénicaud, ministre du travail, a notamment travaillé, avec les partenaires sociaux, pour la définition d’un index de l’égalité professionnelle « qui mesure le salaire mais aussi les égalités de chance, de promotion et qui objective le plafond de verre ».
Lors d’une audition à l’Assemblée nationale, mardi 5 mars, elle a expliqué : « Les entreprises de plus de 1000 salariés, doivent publier depuis le 1er mars, leur index, ce sera le cas de toutes les entreprises de plus de 250 salariés au 1er septembre et de toutes les entreprises de plus de 50 salariés, au 1er mars 2020 ».
« On voit aujourd’hui que 732 entreprises ont rempli leurs obligations de déclaration, c’est-à-dire une sur deux. Plus de 500 sont en cours de déclaration. On voit que l’exigence de prise de conscience et de transparence que nous avons mis dans la loi est en soi un sujet. Sur les 732, 14 ont 100 points, sont à égalité réel. 16%, 118 sont en alerte rouge (…). Mais la grande majorité a beaucoup de progrès à faire et va s’engager dans cette démarche », a-t-elle assuré.
Et d’ajouter : « De tous les échos que nous avons depuis 2 jours, on s’aperçoit que beaucoup d’entreprises découvrent avec stupeur parfois positive, parfois négative, leurs résultats, car elles-mêmes n’avaient pas d’instruments de mesure. Je suis persuadée que ça va avoir un levier intense ».
Des entreprises qui s’expatrient pour ne pas respecter les quotas de femmes
Bien que des lois existent, les entreprises ne les respectent pas toujours. Pour rappel, toute société a des obligations en termes d’égalité professionnelle, un accord doit même être conclu en ce sens pour les entreprises de plus de 50 salariés.
Dans un nouvel Observatoire, Skema, qui analyse depuis 2007, l’évolution du pourcentage de femmes dans les conseils d’administration, les comités exécutifs, l’encadrement et les effectifs des 60 plus grandes entreprises privées françaises (CAC40 + CAC Next 20) pointe « les évadés fiscaux », c’est-à-dire les entreprises qui s’expatrient pour éviter le quota de 40% de femmes dans le Conseil d’administration imposé par la loi Copé-Zimmermann.
« Les 6 entreprises qui sont les plus éloignées du quota de 40% sont toutes juridiquement domiciliées dans des pays étrangers non-soumis à des quotas ou à des quotas plus faibles », indique un communiqué. Parmi ces entreprises, on retrouve LafargeHolcim qui comptent seulement 8,33% de femmes administrateurs.
Quant à « l’irréductible plafond de verre pour accéder aux comités exécutifs », le baromètre note qu’au 1er janvier 2018, la quasi-totalité des entreprises du CAC40 domiciliées en France avaient atteint la quota de 40%, mais que les femmes ne représentent que 13,69% des comités exécutifs alors qu’elles sont 32,33% parmi la population cadres, « vivier traditionnel de recrutement des dirigeants ».
Des entreprises qui travaillent à la féminisation du secteur
Fort heureusement, de nombreuses entreprises travaillent à la féminisation du secteur. Vinci fait partie des bons élèves en la matière. La société s’est fixée pour objectif d’atteindre la proportion de 25 % de femmes managers à l’horizon 2020 (elles sont 19% aujourd’hui). Le Groupe rappelle aussi son partenariat avec l’association Elles Bougent, dont la principale ambition est d’encourager un plus grand nombre d’étudiantes à s’orienter vers des carrières d’ingénieures ou de techniciennes.
Autre exemple, SPIE qui a lancé en 2015, So’SPIE Ladies, une initiative visant à promouvoir l’égalité professionnelle et à favoriser la mixité des équipes. Cette année, les actions du groupe vont s’articuler autour de deux axes forts : la lutte contre les stéréotypes inconscients et la féminisation dans les métiers techniques. Corinne Figuereo, directrice de la transformation et de l'innovation chez SPIE, déclare : « Le 8 mars, c'est l'occasion de s'arrêter sur des problématiques qui concernent tout le monde. La journée de la femme, par ce qu'elle souligne en termes d'inégalités et en tant que symbole du chemin restant à parcourir, s'adresse aussi aux hommes ».
R.C
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