L’ECIMA alerte sur une crise de la filière de l’isolation
« Madame la Ministre, je vous prie de trouver en pièce jointe le courrier envoyé à votre prédécesseure qui est resté sans réponse. Celui-ci annonçait l'hécatombe qui a eu lieu dans les effectifs de personnels dûment formés des professionnels historiques de l'isolation de combles ». C’est ainsi que commence la lettre de l’ECIMA, adressée à Agnès Pannier-Runacher, la nouvelle ministre de la Transition Énergétique.
Le Syndicat des fabricants de ouate de cellulose tirait d’ores et déjà la sonnette d’alarme en février dernier, dans un précédent courrier alertant sur la chute brutale des travaux d’isolation et sur la destruction de 13 000 emplois dans le secteur. Co-signée par huit autres syndicats et fédérations, dont le Symbiote, l’initiative Rénovons, le SNI, le FILMM, ou encore la FFB, la lettre était alors restée sans réponse.
Dans une nouvelle lettre publiée le 30 mai dernier, le président de l’ECIMA, Charles Kirié, rappelle qu’il est impératif de relancer la filière pour protéger le pouvoir d’achat et l’emploi des Français, et demande une entrevue d’urgence avec la nouvelle Ministre de la Transition Énergétique. « Vous sachant proche des entreprises et aguerrie à leurs problématiques et à leur fonctionnement, nous sollicitons de toute urgence une entrevue auprès de vos services. Afin que celle-ci soit le plus efficace possible, il serait essentiel que nous soyons accompagnés par le Syndicat National de l'Isolation qui représente les entreprises de pose d'isolants soufflés », écrit le président de l’ECIMA.
Des chantiers en baisse, une filière en crise
En 2022, le nombre de nouveaux chantiers d’isolation est en baisse. Les Français n’ont en effet plus les moyens d’effectuer ces travaux, puisque la baisse histoirique des Certificats d’Economies d’Energie (CEE) depuis septembre 2021, a entrainé une rapide augmentation du reste à charge.
Aujourd’hui, la situation empire et ce sont les entreprises de travaux d’isolation et leurs salariés qui sont directement touchés, notamment pour les chantiers d’isolation de combles. « On peut estimer, de par notre contact étroit avec les professionnels du secteur, que 10 % à 20 % des entreprises historiques ont déjà fait faillite et que, sur les entreprises restant en activité, 50 % du personnel formé et qualifié RGE a été licencié et travaille désormais dans des métiers moins pénibles », annonce Charles Kirié dans la lettre. Il s’agit donc d’une perte catastrophique pour la filière, qui peine à recruter et à former du personnel à la fois qualifié et prêt à accepter la pénibilité du métier.
Et pourtant, les isolant biosourcés tels que la ouate de cellulose, répondent particulièrement aux objectifs fixés par la RE2020 en termes de réduction de l'empreinte carbone et de confort d’été. Ils offrent ainsi une meilleure masse volumique et une meilleure résistance à l’écoulement de l’air que les isolants traditionnels et ont la capacité de stocker du carbone, bénéficiant d’un bilan carbone négatif.
Cependant, le secteur étant victime d’une pénurie de ses effectifs, il semble alors compliqué que de tels objectifs soient atteints. « Il reste seulement 40 % des effectifs, ce qui ne sera pas suffisant pour répondre aux besoins réels en isolation de combles perdus dans un contexte de crise énergétique qui va nécessiter une massification et une accélération des travaux. Dans le contexte actuel on peut raisonnablement penser que si le marché, bloqué artificiellement par le cours du CEE historiquement bas, ne reprend pas en septembre, il ne subsistera en 2023 que 20 % des effectifs de la profession », alerte Charles Kirié, le président de l’ECIMA.
Robin Schmidt
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