Femmes dans le BTP : les clichés ont la vie dure
Aussi loin qu'elle s'en souvienne, Virginie Jacquemin, 41 ans, a toujours voulu « construire des maisons », « dès l'âge de 8 ou 9 ans », se rappelle-t-elle. En troisième, on lui propose un stage chez un architecte, puis chez un géomètre, mais ça n'est pas exactement ce qu'elle veut faire.
A la sortie du collège, elle décide de s'orienter vers un BEP « Construction topographique », puis quitte les Vosges pour Paris afin de faire un BTS « Economie de la construction » en alternance.
« Les femmes n'ont rien à faire dans le BTP »
Lorsqu'elle débute en tant que conductrice de travaux, Virginie doit affronter les remarques sexistes de certains hommes : « Les femmes, ça n'a rien à faire dans le bâtiment », lui dira le patron d'une entreprise au sein de laquelle elle postule. « Tu vas rester dans ton bureau et décrocher le téléphone », entend-elle également. Elle doit aussi faire face à certains clients, parfois déçus de se retrouver face à une femme, et qui réclament « un technicien ».
Pour illustrer ces préjugés, elle explique avoir participé à une courte vidéo intitulée « Les femmes n'ont rien à faire dans le BTP », disponible sur Youtube.
Au fil des années, et après près de 20 ans passés au sein du groupe Livio, Virginie Jacquemin reconnaît qu'elle ne subit plus vraiment ce type de réflexions, surtout parce qu'elle est désormais bien connue dans le métier. Mais elle concède qu'il a fallu « trouver sa place » et s'imposer, car manager des hommes un peu machos, « ça n'est pas toujours facile ».
Un secteur qui a évolué et offre de formidables opportunités professionnelles
Sur les 20 salariés, elle reste encore aujourd'hui la seule femme avec la comptable. « Cela s'ouvre quand même aux femmes », concède-t-elle, tout en regrettant de ne pas recevoir davantage de candidatures féminines, y compris parmi les stagiaires et apprentis.
Hommes ou femmes, l'entreprise a globalement du mal à trouver des candidats : « On recrute, mais on ne trouve pas », s'inquiète-t-elle. Dans ce contexte, Virginie Jacquemin précise qu'elle a d'ailleurs participé à la campagne de communication « La construction, demain s'invente avec nous » du CCCA-BTP, et fait plusieurs interventions dans des collèges.
Mais, selon elle, le BTP fait encore face à de nombreux préjugés. Les conditions de travail seraient notamment perçues comme trop difficiles. Concernant la pénibilité, elle rappelle que le secteur a énormément évolué, avec moins de port de charges lourdes, beaucoup de prévention pour éviter les troubles musculo-squelettiques (TMS), notamment grâce aux exosquelettes, et à des formations. « Aujourd'hui on peut très bien avoir une bonne hygiène de vie en travaillant dans le BTP », estime-t-elle.
Autres clichés répandus : le secteur serait réservé aux personnes « nulles à l'école », et paierait mal. Or, selon elle, il offre au contraire de formidables opportunités professionnelles : « Je suis partie d'un BEP, et je suis devenue conductrice de travaux, puis directrice des travaux, et enfin directrice adjointe », témoigne-t-elle. « Si on est passionné, on peut tout à fait évoluer », résume-t-elle.
Et de conclure : « Le bâtiment est ouvert à tous, il faut tenter sa chance. Il y aura toujours des maisons à construire ou à rénover, des toit à changer, des fenêtres à remplacer... Il y a aura toujours des choses à faire ».
Propos recueillis par Claire Lemonnier
Photo de une : Virginie Jacquemin