Assises du BTP : que propose la CAPEB ?
« Alors oui, les artisans du bâtiment défendent, eux aussi, la nécessité de mettre en œuvre une transition énergétique et écologique ambitieuse dans le secteur, et notamment dans le domaine de la rénovation des bâtiments existants (réduction des dépenses énergétiques, réduction des émissions des gaz à effet de serre, décarbonation). C’est vital, nous le savons. Mais la CAPEB rappelle que cette révolution ne doit pas se faire au détriment de son volet social, notamment de l’emploi, ni au détriment de l’activité économique des entreprises », expose Christophe Repon, président de la confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB), dans un document listant 26 propositions à l’approche des Assises du BTP.
Très attendues par les professionnels, les Assises du BTP se tiendront le 22 septembre. À une semaine de cette vaste rencontre entre le gouvernement et le secteur, la CAPEB a tenu à défendre un compromis entre la transition écologique et l’activité des artisans.
Lutter contre la hausse des coûts et l’inflation
Ce n’est guère un secret : les hausses de prix continuent de préoccuper les artisans du bâtiment en cette rentrée. Pour la CAPEB, il est nécessaire d’« assurer une réelle transparence sur les hausses de prix pratiquées par les industriels et les négoces, en lien avec la crise de la Covid, la guerre en Ukraine, et la décarbonation des process industriels ».
Ainsi, pour la construction neuve, il conviendrait d’indexer les plafonds de ressources sur l’inflation réelle. À savoir que la CAPEB n’a pas signé, en juillet, la charte de solidarité contre les hausses des prix dans le BTP, car cette dernière manquait de visibilité sur l’évolution des prix.
La confédération soutient également une indexation sur les aides à la rénovation comme MaPrimeRénov’, « afin d’éviter une augmentation du reste à charge des ménages ». Proposition valable pour les Certificats d’économie d’énergie (CEE), dans le cadre des coups de pouce.
En outre, la CAPEB réclame la mise en place, pour une durée de six mois, d’un Pass’Réno de 300 euros pour les ménages modestes, les passoires thermiques en besoin de travaux d’urgence, et les travaux d’entretien-maintenance-dépannage. Ce qui compléterait le chèque énergie de 150 € actuel et équivaudrait à un coût d’environ 700 millions d’euros, mais plus ciblé sur les travaux de performance énergétique. Mais surtout, la mesure tend à amortir les hausses de coûts sur les devis (5 à 10 % en moyenne au premier trimestre 2022).
Autre mesure recommandée par la CAPEB : décaler la REP bâtiment, censée entrer en vigueur au 1er janvier 2023, au 1er janvier 2024. Le but : éviter d’ajouter une potentielle inflation découlant de cette prochaine obligation d’économie circulaire, estimée à minimum 1,5 % dès 2023 et 6 % à terme. L’idée est également de donner aux entreprises le temps d’intégrer le montant des éco-contributions dans leurs devis.
Soutenir et simplifier les aides à la rénovation énergétique
En plus d’une diminution du reste à charge pour l’aide MaPrimeRénov’, profitable tant pour les ménages que les artisans du bâtiment, la CAPEB préconise la valorisation du système des CEE.
Parmi les propositions : augmenter le niveau des obligations des obligés, stabiliser le dispositif pour éviter les « stop and go » successifs, en particulier sur les opérations coups de pouce, lancer rapidement le programme Oscar ou bien proposer un audit énergétique gratuit, dès le premier geste des ménages s’engageant dans les travaux de rénovation énergétique.
La CAPEB soutient un complément à la TVA à 5,5 % pour les travaux de rénovation énergétique. Il s’agirait de proposer une TVA à taux réduit à 5,5 % pour tous les travaux réalisés en groupement momentané d’entreprises (GME), constitué de plus de trois corps de métiers. L’objectif est d’inciter les entreprises artisanales de proximité à travailler en GME, contribuant ainsi à la massification des rénovations globales, encouragée face à la crise énergétique.
Pour ce qui est de la qualification RGE, la confédération demande plus de crédibilité et de simplification du dispositif. Cela passerait par la présence obligatoire d’un référent RGE par tranche de 10 salariés au sein d’une entreprise qualifiée, une plus grande promotion de la qualification « chantier », ou bien un contrôle régulier des entreprises RGE en fonction du nombre de chantiers.
Accompagner plus sereinement les déplacements des professionnels
Faciliter la mobilité des artisans est crucial pour pratiquer sereinement leur activité, estime la CAPEB.
C’est pour cette raison que la confédération appelle à un « calendrier de mise en œuvre réaliste » des Zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m). Plus précisément, le calendrier « doit tenir compte des réalités économiques des entreprises de proximité et de l’offre de véhicules sur le marché ».
Une concertation avec des représentants d’organisations professionnelles serait nécessaire et doit s’accompagner d’une organe de gouvernance nationale ad hoc des ZFE-m. La CAPEB propose également des dérogations locales pour la circulation de certains véhicules en ZFE-m, « tout en veillant à leur cohérence au niveau national ».
Autre proposition : l’accompagnement financier au déploiement de véhicules propres dans le parc professionnel. « Cette mesure pourrait être complétée par une offre packagée à destination des entreprises : aide à l’acquisition d’un véhicule électrique intégrant un financement préférentiel couvrant la mise en place d’une borne IRVE et installation de panneaux photovoltaïques pour alimenter la borne de recharge, permettant ainsi un fonctionnement en totale autoconsommation », abonde la CAPEB.
Mettre fin à la concurrence déloyale et limiter les sous-traitances en cascade
La CAPEB mentionne un autre cheval de bataille : la concurrence déloyale. La confédération propose d’y remédier en limitant à deux ans, dans le BTP, le recours au régime de la micro-entreprise en activité principale. Il conviendrait également de supprimer tous les dispositifs légaux générant du dumping social, tout en musclant les sanctions contre le détachement des salariés et en contrôlant le bon paiement des cotisations sociales.
Un contrôle serait de rigueur pour les activités bénéficiant de plateformes de mise en relation, afin qu’ils ne se dérobent pas à leurs obligations fiscales et sociales. La CAPEB encourage en plus la surveillance des activités sans qualifications professionnelles requises dans le bâtiment.
Dernier point : la limitation de la sous-traitance en cascade au rang 1. Pour la CAPEB, cela contribuerait « à la solidité financière des entreprises et à la qualité des travaux réalisés ».
Pour consulter les 26 propositions de la CAPEB à l’approche des Assises du BTP, le document disponible sur ce lien. Une vidéo du président Jean-Christophe Repon est également en ligne :
Virginie Kroun
Photo de Une : Adobe Stock