ZAN : une mission de contrôle du Sénat veut modifier la loi
Une mission conjointe de contrôle (MCC) pluri-partisane du Sénat a présenté mercredi 14 décembre une proposition de loi ayant pour objectif de corriger la loi « Climat et résilience », et de sortir les collectivités du flou face aux objectifs du Zéro Artificialisation Nette (ZAN) des sols d’ici 2050.
Les objectifs du ZAN, entrés en vigueur en 2021 suite à la loi « Climat et résilience », fixent une réduction de 50 % du rythme d’artificialisation des sols d'ici 10 ans, ainsi que l’atteinte du « zéro artificialisation nette » d’ici 2050. En France, 6 à 9 % des sols du territoire sont considérés comme artificialisés, c’est-à-dire que leurs fonctions ont été altérées par l’activité humaine. Chaque année, entre 20 000 et 30 000 hectares supplémentaires sont artificialisés.
Une mission conjointe de contrôle pour rectifier la loi « Climat et résilience »
Devant les difficultés rencontrées par les collectivités à mettre en œuvre le ZAN, quatre commissions permanentes du Sénat ont constitué une mission conjointe de contrôle, présidée par la centriste Valérie Létard. Cette MCC est chargée de réaliser une synthèse de l’ensemble de ces travaux, et formuler des pistes d’évolutions concrètes du cadre juridique de la mise en œuvre du ZAN.
De ces travaux résulte une proposition de loi comportant pas moins de 25 mesures, qui visent à corriger la loi « Climat et résilience », et faciliter le travail des collectivités face aux objectifs du ZAN. « Il s’agit probablement de la plus grande préoccupation de nos élus locaux en ce moment », a affirmé le rapporteur LR Jean-Baptiste Blanc, lors de la présentation de la proposition de loi (PPL).
Le gouvernement, qui a récemment admis que le cadre juridique du « ZAN » nécessitait des évolutions, a longtemps été alerté par les doutes des élus, comme l’explique Valérie Létard : « Cela fait quelques mois que l’on alerte le gouvernement sur une difficulté d’application et les inquiétudes des élus ». Cette PPL a pour vocation de dissiper tous ces doutes, et devrait être débattue au Sénat fin février, et ensuite examinée à l’Assemblée nationale pour qu’elle puisse aboutir au plus vite.
Madame Létard a tenu à rassurer, en soulignant le fait que les objectifs initiaux n’étaient pas remis en cause. « C’est ambitieux, mais nécessaire à nos objectifs environnementaux », a-t-elle déclaré.
Devant la grogne de plusieurs associations d’élus, qui ont notamment dénoncé un déséquilibre territorial, la sénatrice est consciente de la nécessité de réaliser un travail de concertation, afin de ne pas raviver la flamme de leur colère : « Il faut faire attention de bien travailler pour s’assurer que ce ne soit pas perçu comme imposé d’en haut, sinon ce serait vraiment un échec », estime-t-elle.
Que contient concrètement cette proposition de loi ?
Les mesures proposées par la PPL prévoient de faciliter la mise en œuvre du ZAN par les collectivités en complétant et en adaptant son cadre juridique, en renforçant la gouvernance territoriale, et en associant mieux les collectivités à l’échelle régionale.
D’autres propositions figurent dans cette PPL, comme l’allongement d’un an du délai d’intégration de l’objectif ZAN dans les documents d’urbanisme et d’aménagement. Le calendrier fixé pour la révision « en cascade » des documents d’urbanisme est en effet très contraint, comme l’avait déjà souligné le Sénat lors de l’examen de la loi « Climat et résilience ». Les projets de schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) révisés devraient être finalisés en mars 2023, soit moins de cinq mois après réception des conclusions des conférences des Schéma de Cohérence Territoriale (SCoT). Un timing trop serré donc, qui explique la proposition de loi précédemment citée.
La PPL compte également mettre en place des dérogations dans les territoires ruraux économiquement fragiles classés « zones de revitalisation rurale » (ZRR), ou encore la mise en place d’un décompte différent pour les projets qui favorisent la lutte contre le changement climatique, comme par exemple la création de pistes cyclables.
Le ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu a de son côté déclaré qu’il attendait la « fumée blanche » du texte du Sénat pour faire en sorte « d’amender le dispositif dans l’esprit d’ouverture que le gouvernement a indiqué depuis le début du mois d’août, quand il a suspendu la mise en œuvre des décrets de la fin du mois d’avril ».
Pour ce qui relève du réglementaire, la réécriture des décrets est prévue pour le début de l’année prochaine, selon M. Béchu.
Jérémy Leduc
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