Le CESE critique plusieurs points du projet de loi énergie
Le projet de loi énergie ne fait décidément pas l’unanimité. Alors que la loi de transition énergétique de 2015 prévoyait de diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre, le Gouvernement souhaite remplacer dans son projet de loi énergie cet objectif chiffré par la notion de « neutralité carbone » d’ici 2050. Certaines ONG y voyant une régression, le Ministre de la Transition écologique et solidaire s’était empressé de souligner au contraire une plus grande ambition : « Notre objectif n’est plus de diviser nos émissions de gaz à effet de serre par 4 car il est maintenant bien plus ambitieux : les diviser par 8 pour atteindre ZÉRO émissions nettes en 2050 », avait rectifié François de Rugy le 7 février sur son compte Twitter.
Consulté sur l’article 1, le CESE a, dans son avis publié ce mercredi 20 février, également remis en question certaines modifications évoquées par le Gouvernement dans le futur projet de loi énergie. Le Conseil a notamment rappelé la nécessité d’une réduction supplémentaire des émissions de gaz à effet de serre et déploré le remplacement d’un objectif chiffré précis par une notion plus floue : « L’objectif de neutralité carbone doit être atteint pour l’essentiel à travers une réduction supplémentaire des émissions de gaz à effet de serre. Le projet de SNBC actuellement en consultation prévoit ainsi une baisse de 83 % de ces émissions entre 2015 et 2050. Le CESE demande donc que cet objectif soit repris explicitement dans l’article 1 du projet de loi afin de clarifier les intentions du gouvernement ».
Le CESE réclame plus d’ambitions
Dans sa préconisation n°2, le CESE note également que les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre prévus dans le cadre de la SNBC n’ont pas été atteints sur la première période d’engagement 2015-2018 qui résultait de la LTECV : « Une hausse de l’ambition du pays à l’horizon 2050 devra donc se traduire non seulement par la tenue des objectifs intermédiaires prévus mais aussi par leur renforcement afin que l’effort correspondant ne soit pas simplement reporté sur les jeunes générations », a-t-il estimé.
Autre changement prévu dans ce projet de loi : la consommation d'énergie en 2030 devra avoir baissé de 17% par rapport à 2012, contre 20% prévus dans la loi de transition énergétique. Se positionnant contre cette réduction, le CESE préconise de revenir à l'objectif initial, déplorant également les retards pris dans les domaines du logement, du tertiaire et des transports.
Par ailleurs, le Conseil évoque le report de 2025 à 2035 de l'objectif de ramener à 50% (contre plus de 70% aujourd'hui) la part du nucléaire dans la production d'électricité française. Le CESE estime que ce délai supplémentaire « ne règle en rien la question de l'avenir de cette filière et de sa place future dans le mix énergétique français ».
Concernant les énergies fossiles, le CESE souligne que les objectifs fixés pour la période 2015-2018 en matière de consommation d'énergies fossiles n’ont pas été tenus. Il demande donc que cet objectif « soit suivi beaucoup plus régulièrement à l’avenir et que des mesures supplémentaires soient prises chaque année pour corriger la trajectoire si des dérives sont constatées ».
Le CESE souligne également la nécessité de « préparer les fermetures de centrale à charbon dès maintenant en étroite concertation avec toutes les parties concernées et de financer des mesures d’accompagnement de nature à permettre le reclassement des personnes affectées directement ou indirectement et le remplacement des emplois disparus. Il conviendra également d'accompagner de la même façon les activités du secteur pétrolier et pétrochimique qui seront affectées par cette baisse de la consommation ».
Enfin, le Conseil critique l'article 2 du projet de loi et la création d'un Haut conseil pour le climat : « Pour le CESE, la création éventuelle d'une instance supplémentaire ne suffira pas à régler à elle seule les importantes difficultés déjà relevées au sujet de la gouvernance de la transition énergétique. Celles-ci concernent le rôle des différentes instances existantes et les modalités de mise en œuvre des ajustements rapides, nécessaires pour tenir les objectifs annoncés. Il faut aussi articuler de façon urgente les planifications nationales, régionales et locales, notamment dans le domaine du déploiement des énergies renouvelables. En conséquence, le CESE considère que la priorité devrait être donnée à cette meilleure coordination des instances existantes ».
C.L