Gestion de l’eau : davantage de financements demandés par les sénateurs
« La sobriété n'est plus une option, c'est une obligation », déclarent Rémy Pointereau, sénateur (LR) du Cher et Hervé Gillé, sénateur (SER) de la Gironde, à propos d’un rapport, adopté ce mardi 11 juillet par la mission sénatoriale d'information sur la gestion durable de l'eau.
Fondé en février 2023 par un groupe socialiste, écologiste et républicain, la mission a pour rôle « d’identifier les failles de la politique publique de l’eau menée dans notre pays et de proposer des solutions pour faire face au défi d’une gestion partagée d’une ressource plus rare et précieuse », lit-on sur le site du Sénat.
En découlent du rapport 53 propositions, qui ont pour but d’« impliquer l'ensemble des acteurs, publics comme privés, dans un usage partagé de l'eau ».
Bien que la gestion de l’eau en France reste « assez performante (...) quand on est en situation de crise, on voit les limites du système », expose Hervé Gillé. Face au réchauffement climatique, il convient de « se préparer à une ressource qui va sans doute diminuer », défend-il lors d’une conférence de presse, ce mercredi 12 juillet.
Les métiers du BTP concernés, des réseaux d’eau à l’énergie
Lesdites propositions sont réparties entre différents volets. Un premier, plus général, incite à « fixer dans la loi l’objectif de sobriété hydrique ». Un deuxième tend à affirmer la gouvernance des collectivités sur la gestion de l’eau, tandis qu’un troisième se concentre sur l’amélioration des connaissances de la ressource.
Parmi les volets qui concernent le BTP, plus particulièrement les métiers des canalisations, on relève des recommandations du Sénat sur la réutilisation des eaux usées. Les sénateurs préconisent notamment d’ « encadrer l’avis des ARS sur les projets de réutilisation dans un délai défini et motiver les avis défavorables », de manière à ce que les principes de précaution ne deviennent pas des points bloquants. Les élus appellent aussi à « conforter » les ressources financières des agences de l’eau, afin qu’elles cofinancent les études et travaux de mise en oeuvre des projets de réutilisation.
Plus spécifiquement à l’eau potable, les sénateurs encouragent la mise à jour du schéma d’interconnexion dans chaque département, afin de cartographier les fragilités d’approvisionnement dans les différentes communes. À cela s’ajoute la mesure d’ « élargir l’obligation pour tous les maîtres d’ouvrage de connaître leur patrimoine ». Cela engagerait ces derniers, sous cinq ans, à réaliser un diagnostic, une analyse financière complétée d’un plan pluriannuel d’investissement. « Il convient de fixer un taux de rendement-cible autour de 85 % et d’adopter une tarification de redevance très dissuasive pour les réseaux les plus fuyards », est-il également conseillé parmi les propositions.
La qualité de l’eau s’affiche dans les propositions, qui misent entre autres sur les technologies dépolluantes ou bien le regroupement des petites unités d’assainissement, pour un meilleur financement à l’échelle des petites communes.
Concernant la sobriété eau, les sénateurs souhaitent également des mécanismes financiers de provision, pour la mise aux normes des installations d’assainissement non collectif.
D’autres suggestions se recentrent plus sur le déploiement d’installations énergétiques : mieux définir les modes de renouvellement des concessions hydroélectriques ou bien booster la pose de panneaux photovoltaïques sur les plans d’eau existants.
« Il n'y aura pas de politique de l'eau ambitieuse sans moyens financiers ambitieux »
Comme on peut le lire entre les lignes : la plupart de mesures réclament davantage de financements dédiés à la gestion durable de l’eau. « Il n'y aura pas de politique de l'eau ambitieuse sans moyens financiers ambitieux » défendent les sénateurs. Or l’effort financier du Plan eau annoncé par le président de la République fin mars reste « insuffisant », déplore M. Gillé.
Les 475 millions d'euros par an versés aux agences de l'eau, pour la réalisation des actions du Plan eau, « ne sont pas satisfaisants compte tenu des enjeux », estime le rapporteur, qui préconise de « les doubler si on veut aller vers des trajectoires performantes ». Cela passe notamment par la suppression, d’ici fin 2023, du « plafond mordant de recettes et de relever les plafonds d’emplois et les plafonds de dépenses des agences de l’eau » , et ainsi « pérenniser les 475 millions d’euros de recettes supplémentaires proposées par le Plan eau ».
Autre point à « pérenniser » : le soutien financier aux offices de l’eau ultramarins, chargés d’améliorer les réseaux d’eau potable et l’assainissement.
Pour connaître l’ensemble des propositions de la mission sénatoriale d'information sur la gestion durable de l'eau, rendez-vous sur ce lien.
Virginie Kroun
Photo de Une : Adobe Stock