DPE : « On passe de l'incitation à la phase de contrainte » (OptimHome)
Le gouvernement a précisé lundi dernier les contours du nouveau DPE qui sera mis en place à compter du 1er juillet prochain. Parmi les nouveautés : un changement de méthode de calcul et d'affichage. Il deviendra également opposable, puis obligatoire sur toutes les annonces immobilières.
Olivier Colcombet, président du réseau OptimHome, s'est dit favorable à cette nouvelle étape, qui rend le DPE non plus seulement informatif mais vraiment obligatoire. « C'est un outil pour le gouvernement puisqu'il légifère pour accélérer la politique de rénovation énergétique, avec un axe social concernant l'interdiction de location des passoires thermiques F et G entre 2023 et 2028. Il y avait des incitations à la rénovation, et là on passe vers la phase de contrainte et de pénalités », résume-t-il.
Une politique qui a ses limites
S'il s'agit selon lui d'une bonne nouvelle pour accélérer la mise en œuvre de travaux, il reconnaît que cela ne sera pas si simple de rénover les 4,8 millions de passoires énergétiques, qui représenteraient tout de même 17 % des logements français. « 2023, c'est demain », souligne-t-il.
Concernant la rentabilité locative, il rappelle que les propriétaires bailleurs, qui sont parfois des retraités avec peu de revenus, n'ont pas toujours les moyens de financer ce type de rénovations, et ce malgré les aides proposées dans le cadre de MaPrimeRénov' : « On oublie souvent que les propriétaires bailleurs ne sont pas forcément riches ». Il s'est en revanche dit satisfait des recommandations qui seront fournies concernant les travaux à réaliser en priorité, et qui pourront orienter les propriétaires.
Il rappelle par ailleurs que de nombreuses passoires thermiques sont situées dans des zones où le marché est tendu et où les prix sont supérieurs à la moyenne, notamment dans les centres historiques. Pour ces bâtiments historiques comme l'haussmannien, se pose également la question du type de rénovation. Pour des raisons esthétiques évidentes, ces derniers ne peuvent pas être isolés par l'extérieur, et doivent être isolés par l'intérieur, au risque de perdre des mètres carrés. Olivier Colcombet insiste donc sur la nécessité de développer de nouveaux isolants plus fins pour éviter qu'une perte de mètres carrés ne s'ajoute au coût de la rénovation.
Vers une hausse du nombre de logements vacants
Il ajoute que l'interdiction de location des logements étiquetés F et G pourrait occasionner une perte de logements sur un marché déjà très tendu : « Je crains que l'on augmente le nombre de logements vacants alors qu'il y a déjà une pénurie. Parfois il vaut mieux avoir un logement avec de mauvaises performances énergétiques que de ne pas en avoir du tout », tranche-t-il.
… et des prix ?
Le président d'OptimHome s'est également interrogé sur les répercussions de ces travaux sur l'augmentation des loyers : « Faire évoluer l'habitat dans un contexte à tendance écologique, c'est super, mais quid des niveaux de loyer ? », s'est-il inquiété.
Autre question soulevée : la valeur verte des logements. Olivier Colcombet rappelle les résultats d'une étude réalisée l'an passée, avec 85 % des Français qui disaient être sensibles aux performances énergétiques d'u bien immobilier. Mais il souligne que, dans les faits, au moment d'acheter, c'est surtout la question du prix du logement et de la capacité d'endettement qui se pose. Or, selon lui, le prix des logements rénovés présentant un DPE A ou B devrait encore davantage augmenter avec l'affichage des consommations énergétiques : « Ce qui va changer, c'est que les acquéreurs vont pouvoir comparer les coûts des consommations avec un coût d'emprunt. Mais, pour beaucoup de ménages il est plus facile d'étaler les frais de rénovation sur les 10 ans plutôt que de payer un bien 10 à 15 % plus cher. Il faut être honnête, les Français ont un appétit pour le « green » qui ne peut pas toujours mis en oeuvre ».
Concernant le caractère obligatoire du DPE sur les annonces immobilières, Olivier Colcombet rappelle qu'il l'était déjà : « Je pense qu'il faut aller jusqu'au bout. Aujourd'hui il est obligatoire pour les professionnels mais pas pour les annonces de particuliers. Il faut que cela devienne obligatoire pour tous les annonceurs et pas seulement les professionnels, sinon il y a une concurrence déloyale qui s'installe », conclut-il.
Propos recueillis par Claire Lemonnier
Photo de une : Adobe Stock