La crise du logement touche de nouveaux publics, selon la Fondation Abbé Pierre
Près de trois mois après la journée de lutte contre la précarité énergétique, faisant état d’une aggravation de la situation en France, la Fondation Abbé Pierre publiait ce mercredi son rapport annuel sur le mal-logement.
« L'année 2023 restera celle de l'aggravation alarmante de la crise du logement, et face à cela le gouvernement continue une politique d'austérité, ce qui est pour nous une erreur fondamentale », a déploré Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, à l’occasion d’une conférence de presse.
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Extrait vidéo de l'intervention de Christophe Robert
Mal-logement : tous les indicateurs en hausse
Dans son rapport, la Fondation Abbé Pierre constate une hausse des expulsions locatives, qui ont atteint un niveau record en 2022, avec 17 500 expulsions.
Parallèlement, le nombre de personnes à la rue augmente, avec 330 000 personnes sans domicile fixe, soit un nombre qui a doublé en dix ans.
À l’automne 2023, plus de 8 300 personnes – dont 2 800 mineurs – ont été refusées chaque soir par le 115, contre 6 300 un an plus tôt, et ce malgré l’augmentation du nombre de places d’hébergement d’urgence. La fondation note que ce problème de saturation n’est plus un problème uniquement hivernal, mais qu’il persiste désormais toute l’année.
Manuel Domergue, directeur des études de la Fondation Abbé Pierre, rappelle également qu’un million de personnes vivent dans un logement indigne, alors qu’elles sont prêtes à « tout accepter plutôt que la rue ». Ce dernier a par ailleurs reconnu que le projet de loi contre l’habitat indigne, adopté la semaine dernière, allait « dans le bon sens ».
Alors que le nombre de personnes en attente d’un logement social est en hausse - avec 2,6 millions en 2023, contre 2 millions en 2017 - le nombre d’agréments pour la construction de logements sociaux, lui, chute.
Une crise du logement qui touche de nouveaux publics
Autre constat : cette crise du logement touche désormais de nouveaux publics, de nombreux ménages ne peuvent plus accéder à la propriété en raison de la hausse des taux d’intérêts, et doivent se reporter sur le marché locatif, lui-même saturé.
De plus en plus de ménages et d’étudiants sont confrontés à un « rétrécissement de l’offre locative », et à une hausse des loyers, parfois en raison du développement des locations touristiques de courte durée, type Airbnb.
Selon la Fondation Abbé Pierre, cette crise est « inédite » car « elle grippe toutes les sphères du logement en même temps, avec une force et une rapidité inouïes ».
Dans ce contexte, l’association regrette l’absence de réponse forte du gouvernement, qui selon elle, continue de traiter la question du logement « à travers le prisme budgétaire ». Or, d’après elle, le logement contribuerait « à hauteur de 88,3 milliards d’euros aux recettes fiscales », contre « 38,2 milliards de dépenses ». Elle appelle donc à « relever l’effort public pour le logement », « qui n’a jamais été aussi faible depuis 2010 ».
Claire Lemonnier
Photo de une : X – Fondation Abbé Pierre