L'Ademe identifie 23 freins au réemploi des matériaux de construction
« Ils sont d’ordre technique, juridique, économique, liés à l’environnement et à la santé ou encore aux perceptions et pratiques des acteurs », souligne l'Ademe dans son étude.
Dans le secteur des Travaux publics, les pratiques semblent plus développées que dans le Bâtiment. En effet, « la culture de l’utilisation de matières recyclées apparaît plus ancrée », constate l'Ademe.
Il existe un encadrement des pratiques, rendu possible par des documents techniques et normes « Produit » qui « couvrent explicitement les matériaux recyclés », des normes d’exécution ou encore des guides techniques qui portent sur les aspects d’aptitude à l’usage et de mise en œuvre.
Incertitude sur le marquage CE et la déclaration de performance
En revanche, la rédaction du Règlement Produit de Construction « laisse place à une incertitude quant aux obligations de marquage CE pour les produits de réemploi et de déclaration de leurs performances » aussi bien dans le secteur des TP que pour le Bâtiment.De plus, dans le secteur du Bâtiment, les principaux problèmes identifiés portent sur « le réemploi de matériaux ou produits issus de dépose (démolition, entretien, réhabilitation), notamment les freins liés à l’aptitude à l’usage des produits, les risques sanitaires ou l’assurabilité (décennale, dommage ouvrage)», remarque l'Ademe.
Pour les surplus de chantier ou les invendus de négoce se posent également des problèmes (communs également aux produits de dépose ou chutes de chantier) de mise en relation des acteurs et de mise à disposition des matériaux et produits (plateformes d’entreposage ou distribution) ainsi que de prescription.
Des contraintes et des bénéfices pour les TP
Si le réemploi présente des contraintes pour le secteur des TP (changement d'habitude, de clauses de marché, d'évaluation des offres...), l'Ademe assure que le budget des travaux est mieux maîtrisé, voire « en baisse, le plus souvent », avec une économie de 20 à 30 % pour la réalisation de chaussées ou de tranchées et « un impact GES réduit » d'environ -0,4 kgCO2/m² de chaussée.
Cependant, le développement du réemploi à court et moyen termes nécessitera davantage d'encadrement via la réglementation, un accompagnement à la formation et un renforcement de la prescription. « Il s’agira de sensibiliser les acteurs (notamment les maîtres d’ouvrage) en s’appuyant sur les « retours d’expérience » et de les former aux bonnes pratiques de réemploi ».
Un effort d'adaptation plus conséquent pour le Bâtiment
Dans le secteur du Bâtiment, « l'effort à fournir sera plus conséquent », car avant de songer à renforcer la prescription, les pratiques de réemploi devront être encadrées et les acteurs informés sur le potentiel de ces déchets (maintien de la qualité technique des ouvrages, vigilance sanitaire, maîtrise des risques environnementaux).
Pourtant là encore, le secteur pourrait y voir des bénéfices assez rapidement : le développement de référentiels et de guides « améliorera la maîtrise des risques de sinistralité et instaurera un niveau de confiance plus élevée : la garantie décennale sera facilitée pour les entreprises ; les maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre « rassurés » prescriront plus facilement des produits de réemploi », avance l'Ademe.
Reste à créer l'offre, mettre en relation les acteurs du réemploi et faciliter la mise à disposition des matériaux et produits. « Ce sont à ces conditions que le réemploi pourra trouver sa place dans des marchés de commandes publiques ou privées, pour des opérations de réhabilitation, voire de construction neuve, d’habitats ou de bureaux », conclut l'étude de l'Ademe.
Des précisions quant aux critères permettant le non passage au statut « déchets » de produits destinés au réemploi, ainsi que la définition des obligations de marquage CE pour leur remise sur le marché devraient être communiqués courant 2017.
C.T
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