Comment évoluera l’expérimentation Effinergie Patrimoine ?
Fin janvier dernier, l’association Effinergie livrait les résultats de son expérimentation Effinergie Patrimoine. Lancée en 2020, ce projet cherche à recenser, mais aussi valoriser des retours d’expérience de chantiers conciliant réhabilitation énergétique et préservation du patrimoine.
Au total : sur les 54 projets candidats, 9 ont été validés par la commission formée par Effinergie, constituée de huit experts énergéticiens et 8 experts du patrimoine.
Si l’expérimentation retenait un engouement, elle notait des axes d’amélioration et d’évolution, dans l’idée de davantage forger la collaboration entre ces deux univers. Des efforts mieux détaillés par Effinergie à l’occasion du salon Renodays.
« On s'est rendu compte qu'on n'utilisait pas tous les mêmes mots »
« L’idée que l'équipe projet est importante, on le sait. Mais il est important aussi qu'elle arrive à communiquer, que les gens arrivent à se parler entre eux et je vous assure que ce n’est pas si évident que ça dans des projets de réhabilitation. Peut-être encore moins dans des projets de réhabilitation avec la préservation patrimoniale», observe notamment Angélique Sage, responsable technique au sein du collectif Effinergie, qui a également animé une masterclass sur le futur de l’objectif Rénovation BBC d’ici 2050.
« Cette notion d'échange et de dialogue est fondatrice pour le projet, mais ne se retrouve pas toujours. On s’est rendu compte que sur certains projets, les gens ne se parlaient pas, donc ne pouvaient pas se comprendre, donc n'avaient pas non plus les mêmes ambitions, les mêmes objectifs. Et ça ne fonctionne pas », défend-elle.
Et cette instauration du dialogue passerait par des références communes. « On s'est rendu compte qu'on n'utilisait pas tous les mêmes mots, mais qu'on voulait tous dire la même chose. Donc il y a des notions de vocabulaire qui, en fonction des métiers que l'on occupe, chacun, peuvent être importantes dans les premiers échanges que que l'on peut avoir », souligne Angélique Sage.
Exemple : « Peu, voire très peu de personnes savaient ce que pouvait être un diagnostic patrimonial, alors que l'idée fondatrice derrière, c'était de connaître le bâti, de savoir d’où on part, pour trouver des solutions qui sont vraiment en adéquation avec ce bâtiment-là ».
L’un des axes d’Effinergie Patrimoine sera donc « de cadrer ce que doit être le diagnostic sur des bâtiments de ce type pour être sûr, qu'on ait tous les éléments à la base du projet fondamentaux pour réussir à trouver des solutions en adéquation », évoque la responsable technique d’Effinergie. Et d’encourager des normes et des méthodologies déjà appliquées par la maîtrise d’oeuvre et les architectes sur les projets à portée patrimoniale, comme la charte de réhabilitation responsable du bâti ancien (CREBA).
Plus d’exigences sur le niveau de performance BBC ?
La performance énergétique du bâtiment après travaux ne doit pas être non plus délaissée. « Dans les 21 dossiers qu'on a eus, une majorité atteignent le niveau BBC », indique Angélique Sage. « Certains n'arriveront pas à l'atteindre, certes. Dans les projets qui ont été validés, il y en a deux qui ne l’atteignent pas mais qui ne l’atteignent pas à vraiment très peu de choses. Il y en a un, c'est à quelques kilowattheures près. Un autre qui devait réduire de 40 % de la consommation, mais est dans une réduction de 39 et quelques % », poursuit-elle.
À savoir que l’expérimentation Effinergie Patrimoine met l’accent sur d’autres critères que la performance énergétique. « Notamment sur la gestion de l'humidité, la perspiration des parois, pour être juste sûr que ça se passe bien », cite la responsable technique d’Effinergie.
Autre élément à prendre en compte : « la notion d’état de référence », c’est-à-dire « savoir sur le bâtiment que l'on a aujourd'hui, ce qui est à préserver, et ce qui est de moindre importance patrimoniale, qu'on pourrait enlever, qu'il faut des fois enlever parce que finalement, ça a dénaturé le bâtiment dans une rénovation antérieure », définit-elle.
À cela doivent s’ajouter des critères de « confort d'été, vaste sujet qu'on va potentiellement faire évoluer avec de l'isolation intérieure extérieure selon les matériaux, etc. » mais également de « la non dégradation du bâti, voire la réversibilité ». « Il y a eu des projets sur lesquels la décision a été prise de ne pas, par exemple, garder l'escalier existant, de le recouvrir en partie. Mais de le recouvrir de telle façon que l'escalier en question soit préservé, qu'il puisse être restitué dans un état futur, si on le souhaite », raconte Angélique Sage.
L’expérimentation Effinergie Patrimoine ne réclamait pas non plus de qualification particulière. Et « on n'a pas l'intention d'en mettre dans la suite qu'on va y donner », déclare Mme Sage, avant de conclure : « Par contre, on se rend compte qu'il est important que chacun des acteurs ait une sensibilisation à ces notions de préservation patrimoniale pour qu'on puisse échanger tous ensemble, qu'on arrive à se comprendre. Et que finalement la partie maître d'œuvre, architecte, comprenne le bureau d'études et ses ambitions énergétiques. Mais que le bureau d'études comprenne aussi les volontés de préservation patrimoniale de l'architecte ».
Virginie Kroun
Photo de Une : V.K