Des millions de dollars pour reconstruire l'Irak mal gérés et gaspillés
Les enquêteurs ont constaté ainsi dans de nombreux cas qu'il n'y avait pas eu de vérification sur la réalisation effective de projets payés à l'avance, que le personnel n'avait pas signalé l'argent perdu, qu'il n'y avait souvent pas de trace écrite sur le suivi des projets financés etc. "Des indications de fraude potentielle" ont également été trouvées et "des enquêtes sont en cours", ajoute l'audit, dont l'AFP a obtenu une copie.
L'inspecteur général chargé de suivre la reconstruction irakienne soumet ses rapports au secrétaire à la Défense, Donald Rumsfeld, et à la secrétaire d'Etat, Condoleezza Rice. Stuart Bowen a déjà publié plusieurs rapports en 2005 mettant en cause la gestion et le suivi des contrats de reconstruction en Irak par l'autorité provisoire dirigée à l'époque par l'Américain Paul Bremer. Le rapport qui vient d'être publié apporte de nouveaux éléments sur cette mauvaise gestion.
Il conseille notamment à l'ambassadeur américain en Irak, Zalmay Khalilzad, "d'obtenir le remboursement de 571.823 dollars versés indûment concernant 11 contrats". Par exemple, un entrepreneur est allé voir séparément deux employés de la CPA et "a été payé 14.000 dollars à quatre reprises pour la même modification de contrat".
Dans le cas de la rénovation de l'hôpital général à Hillah, un contrat de 662.800 dollars a été accordé le 30 mars 2004 prévoyant l'installation de quatre nouveaux ascenseurs. Mais l'entrepreneur, qui a été payé en totalité, a tenté de réparer les ascenseurs au lieu de les remplacer. En septembre 2004, un ascenseur s'est écrasé provoquant la mort de trois personnes, souligne l'audit.
Le rapport prend également pour exemple la piscine olympique à Hillah. Un contrat de rénovation avait été signé le 22 mars 2004 pour 108.140 dollars. En fait l'entrepreneur n'a pas remplacé les pompes et n'a fait que nettoyer les pompes et les tuyaux existant. La coalition "a perdu l'argent destinée à payer l'installation de nouvelles pompes et la piscine n'a pas pu être utilisée", dénoncent les enquêteurs.
Dans un autre cas, un militaire américain accompagnant l'équipe olympique irakienne de boxe dans un voyage aux Philippines "a perdu entre 20.000 et 60.000 au jeu" et ses pertes ont été couvertes par l'argent de la reconstruction sans que cela soit signalé.
L'audit montre surtout que le personnel ne respectait pas les procédures pour s'assurer que l'argent liquide était mis en lieu sûr. "La région centrale-sud n'avait pas de livre où était consignées les sommes en liquide déposées et retirées du coffre", souligne le rapport. Par exemple, un officier "a conservé environ 2 millions de dollars en liquide dans les toilettes de son bureau" et "un agent chargé des paiements a gardé environ 678.000 dollars en liquide dans un placard qui n'était pas cadenassé dans son bureau".
Selon le quotidien New York Times, certains des cas cités dans ce nouvel audit devraient se recouper avec des enquêtes concernant quatre Américains qui ont été arrêtés pour corruption, vol, complot concernant des projets de reconstruction menés par un entrepreneur américain travaillant à Hillah.