Une rose de Berne pour l'ambassade de Suisse à Moscou
À Moscou, l’ambassade de Suisse, la résidence de l'ambassadeur et des bâtiments annexes étaient réunis sur une seule parcelle, dans un ancien verger du tsar, au nord-est du Kremlin. Les noms des rues qui la bordent, à l’origine des ruelles («pirioulok»), révèlent l’affectation première de ces terrains : «ogorodnaya sloboda» signifie le potager du faubourg, hors les murs, et «gouciatnikov», l’enclos des oies.
Cette zone fut urbanisée dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Un palais de deux étages, classé monument historique, fut érigé en 1892 par l’architecte Nikolaï Ivanovitch Yakounine. Il fut complété dans les années 1960 par l’adjonction d’une annexe, résidence de l’ambassadeur.
La parcelle et ses divers bâtiments furent acquis par la Confédération suisse en 2005.
A l’étroit dans ses locaux un peu défraîchis, l’ambassade avait besoin d’être agrandie et rénovée.
Un jardin « au coeur » des bâtiments
En 2007, le bureau Brauen Wälchli Architectes à Lausanne remporte le concours organisé par l’OFCL (Office fédéral de la construction et de la logistique) pour le réaménagement de l’ambassade de Suisse à Moscou. Le programme exigeait le maintien et la rénovation du palais datant de 1892, et prévoyait également la construction d’une nouvelle chancellerie.
Le projet des architectes lausannois baptisé « Berner Rosen » (du nom d'une variété de pommier, rose de Berne) proposait de construire sur la limite de parcelle pour dégager un espace central protégé par la coque dure du bâti. Le terrain au sud-ouest, à l’angle des rues, devait rester non bâti pour préserver la vue sur le bâtiment historique.
Les plans de l'ambassade ©Yves André |
L’organisation interne procède par couches : sur le pourtour externe, des cellules de bureaux classiques, sur l’anse intérieure, des bureaux paysagés. Relativement calmes et fermées sur rue, les façades entièrement vitrées ouvrent l’ambassade sur le jardin qui est conduit – idée forte du projet – à l’intérieur des bâtiments, dont le volume est travaillé par de profonds redents.
Les jardins de l'ambassade ©Yves André |
Art sans limitesAu sol de la nouvelle cour dont la forme s’apparente à celle de la Suisse, les chefs-lieux des 26 cantons suisses sont signalés par des pastilles gazonnées, et l’emplacement de la capitale helvétique a été planté d’un pommier de la variété « Berner Rosen ». Pour prolonger cette symbolique, l'artiste Anne-Julie Raccoursier fait planter dans chacun des cantons suisses un petit arbre ambassadeur cultivé par greffage à partir du même pommier et appartenant à la même espèce que celui de Moscou. Une intervention qui met en valeur plus de deux siècles de relations et d’échanges tissés entre les deux pays. |
Laurent Perrin
Photo de une ©Yves André