« Ce n’est pas parce que ces espaces sont pour des gamins qu’il doit y avoir de la couleur partout », prévient Pascale Dalix avant de nous entraîner dans les couloirs biscornus du nouveau groupe scolaire de la ZAC d’Ivry Confluences, aux portes de Paris. « Les enfants n’ont pas besoin qu’on les stimule avec de la couleur. Ce sont eux qui la produiront avec l’affichage de leurs dessins. Nous préférons les stimuler par la qualité et la variété des espaces », poursuit l’élégante architecte, cogérante de l’agence parisienne qui a livré l’équipement de 18 salles de classe élémentaire et maternelle juste avant la rentrée scolaire 2015-2016.

Takuji Shimmura

Murs en béton apparent, sols en caoutchouc gris, menuiseries en pin… : les intérieurs sont conçus avec des matériaux sobres et neutres comme s’ils s’adressaient principalement à des adultes. Avec rigueur et déférence, sans raccourcis caricaturaux, le groupe scolaire Rosalind Franklin se présente comme une grande page blanche prête à accueillir la production artistique des 3-11 ans. Les circulations sont généreuses, plutôt solennelles grâce à l’utilisation de matériaux bruts et à la lumière naturelle. Elles rappellent celles des augustes établissements de la IIIe République, l’école publique laïque, gratuite et obligatoire de Jules Ferry.

Regards croisé

Riche en recoins et en lignes brisées, la distribution en peigne du bâtiment est néanmoins propice aux rencontres fortuites et aux parties de cache-cache impromptues, très éloignée en cela des restrictions promises par les grandes lignes droites des couloirs des édifices scolaires de la fin du XIXe et du début du XXe siècle. A Ivry-sur-Seine, chaque lieu offre des points de vue différents. Chaque circulation propose de nouvelles perspectives, le plus souvent avec des postes d’observation sur l’extérieur, afin que les usagers, grands et petits, puissent se repérer aisément dans l’édifice en appréciant leur situation dans l’environnement urbain.

Simple et efficace, la typologie de l’école est caractérisée par deux cours, ouvertes au sud sur un mail piéton, autour desquelles sont disposées les salles de classe. Brouillant un peu les cartes, les formes du bâtiment, pour leur part, sont marquées par de multiples irrégularités du dessin. Les masses bâties sont accidentées, décalées d’étage en étage, creusées de terrasses, pour proposer de la variété spatiale et susciter les regards croisés.

Ombrières végétales

Mais, comme à Boulogne-Billancourt, pour l’école primaire des sciences et de la biodiversité livrée par Chartier Dalix en 2014, c’est du côté de l’utilisation du végétal qu’il faut voir l’une des principales originalités du projet. Au premier étage, une terrasse en bois est agrémentée de grands bacs pour cultiver les plantes aromatiques et les légumes. Toutes les autres toitures-terrasses sont accessibles et végétalisées (un ascenseur permet de descendre les débris végétaux de la fauche annuelle). Une petite serre est même disposée sur l’un des toits pour que les enfants puissent y mener des expériences de cultures.

La plupart des salles de classe, pourvues de larges baies vitrées, ont ainsi une vue directe sur des champs miniatures qui viennent mourir au niveau des allèges. En ces jours d’automne, d’innombrables petites fleurs jaunes et rouges leur donnent une atmosphère printanière et apaisante que promettent d’accentuer les auvents en métal déployé qui, disposés le long des acrotères, accueilleront des plantes grimpantes (vigne vierge, glycine, etc.) dès qu’elles auront poussé le long des câbles tendus à cet effet.

Tristan Cuisinier

David Foessel 

David Foessel 

Fiche technique :

Maîtrises d’ouvrage : SADEV 94, Ville d’Ivry-sur-Seine
Architecte mandataire : Chartier Dalix
BET : EPDC (TCE), RFR éléments (HQE), MEBI (économie)
Programme : groupe scolaire de 18 classes avec gymnase, centre de loisirs et 131 logments chercheurs et étudiants
SHON : 8 650 m²
Montant des travaux : 19,7 M€ H.T.
Calendrier : juillet 2015 (livraison)