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La revanche des tours géantes

Publié le 19 mars 2002

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Les tours Petronas de Kuala Lumpur (Malaisie) ne sont pas seulement un exploit technique et architectural, elles sont surtout le symbole d’un pays qui revendique sa place dans la cour des grands
La revanche des tours géantes - Batiweb
Ce sont les deux tours les plus hautes du monde : 451 mètres de haut. Cent mètres de plus que la tour Eiffel ! Elles dominent Kuala Lumpur, la capitale de la Malaisie, et appartiennent à la société pétrolière malaise Petronas. Cette compagnie est le symbole par excellence de la prospérité et de la réussite d’un pays qui, ancienne colonie anglaise, n’était vouée, jusque-là, qu’à produire du caoutchouc en raison de ses magnifiques plantations d’hévéas. La découverte du pétrole a complètement bouleversé son économie. Malgré l’étrangeté de ces constructions, sorties tout droit d'une ville d'Aldous Huxley, on s’émerveille aujourd'hui devant la réussite technique d’une telle performance. De loin, on aperçoit ces deux tours, séparées de 50 mètres mais reliées entre elles par un pont à mi-chemin de leur sommet. En fait, dans ce pays où la population est à majorité islamique, ces deux tours sont éminemment symboliques et leur architecture est porteuse de sens. Cette symbolique figurait dans le cahier des charges confié à l’agence de l’architecte américain Cesar Pelli. Elles sont le fruit d’une géographie extrêmement compliquée.

Décryptage De la base au sommet, le diamètre de chaque tour va en s’amenuisant. Le plan des étages s’inspire directement de motifs puisés dans l’architecture islamique. Ces détails complexes qui donnent de l’extérieur, l’impression d’une pile infinie de roues crantées, proviennent de la superposition décalée de deux carrés formant des étoiles à huit branches. Sur leurs bords, seize demi-cercles viennent adoucir les angles. À six reprises, de la base au sommet, la section des tours diminue pour finir en une sorte de dôme. Et ce n’est pas vraiment un hasard si au pied de chacune d’elle se trouve une petite mosquée. Enfin, presque situé au sommet des tours, un pont, suspendu à 170 mètres de hauteur au niveau des 41e et 42e étages, et maintenu par des armatures obliques, relie les deux jumelles. Il permet un passage entre les bureaux de la société pétrolière Petronas et les locaux de ses filiales sans devoir repasser par la base. Mais il est plus encore. Il forme le linteau de la porte du Kuala Lumpur City Center qui s’ouvre sur le nouveau quartier des affaires de 39 hectares. La construction de cet ensemble a été confiée non pas à une société mais à deux : l’une japonaise, Mitsubishi, l’autre coréenne, Samsung. Histoire de bien montrer, sans doute, que la Malaisie entrait dans la cour des dragons du sud-est asiatique. Les deux entreprises ont rivalisé de vitesse pour monter chacune des piles de 88 étages. La frénésie des ouvriers était telle, lors de la construction, qu’il a fallu à plusieurs reprises arrêter les travaux pour calmer les esprits. La compétition entre les équipes multipliait les accidents. Pour l’histoire, il faut dire que l’essentiel des échafaudages était constitué de bambous.
La charge est donc répartie en seize colonnes qui encerclent la base de chaque tour. Au sol, deux dalles de béton de 50 mètres de diamètre, coulées sur 4 mètres d’épaisseur, maintiennent les fondations plantées jusqu’à 125 mètres de profondeur. Ce chantier, dont la durée a dépassé quatre ans de travaux, de 1993 à 1997, est certainement l’un des plus démesuré qui soit : 20 architectes, 6 000 ouvriers, 200 cadres entraînés sur les sites de Canary Wharf et d’Euro Disney, chargés de gérer le bon déroulement des opérations, 77 000 m2 de vitrage, 29 ascenseurs et 10 cages d’escaliers. Outre ses 450 000 m2 de bureaux, les six premiers niveaux abritent un centre commercial, une salle de concerts de 850 places et un musée de l’énergie. Ces tours sont pour la Malaisie un véritable symbole. Le pays exprime ainsi sa symbiose totale avec la compagnie pétrolière Petronas. Ces tours figurent en effet la revanche financière, commerciale et industrielle d’un tout petit pays, hier encore simple colonie anglaise. En outre, ces tours géantes sont peut-être les seules à ne pas craindre actuellement les actes des extrémistes à la solde du groupe Al Qaida.

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