À Venise, un tour du monde des pavillons
Soixante-quatre participations nationales sont présentes à la Biennale d'architecture de Venise 2023. Les divers pavillons sont répartis entre les Giardini (27 pavillons) et l'Arsenale (22 pavillons), en plus d’un bon nombre d’installations qui viennent agrémenter certains espaces d'exposition institutionnels et qui sont dispersées sur l’île. Ils sont nombreux à raconter des histoires, à chaque pavillon son épopée et à chaque présentation ses propres caractéristiques. Mis à part le Pavillon français qui crée un lieu de célébration et d'expérimentation collective, quelques incontournables ont retenu notre attention.
De l’Europe …
A travers un projet audiovisuel de cinq films, une archive de recettes et un programme public de conversations et de débats, le pavillon espagnol, analyse le passé et le présent des systèmes alimentaires et des architectures qui les construisent pour se tourner vers l'avenir et s'interroger sur d'autres modèles possibles capables de nourrir le monde sans dévorer la planète. Le pavillon belge présente une grande installation aux murs de panneaux de mycélium et de terre crue qui s’apparente en une sorte de pavillon dans le pavillon et qui explore à grande échelle les possibilités des matériaux de construction naturels et organiques. Dans un monde où les ressources se font de plus en plus rares, voire presque épuisées, les champignons sont une alternative à notre façon de produire.
Tandis que le pavillon Suisse explore la relation de longue date mais négligée entre lui et le pavillon vénézuélien voisin, œuvres de Bruno Giacometti et de Carlo Scarpa, Le pavillon anglais déconstruit notre compréhension de l'environnement bâti, en mettant l'accent sur les personnes, les communautés, les rituels, les pratiques sociales et les coutumes quotidiennes. Le pavillon roumain propose, quant à lui, de se tourner vers les inventions oubliées du début du XXe siècle pour ouvrir le champ des possibles concernant les futurs développements.
Le pavillon lituanien présente une exposition qui vise à devenir un paysage de jeu, reconnaissant les perspectives uniques à travers lesquelles les enfants observent et interagissent avec leur environnement. Le projet s'efforce d'expliquer l'écosystème de la forêt en rassemblant des travaux et des découvertes développés en parallèle d'activités de plein air organisées avec des enfants dans les forêts de Lituanie et de Finlande. Un message est à retenir : les forêts sont des espaces négociés où tous les acteurs ont un rôle à jouer.
Un petit coup de cœur pour le pavillon du Kosovo qui présente une maison à l'envers en néon. Il s’agit d’un moyen ludique qui encourage les visiteurs à réfléchir à leur propre complicité avec leur propre résidence. L'installation principale et les textes qui l'accompagnent se concentrent sur l'idée que l'on peut être, suite à la migration de la population, mentalement connectés à plusieurs endroits.
Vers l’Asie
Alors que le pavillon de l'Ouzbékistan vise à mettre en évidence le riche patrimoine architectural du pays et le potentiel pour développer un avenir plus durable, le Pavillon saoudien interroge la relation entre le matériel et l'immatériel.
Le pavillon japonais remonte le fil de l’histoire du lieu et démontre que l'architecture est avant tout un lieu à aimer, défauts y compris, et dont il faut prendre soin. Si une partie du pavillon retrace l'histoire de sa conception, le reste de l'espace se déguste en humant les arômes des plantes distillées sur place grâce à de surprenants alambics. C'est une déclaration poétique de durabilité, praticable par n'importe qui, ici et partout.
Le pavillon Coréen explore un nouveau paradigme éco-culturel présentant trois communautés de Corée du Sud activement impliquées dans des projets de régénération, chacune avec une population et des caractéristiques différentes. Le thème abordé étant la réconciliation de l'individualisme et du communautarisme.
En passant par les Amériques
Le pavillon canadien attire l'attention sur la crise du logement vécue à travers tout le pays. L’installation décrit et dénonce l'impact de la spéculation immobilière qui convertit les maisons en actifs financiers, engendrant une série de problèmes comme des logements précaires et l'itinérance.
Le pavillon américain se concentre sur l'importance du plastique dans la société américaine, l’installation se penche également sur son impact positif et les utilisations de ce matériau pour sauver des vies. Tout en guidant la discussion sur la manière dont les plastiques façonnent et érodent les écologies et les économies contemporaines, l'installation cherche à mettre en évidence les alternatives possibles et les réinventions nécessaires pour la manière dont les plastiques sont déployés.
Le pavillon mexicain présente un projet intelligent, drôle et très coloré, il s’agit d’un terrain de basket public qui n'est pas seulement un espace récréatif. C'est également un lieu habité où se créent des relations et des processus. Installé dans un contexte tel que le Mexique rural, ce lieu devient alors un laboratoire de relations humaines à part entière.
Finalement, le pavillon brésilien qui a remporté le Lion d’Or de la meilleure participation nationale de la Biennale d’architecture de Venise 2023, propose de repenser le passé afin de concevoir des futurs possibles, en mettant l’accent sur la terre comme centre de discussion l’installation toute en terre, incite à la réflexion sur le passé, le présent et l’avenir du Brésil. L’avenir post-climatique, la décolonisation et la décarbonisation sont ainsi abordés.
A Venise, encore une fois les divers pavillons se sont dépassés pour répondre, chacun à sa manière, au thème de la 18ème Biennale d’architecture. Néanmoins, après avoir découvert les différentes installations nationales, le visiteur ne devrait pas négliger les quelques pépites disséminées ici ou là. Pour cela, il a jusqu’au 26 novembre 2023 !
Sipane Hoh
Photo de une : Paviollon central - ©Francesco Galli / La Biennale di Venezia