Trois questions à Antoine Desbarrières, directeur de Qualitel
Qualitel est une association dont l’objet est de promouvoir et valoriser la qualité du logement, essentiellement en France (mais nous commençons à être présents aussi à l’international) avec deux moyens d’action essentiels : la certification, depuis 1974, et l’information du grand public. On y retrouve, du côté des professionnels, tous les acteurs de la filière construction et du logement (promoteurs, bailleurs, banquiers, institutionnels, etc.), des organismes qui concourent à la qualité comme l’Anah*, le CSTB, l’Ademe*, l’agence Qualité Construction, l’Etat et les collectivités territoriales... Il y a aussi une composante très forte : les associations de consommateurs, dont la plupart siègent au Conseil National de l’Habitat. La certification consiste à élaborer des règles et des référentiels de qualité, de façon consensuelle entre toutes les parties concernées, puis de valider la conformité avec celles-ci. La finalité est notamment de donner une information impartiale au consommateur dans son acte d’achat ou de location d’un logement.
Sur quels critères se base-t-on pour attribuer une certification ?
Nous avons une approche multicritères de la qualité. Ce qui veut dire qu’on ne se limite pas simplement à la performance énergétique ou à tel ou tel autre critère unique. Nous avons une approche globale, y compris dans le neuf. Mais c’est encore plus vrai et nécessaire dans l’habitat existant, car il y a très peu de réglementation s’appliquant à l’ancien. Il y a deux ans la réglementation thermique est apparue pour les bâtiments faisant l’objet d’une rénovation. Mais elle est limitée aux matériaux et produits devant être changés ou alors elle ne concerne que les très grosses réhabilitations. D’où la nécessité d’avoir un champ très large quand on veut avoir une approche qualitative sur un bâtiment. Nous couvrons donc les aspects énergétiques, la sécurité incendie, la sûreté anti-intrusion, le confort acoustique, etc. Notre approche sur les bâtiments anciens en pleine propriété – appartenant à des bailleurs institutionnels ou sociaux – consiste à proposer un bilan patrimoine habitat (BPH), une sorte de radiographie du bâtiment. Nous faisons pour cela intervenir un diagnostiqueur habilité qui procède à une évaluation technique et documentaire. Nous proposons une EPE, une estimation de la performance énergétique de l’ensemble du bâtiment, là où le DPE n’évalue la performance que d’un logement. La seconde étape c’est la certification, avec nos marques Patrimoine Habitat et Patrimoine Habitat & Environnement. On ajuste alors les curseurs, selon les critères, en fonction des choix du maître d’ouvrage, mais des minima sont à satisfaire pour chaque critère.
Vous lancerez début 2010 une certification pour les copropriétés…
Il y a en France une petite dizaine de millions de logements en copropriété. Ceux-ci ne sont pas couverts par notre dispositif actuel. D’où la nécessité de préparer une offre adaptée à la copropriété, sur laquelle nous travaillons depuis plus d’un an. Le sujet est beaucoup plus délicat, car il faut distinguer les parties communes des parties privatives avec aussi toute la complexité qu’on connaît sur le plan de la prise de décision notamment. Nous sommes en phase de finalisation de cette certification et sommes en train de l’expérimenter. Le lancement opérationnel est prévu en mars 2010. En clair, nous avons toujours les deux grandes phases : un état des lieux préalable et une phase de certification par rapport à un programme de travaux. Nous avons enrichi la première phase car la copropriété n’est pas un maître d’ouvrage professionnel. Elle a donc d’avantage besoin d’être aidée et cadrée. Nous avons donc gardé le dispositif BPH, qui sera adapté et allégé. On le complète – au sein d’une sorte de plan d’action pour la copropriété (PAC) – de deux dispositions complémentaires obligatoires : un programme de travaux (hiérarchisation des priorités, planification, estimation budgétaire) à réaliser par un professionnel (architecte, bureau d’étude…) et une estimation de la performance énergétique. Nous sommes en totale cohérence avec les dispositions du Grenelle. Cette première étape peut se suffire à elle-même, il n’y a pas d’obligation d’aller vers une certification. Pour la seconde étape, la partie certification, nous ne regardons que les parties communes. On évalue – une fois le PAC réalisé – le programme de travaux tel qu’il est défini, à partir de travaux déjà réalisés ou à partir de devis d’entreprises. Une fois les travaux achevés, on vient sur place s’assurer que ce qui a été prévu a bien été réalisé. Nous travaillons aujourd’hui à ce qu’un copropriétaire puisse valider à ce stade un niveau de qualité de son logement, pour les parties privatives donc.
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Anah : Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat
Ademe : Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie
DPE : Diagnostic de performance énergétique
Propos recueillis par Laurent Perrin