Transition énergétique : vers la création d’un plan Juncker vert ?
En effet, alors que financements publics semblent insuffisants pour répondre aux nombreux défis de la transition énergétique, « le gouvernement s’intéresse au rôle que pourraient jouer les dispositifs financiers innovants de partage du risque, pour maximiser l’effet de levier des fonds publics », expliquent les auteurs du rapport.
Remis en décembre dernier, le document souligne que « malgré des financements climat en hausse depuis 2014, la France accumule progressivement un déficit significatif au niveau de ses objectifs » ; un déficit qui varie d’un secteur à l’autre et qui trouve diverses explications.
Alors que les financeurs pointent « une insuffisance du flux de projets suffisamment rentables », les porteurs de projets « identifient une insuffisance de financements abordables ou adaptés à leurs besoins opérationnels ». « Or le potentiel de financement de la transition est bien là ».
Des déficits d’investissements quantifiés
Les auteurs ont analysé certaines filières de la transition pour lesquels des déficits d’investissement avaient été identifiés. La rénovation énergétique des bâtiments en fait partie. Il en ressort que « le déficit d’investissements pourrait être compris entre 9 et 19 mds d’euros par an » et atteindre 30 Mds€ par an à horizon 2023.« Les besoins d’investissement non-financés pourraient offrir des opportunités significatives : 500 000 logements à rénover à horizon 2020, le déploiement de 100 000 bornes de recharge électriques à horizon 2023 ou d’un réseau de stations à hydrogène commence à intéresser certains investisseurs privés, mais à une échelle très insuffisante », observent les auteurs.
Ils poursuivent : « Des projets d’efficacité énergétique et l'accélération de la rénovation thermique des logements et du bâtiment tertiaire privé comme public nécessitent une innovation dans le mode de financement mais aussi de l’accompagnement technique des porteurs projets ».
Ce potentiel d’investissement est également un potentiel de créations d’emploi : la rénovation par exemple « qui combine le déficit d’investissement le plus important » et une intensité emplois relativement élevée « pourrait voir les créations les plus importantes – entre 59 000 et 127 000 ETP supplémentaires pour la période ».
Le rapport indique ainsi que l’usage d’instruments financiers publics-privés de partage de risques (garanties, prêts bonifiés, fonds propres et quasi fonds propres) semble « une piste intéressante pour mobilier les financements et projets du secteur privé ». Ils répondraient en effet à « des situations de sous-investissement découlant de failles de marchés et contribuent à un meilleur usage de la dépense publique ».
5 recommandations pour lever les déficits
Pour investir plus et mieux dans les solutions de transition écologique, les auteurs du rapport, réalisé avec l’appui de l’Ademe, préconisent la création de France Transition, un outil pour mobiliser 10 milliards d’euros d’investissement privés dans la transition écologique (isolation des logements, agro-écologie ou encore méthanisation) via le développement de mécanismes de partage de risques.Il s’agirait de lancer « un plan Juncker vert à la Française » avec un effet de levier massif : « pour 1 euro de dépense budgétaire, le rapport montre qu’il est possible de générer 20 euros d’investissements verts dans les territoires qui en ont cruellement besoin ».
Le rapport formule ainsi cinq recommandations :
- Réunir une équipe d’investissement publique dédiée à la transition énergétique et écologique dans une démarche unique – France Transition ;
- Développer au niveau de France Transition, une doctrine pour l’usage des instruments financiers publics-privés de partage de risques ;
- Concentrer les interventions de France Transition sur le déploiement de la transition, et la doter d’une première enveloppe de 1 milliard d’euros permettant de générer 10 mds d’investissements privés sur 3 ans, soit entre 10% et 30% d’investissement SNBC-PPE ;
- Optimiser les interventions de France Transition en cohérence et coordination avec l’Union Européenne et le futur dispositif Invest UE ;
- Créer les conditions d’une meilleure collaboration des secteurs privé et public pour le financement de la transition énergétique.
R.C
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