L'attribution du "Pentagone à la française" mise en cause
Choisi en février par le gouvernement pour réaliser le chantier du futur ministère de la Défense dans le quartier Balard (XVe arrondissement de Paris) qui doit être achevé à l'été 2014, le groupe Bouygues a signé le contrat en mai. Depuis, un renseignement anonyme à propos de la procédure de passation du marché a été communiqué aux enquêteurs de la Division nationale des investigations financières (Dnif) qui a alors décidé d'ouvrir une enquête préliminaire en octobre 2010. Le parquet de Paris a ensuite ouvert en février une information judiciaire pour corruption, trafic d'influence et atteinte à la liberté d'accès et à l'égalité des candidats dans les marchés publics. Deux juges d'instruction ont été désignés pour mener l'enquête
Un haut responsable du ministère de la Défense est soupçonné d'avoir transmis à un cadre dirigeant de Bouygues un cahier des charges du marché avant ses concurrents, selon le Canard. Un intermédiaire connu des enquêteurs pour d'autres affaires de corruption aurait mis en relation ces deux personnes, selon la source judiciaire. « Nous n'étions pas au courant et avons découvert cette information par voie de presse hier. Nous ne souhaitons pas réagir pour le moment »a indiqué à Batiweb un porte-parole de Bouygues.
Sérénité totale
Le ministre de la Défense, Gérard Longuet, a déclaré mardi que son ministère était d'une sérénité totale et au service de la justice. « Le Canard enchaîné m'a instruit de ce qu'un juge instruisait (...) Cela concerne un juge, il fait son travail. C'est une procédure engagée il y a cinq ans, qui a été gérée dans la transparence. Je crois qu'il y a une dizaine de commissions rassemblant une centaine de personnes qui ont travaillé sur ce projet. Tout est connu, tout est sur la table », a déclaré le ministre de la Défense, qui était interrogé par quelques journalistes en marge d'une convention UMP.
Bouygues Construction n'est pas concerné par l'enquête. C'est en tout cas ce qu'a annoncé le groupe de BTP mercredi soir dans un communiqué. « Aucun fait délictueux n’a marqué le déroulement de cette consultation qui a été conduite avec beaucoup de rigueur », assure le groupe, qui « s’étonne des allégations figurant dans certains articles de presse, aucune mesure d’enquête ou d’instruction n’ayant été diligentée à son encontre, aucun de ses collaborateurs n’ayant fait l’objet d’une convocation, audition ou notification ».
Le financement du contrat décroché par Bouygues en février doit se faire selon un contrat de Partenariat public privé (PPP) d'une ampleur inédite pour une administration. L'Etat ne commencera à payer qu'en 2014, lorsque les nouveaux bâtiments seront livrés. Pendant 27 ans, il devra alors débourser une redevance annuelle comprise entre 100 millions et 150 millions d'euros.
Cent trente personnes du ministère de la Défense ont eu accès au "cahier des charges" du futur "Pentagone français", a indiqué mercredi Bruno Viellefosse, délégué pour le regroupement des états-majors et des services centraux du ministère. "Cent trente personnes, réparties dans 9 commissions techniques, ont eu accès au cahier des charges pour le contrat de ce partenariat public-privé (PPP)", a précisé M. Viellefosse. "Lors des différentes phases des propositions initiales, intermédiaires et finales ainsi que lors du dialogue compétitif, les risques (de fuite, ndlr) ont été limités avec une parfaite sécurité", a-t-il ajouté. "Mais je ne maîtrise pas tout et je ne sais pas s'il y a pu y avoir des maladresses ou des mauvaises intentions", a ajouté le patron de cette mission au ministère de la Défense. |
Bruno Poulard (source AFP)