Coénove souhaite faire du gaz, « une énergie renouvelable à part entière »
Bernard Aulagne, Président de l’association, nous explique que l’objectif de Coénove n’est pas de donner une place hégémonique à l’énergie gaz mais plutôt de jouer « sur la complémentarité des énergies ». Coénove défend l’idée que le gaz est le « partenaire indispensable des énergies renouvelables tant sur la production d’électricité qu’au plus proche des usages dans les bâtiments. »
Couplé à d’autres énergies, le gaz est capable de répondre aux besoins énergétiques du territoire comme en témoignent les résultats d’une étude menée sur l’évolution de la puissance hebdomadaire appelée sur la période allant du 1er avril 2016 au 31 mars 2017.
Un mix énergétique diversifié et complémentaire
L’étude confirme la très grande thermosensibilité du mix énergétique français : « On est dans un rapport de 1 à 4 entre l’été et l’hiver », précise Bernard Aulagne. A titre d’exemple, il cite le pic de consommation du 20 janvier dernier : « L’énergie gaz a couvert 50% des besoins tandis que l’électricité n’en a couvert que 30% (…) d’où l’importance d’un mix énergétique diversifié et complémentaire ».Au-delà de ce constat, Coénove a souhaité faire ce même exercice en se projetant à l’horizon 2050. « On a pris les hypothèses les plus ambitieuses en matière de sobriété et d’efficacité énergétique », et un mix énergétique faisant la part belle aux EnR électriques. Résultat, « on est passé à un rapport entre été et hiver de 1 à 2 ». Dans ce scénario, il y a moins de gaz « conventionnel » mais plus de gaz renouvelable. Cela démontre qu’il reste indispensable pour boucler le mix énergétique.
Décarboner le gaz
En plus de satisfaire les usages chauffage et eau chaude sanitaire, le gaz a pour vocation d’évoluer vers plusieurs formes d’énergies renouvelables locales, le biogaz, le biométhane et l’hydrogène. En effet, si Coénove parle beaucoup de gaz fossile, l’association a bien conscience qu’il faut décarboner cette énergie, d’autant plus que « c’est la meilleure manière de décarboner le mix énergétique (…). Quand on voit la part du gaz dans le bâtiment, faire évoluer la relation au carbone est une question de responsabilité pour la filière. Elle doit faire sa mutation » dit M. Aulagne.Alors bien sûr, il ne s’agit pas de « supprimer tout le carbone dans les 5 ans à venir. Il faut s’inscrire dans une logique de transition et non pas de rupture. Le gaz est une énergie intéressante d’autant plus qu’aujourd’hui, dans le bâtiment, elle permet, via les solutions de couplage, de répondre aux enjeux de la transition énergétique ». Par couplage, il pense notamment aux solutions « chaudières à condensation + panneaux solaires » ou encore aux chaudières hybrides, des solutions qui, à l’échelle d’un bâtiment ou d’un quartier, permettent une approche locale décentralisée « sécurisant l’alimentation en énergie et au plus près des besoins, où qu’ils soient sur le territoire ».
Bernard Aulagne mise aussi sur le phasage des travaux et rappelle qu’un « simple bouquet de remplacement de chaudière et d’isolation des combles, est ce qu’il y a de moins cher. C’est un début de jackpot. Je souhaite que la filière gaz s’investisse pour qu’en 2030, l’ensemble du parc soit converti ».
Il se dit « plutôt satisfait » de la feuille de route sur la rénovation : « On souhaitait la transformation du CITE en prime pour qu’il joue davantage son rôle incitatif et facilitateur ». Il était également important de « flécher les aides financières sur la performance ».
Passer du fossile au renouvelable
L’association insiste sur le fait que le gaz doit être considéré comme une énergie renouvelable à part entière. Elle se félicite du fait que la filière soit « en train de basculer d’un discours « gaz, énergie fossile la moins carbonée » à « gaz, énergie renouvelable ». Ce qui est passionnant, c’est que les messages commencent à passer. Depuis deux mois les choses s’accélèrent et on observe des signaux positifs comme la création d’un groupe de travail dédié».Si aujourd’hui le gaz renouvelable ne représente qu’1% du gaz total, les opérateurs sont convaincus qu’il est possible d’atteindre 30% de gaz renouvelable en 2030. Pour ce faire, il faut bien sûr que les politiques de soutien se multiplient à l’image de ce qui est fait pour l’éolien et le solaire.
L’exemple de la méthanisation
Bernard Aulagne salue les objectifs de la Programmation pluriannuelle de l’énergie quant au biométhane. La PPE prévoit de porter le volume de biométhane injecté dans les réseaux gaziers français à 8 TWh en 2023. Si fin 2016, seuls 24 sites injectaient 190 GWh de biométhane dans le réseau, près de 200 sites sont en projet sur la période 2017-2018 avec un objectif de production en 2018 de 1 700 GWh.La méthanisation ne répond pas uniquement à un objectif de transition énergétique mais propose également une solution au traitement des déchets (organiques et agricoles) : « On est au cœur du concept d’économie circulaire. On se retrouve dans une boucle vertueuse », souligne Bernard Aulagne. Concernant les déchets agricoles, « il s’agirait d’apporter un complément de revenus aux agriculteurs ».
Bernard Aulagne revient finalement sur le principe de « Power to Gas » qui repose sur le stockage de la surproduction des énergies renouvelables grâce à leur transformation en hydrogène ou en méthane de synthèse.
Il s’agit donc aujourd’hui de donner plus de visibilité à la filière. Bernard Aulagne propose aussi de passer par une simplification administrative et par une évolution des garanties financières. Coénove souhaite notamment que « le tarif de rachat du biogaz produit par les fournisseurs porte sur 20 ans comme toutes les EnR électriques » et ce afin de « rassurer le producteur qui investit et le monteur du projet ».
Propos recueillis par Rose Colombel