24h du bâtiment : les dernières annonces d’Emmanuel Macron
7 000 visiteurs étaient présents aux traditionnelles 24H du bâtiment, organisées ce vendredi 18 novembre par la Fédération Française du Bâtiment (FFB). « Nous serons là pour échanger, pour débattre, pour réfléchir à l’avenir de la profession, la plus belle de ce pays », déclare, enthousiaste, son président Olivier Salleron, en ouverture des plénières ce vendredi matin.
|
Plénières durant lesquelles un échange vidéo entre Olivier Salleron et le président de la République, Emmanuel Macron, a été diffusé. Ce dernier était censé assister à cet événement, mais G20 oblige, l’occupant de l’Élysée a dû annuler sa présence.
Crise énergétique : des boucliers tarifaires solides pour les entreprises du bâtiment
Différents sujets ont été abordés lors de l’entrevue entre Olivier Salleron et Emmanuel Macron. Le premier et le plus urgent : la crise énergétique, impactant les entreprises du bâtiment, déjà minées par la crise du Covid-19, comme les pénuries et la hausse des prix des matières premières.
|
Les factures d’énergie des « deux tiers environ de vos entreprises, qui sont des TPE, elles, sont à un tarif réglementé. Et donc ces entreprises ont un bouclier. Ce qui veut dire que là où le gaz et l’électricité, à début 2023, les tarifs devraient normalement augmenter de 100 %, pourtant il n’y aura que +15 % dans les deux premiers mois et c’est tout. C’est-à-dire qu’on prend de la charge », assure Emmanuel Macron à Olivier Salleron.
« Pour le tiers d’entreprises qui sont plus importantes, celles qui sont des TPE/PME, elles auront un mécanisme d’amortisseur de prix. On va vous diffuser tous les détails des ministres. On va limiter les hausses de prix en intervenant sur celui-ci, parce qu’on a notre nucléaire, parce qu’on a négocié avec la Commission », abonde le président de la République.
Du côté des grandes entreprises, qui sont au dessus des seuils, « on a des critères européens, les Allemands, les Espagnols, les Italiens ont les mêmes problèmes que nous : on ne peut pas intervenir sur les prix de l’électricité. Donc on va mettre en place un guichet d’aide, qu’on a simplifié. C’est-à-dire qu’on n’attend pas que vous soyez à perte pour aider, on le fait même quand vous êtes positifs. On a simplifié les règles de pourcentage d’énergie (…) on prend le pourcentage en crise, on intègre l’augmentation et puis on augmente les chèques TIC. Et on adaptera au fil de l’évolution » , développe Emmanuel Macron
Celui-ci s’avère bien plus confiant qu'il y a un mois, époque où le plan de crise énergétique gouvernemental n’avait pas prévu des « températures douces » pour la saison et un déploiement du nucléaire plus fructueux que prévu, d’après ses estimations.
Une crise du logement neuf, entre des procédures et des coûts de production lourds
Deuxième sujet sur lequel Olivier Salleron a de nouveau interpellé le président de la République : la crise du logement neuf. Un problème à décomposer selon le chef de l’État. D’abord, « on doit continuer de convaincre les élus de donner des permis », affirme Emmanuel Macron. Il décrypte : « On a eu un cycle électoral, qui a fait que ça s’était un peu décalé. Et on a encore trop de collectivités territoriales qui bloquent les permis, qui ont des doutes sur le logement (…) C’est bon pour personne ».
Pour l’heure, « comme vous le savez il y a quelques mois, nous avons mis en place des dispositifs fiscaux pour accompagner les maires qui bâtissaient, sur la base du travail fait par Monsieur Rebsamen. Et on va pérenniser cela. Mais moi, je crois aussi à un choc un peu institutionnel pour convaincre davantage », explique le président de la République.
Choc institutionnel qui doit s’accompagner par une simplification des procédures. « Le temps c’est de l’argent, c’est vrai en particulier dans votre secteur », souligne Emmanuel Macron à Olivier Salleron. La loi ELAN tendait à réduire ces démarches, selon l’occupant de l’Elysée. Sans compter le déploiement du fonds friches et autres dispositifs qui encouragent les collectivités à dégager d’anciens terrains, notamment industriels, agricoles ou militaires, afin d’y construire des logements. On compte également le doublement du budget de l’ANRU, visant à massifier les projets de démolition et de reconstruction dans certains quartiers, comme observé à Trappes par le ministre du logement fin juillet dernier.
Le coût de production est aussi une autre préoccupation financière, face aux pénuries et montées des prix actuelles sur les matières premières. « On essaie de vous aider à l’absorber, je pense qu’on reviendra à des périodes plus propices. Mais il faut aussi continuer à moderniser », expose le président de la République, félicitant au passage Olivier Salleron sur les actions de de la FFB concernant la digitalisation et la construction hors-site, tous deux en cours de démocratisation dans le secteur, pour « industrialiser dans le bon sens » le secteur (baisses des coûts, massifier les volumes construits…).
Le prochain accompagnement gouvernemental sur les coûts de production ira de pair avec l’accompagnement financier sur la montée des taux immobiliers, qui « n’est pas bonne pour l’acquisition d'un logement neuf » commente Emmanuel Macron, rendant les perspectives d’avenir floues voire pessimistes pour les promoteurs immobiliers. Pour se parer à tout cela, Emmanuel Macron a confié à Olivier Salleron l’étude de mécanismes favorisant l’épargne.
Rénovation énergétique : cap sur les écoles
Et la rénovation énergétique dans tout ça ? Le secteur reste porteur pour l’activité du bâtiment. « Quand je vous dis que nous avons employé 100 000 personnes de plus, c’est aussi grâce à ça, grâce à cette activité beaucoup plus technique de construire neuf, mais aussi de rénover avec des matériaux biosourcés, avec un esprit beaucoup plus écologiste et durable », relève Olivier Salleron lors de son entrevue avec le président de la République.
Si le président de la FFB salue l’amplification du dispositif MaPrimeRénov’ dans le cadre du PLF 2023, il convient d’aller beaucoup plus loin selon lui, avec des financements alternatifs - à côté l’éco-PTZ récemment annoncé. Ce à quoi Emmanuel Macron répond qu’il y a certes le levier de la rénovation énergétique, mais également l’adaptation des logements à la perte d’autonomie, avec le lancement prochain de MaPrimeAdapt’. « Ça vaut pour les personnes qui rentrent dans le grand âge comme celles qui sont en situation de handicap ou le deviennent », précise le président de la République, rappelant que 30 millions de logements sont à rénover en 30 ans.
Une dynamique que le chef de l’Etat souhaite étendre aux bâtiments publics, en particulier les écoles. « On a besoin d'accompagner nos communes (...) pour les aider à mener à bien la rénovation thermique de nos écoles. Aujourd'hui beaucoup de nos écoles ne sont pas aux dernières normes, elles dépensent beaucoup d'énergie, on pourra améliorer les conditions pour nos enseignants et pour les enfants », souligne le chef de l’État. Une démarche dans laquelle les communes devront être accompagnées, avec des aides déjà mises en place comme c'était le cas pour la ville de Marseille en 2021.
Côté innovation, pour accompagner la transition énergétique des bâtiments, le président de la République évoque les 400 millions d’euros activés par le plan France Relance, visant entre autres à diffuser les bonnes approches et à faire monter en compétences les professionnels.
Faire une carte des besoins en formation par territoire
« Ce que l’on voudrait par rapport aux réformes sur la formation par exemple, c’est que les professionnels soient associés, c’est-à-dire tout ce qu’il peut y avoir dans les référentiels, tous les programmes qui sont quelques fois pas encore tout à fait adaptés aux spécificités du terrain », réclame également le président de la FFB.« Vous êtes des métiers qui vont être bousculés par des innovations de matériaux et de techniques, et où les gens vont demander de plus en plus de technologies embarquées et donc aussi de croisement entre différents secteurs d’activités », reconnait le président de la République en retour, faisant référence au déploiement de la smart-home.
Évolution que les jeunes doivent connaître, mais aussi devenir parties prenantes, soutiennent Emmanuel Macron comme Olivier Salleron. La profession a déjà été et continue d’être promue à l’échelle des orientations au collège. « On est sorti de cette bataille entre l’Éducation nationale, le Travail, l’État, les régions… On a dit : ce sont les branches professionnelles qui vont nous dire il faut faire, car ce sont elles qui s’occupent des jeunes et puis les embauchent », se remémore le chef du gouvernement français.
Il abonde après du président de la FFB : « Dans votre secteur, on avait ces histoires complètements folles, du jeune à qui on mettait des contraintes horaires, qu’on amenait sur des chantiers, où il attendait que l’équipe ait fini, parce que n’ayant pas son permis de conduire (…) On avait des situations ubuesques sur les prises de risque. Tout ça a été clarifiée et ça marche beaucoup mieux ».
« C’est la même chose qu’on va faire avec les lycées car c’est l’étape d’après. Les lycées professionnels c’est un tiers de nos lycéens. Et bien ce qu’on veut faire, territoire par territoire, c’est une carte des besoins d’aujourd’hui, à 10 ans, à 15 ans, avec tous les professionnels. Pas seulement à l'échelle des besoins locaux, mais à l’échelle d’un bassin de vie, d’une région », annonce Emmanuel Macron.
L'objectif ? Adapter l’offre de formation dans chaque territoire, de façon à éviter trop de formations sans débouchés, et favoriser les métiers en tensions. Le président de la République encourage également l’intégration, dans les cursus, d’experts professionnels du bâtiment, qui interviendront aux côtés des enseignants, afin de mieux préparer les futurs professionnels aux évolutions du secteur.
Virginie Kroun
Photo de Une : V.K