"Plan de relance logement : discrimination politique"
Le Président de la République a annoncé son plan de relance au profit du bâtiment et du logement. Simplifier et sécuriser la construction, inciter les propriétaires privés à céder leurs terrains à bâtir et l'Etat à mettre les siens à disposition, voilà d'heureuses décisions, sans conteste. Dans l'ordre fiscal, les choix de Monsieur Hollande sont beaucoup plus critiquables, à force de ne considérer que le parc social. Sur le fond, l'option d'alléger le taux de la TVA est bonne pour le secteur sans pénaliser les finances publiques : les moindres rentrées fiscales à l'instant T seront largement compensées par la multiplication des opérations de construction. C'est la limitation de la mesure à la construction sociale qui est fâcheuse, et pour tout dire inquiétante. Aider plus encore qu'il ne l'est le secteur...aidé, soit, dès lors qu'il contribue à loger les plus fragiles des ménages. Mais on sait qu'il n'est pas le seul à le faire; on sait même qu'au nom de la mixité il loge bien d'autres catégories de population.
Qu'en est-il du parc privé ? Il loge les familles les plus modestes, singulièrement dans la maison individuelle neuve, comme les classes moyennes, en individuel et en collectif. Pourquoi ne bénéficie-t-il pas d'un traitement fiscal identique au logement HLM ? Il y a là une douloureuse discrimination. D'ailleurs, quelques juristes de haut vol s'interrogent déjà sur le bien-fondé de cette disposition au regard du droit communautaire...
Toujours pour accompagner les ménages aux plus bas revenus, il fallait, et il faudra bien, améliorer le prêt à taux zéro, en allongeant le différé de remboursement. Comment un plan de relance peut-il faire l'impasse sur l'accession populaire à la propriété ? Il faudra bien également abaisser la TVA sur les travaux, et non seulement faire semblant de resolvabiliser la demande des ménages aux revenus inférieurs à 35 000 € par le versement d'une prime... qui risque fort - ce n'est pas le moindre défaut de la mesure - d'être systématiquement récupérée par les entrepreneurs voyant là une chance de restaurer leurs marges. A contrario, une atténuation de la fiscalité n'aurait pas fait courir ce danger parce qu'elle n'aurait agi qu'indirectement.
On rappellera utilement aussi que la volonté du Président était d'épargner les emplois du bâtiment ou d'en favoriser la création à court terme : le plan, en ne s'attachant qu'à la construction et en négligeant le logement existant, ne va pas répondre à l'urgence de la situation. Ses effets ne seront pas tangibles avant deux ans ! En somme, la discrimination va conduire à la stérilité et à l'inefficacité. On ne peut que souhaiter que le projet de loi de finances, qui se construit déjà à Matignon et dans les cabinets, corrige le tir, en restaurant au passage l'équité entre logement social et logement privé, qui ressortit d'une idéologie d'un autre âge.
Par François Gagnon, Président ERA Europe et ERA France