À Chartres, Olympi sert de démonstrateur à la préfabrication et au recyclage béton
Février 2018. Pierres & Territoires Eure-et-Loir, membre du réseau national Procivis Immobilier, amorce un projet nommé Olympi. Olympi en référence au mont Olympe, résidence des divinités grecques.
Situé à Chartres, rue Parmentier, le chantier en cours n’atteint pas la voute céleste, mais surplombe les voies ferroviaires et fait face à la cathédrale de Chartres. Et ce sur une surface de 2 215 m2. Pour Élisabeth Fromont, 1ère adjointe au maire de Chartres, le futur immeuble résidentiel est bien « implanté sur le secteur » qui est plutôt pavillonnaire et répond aux ambitions de la Ville et de son agglomération.
« Ce que nous souhaitons voir ce sont des m2 un peu plus riches et un peu plus larges. On s’aperçoit que les deux-pièces sont assez grands, que les trois-pièces font au moins 62 m2. Et c’est vrai aujourd’hui, c’est un minimum que nous souhaitons sur l’agglomération chartraine », expose-t-elle, lors d’une cérémonie du drapeau ce vendredi 31 mars.
Un terrain d’expérimentation pour le béton recyclé et préfabriqué
Deuxième coïncidence : le bâtiment sera livré début 2024, à quelques mois du lancement des Jeux Olympiques de Paris. La construction a démarré avec une première étape : le traitement des gisements de deux anciennes maisons, rue Parmentier, en février 2022. Car l’économie circulaire est une dimension importante du projet Olympi, avec 500 tonnes de béton déconstruit et recyclé à 100 % par la plateforme Granudem. Les ressources récupérées ont été intégrées dans les bétons de fondations, les voiles contre terre, les dalles de compression coulées en place sur les éléments de plancher avec une proportion significative de béton avec ciment CEM II/A-L et CEM III/A.
D’autant qu’une partie des matériaux ont été introduits dans des éléments préfabriqués comme les prémurs en béton bas carbone de Spurgin Leonhart, intégrant du ciment de Vicat et des granulats recyclés de Granudem (30 %). On relève également des granulats recyclés Aggneo par Lafarge dans prédalles préfabriquées en béton et des granulats recyclés carbonatés issus du Projet National Fastcarb ont été introduits dans les escaliers préfabriqués. Tout un système d’approvisionnement en circuit court et d’innovation possible avec l’aide de la Fédération de l’Industrie du Béton (FIB) et le Centre d’Études et de Recherches de l’Industrie du Béton (Cerib).
« On est intervenus dès l’amont du projet, au moment de l’élaboration du cahier des charges. Notre accompagnement c’est aussi d’identifer quelles sont les matières premières qui peuvent être utilisées pour les industriels. S’ils le souhaitent on peut apporter des éléments pour la formulation du béton, ce qu’on a fait pour certains d’entre eux. Et puis on apporte aussi un éclairage sur le positionnement de ces solutions, au niveau des textes normatifs », développe Patrick Rougeau, directeur Matériaux Economie Circulaire au Cerib durant la visite.
« La préfabrication de ces systèmes a permis d’accélérer la phase préparation de l’opération », mentionne Fabio Mastroianni, directeur délégué aux filiales et promotion immobilière de Pierres & Territoires Eure-et-Loir. « Une opération comme celle-ci, de manière classique, c’est à peu près deux mois de préparation. Sur cette opération-là on a pris un mois pour faire la synthèse », détaille-t-il.
Une maîtrise des prix immobiliers au mètre près
Une vitesse de préparation complétée par un niveau de précision possible grâce à la maquette numérique. Car si le « Pi » - rapport constant entre la circonférence d’un cercle et son diamètre - du projet Olympi fait penser à la circularité du projet, il renvoie également à sa « rigueur mathématique », souligne Fabio Mastroianni.
La promotion immobilière « a été sélectionnée dans le cadre du plan BIM 2022 et a fait l’objet de sept maquettes numériques superposées, qui ont donné lieu à un dossier de consultation des entreprises (…), avec une qualification de la maquette numérique assez unique, sur l’ensemble des corps d’état et en particulier sur le gros-oeuvre », nous précise l’intéressé.
Gros-oeuvre réalisé par ABT, entreprise fondée à Montreuil (93) et qui s’est installée aux alentours de Chartres et compte se déployer dans le secteur. De quoi renforcer l’identité locale du projet Olympi, car après tout « l’épreuve de force, c’est aussi parfois ne pas aller chercher l’exotisme », nous commente le directeur délégué aux filiales et promotion immobilière de Pierres & Territoires Eure-et-Loir.
Épreuve de force est le bon terme pour les ouvriers mobilisés sur la chantier Olympi. L’une des prouesses pour ABT est de s’approprier le préfabriqué qui réduit en pénibilité la mise en oeuvre, les nuisances sonores suscitées par les travaux, mais également les coûts. Les coûts à la fois en empreinte carbone - pour mieux répondre aux enjeux de la RE2020 - et face à l’inflation galopante sur les prix des matériaux. « On a aussi étudié l’opération en réversibilité, puisque l’opération était de 36 logements, elle s’est transformé par la phase de gros-oeuvre à 37 logements, grâce à la maquette numérique. Grâce aux produits de l’industrie du béton préfabriqué, on a pu totalement modifier cette opération pour augmenter le nombre de logements », nous confie Fabio Mastroianni.
Une logique d’« écologie industrielle et environnementale », pour un budget de 3,450 millions d’euros en global et d’1,3 million pour le gros-oeuvre. Mais les prix ont été maîtrisés, afin d’atteindre les mêmes dépenses qu’une construction traditionnelle et de limiter le prix au m2 d’un tel logement à 3500 euros TTC en moyenne. Mais comme le mentionne Fabio Mastroianni, un projet comme Olympi tend surtout à montrer que le BIM comme la fabrication incite « les entreprises à évoluer pour continuer à vivre et à construire ».
Virginie Kroun
Photo de Une : Pierres & Territoires Eure-et-Loir