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Incidents nucléaires, "un enchaînement très atypique"

Publié le 31 juillet 2008

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Tricastin dans le Vaucluse puis Romans-sur-Isère dans la Drôme, le sud de la France a connu ce mois-ci quelques remous liés au nucléaire. Bien que d'impact environnemental relativement limité – puisque classé niveau 1 d'une échelle qui en compte 7 – ces deux incidents doivent surtout rappeler à tous les acteurs du nucléaires les règles élémentaires de sécurité. S'il en survient une centaine chaque année, ces évènements illustrent aussi la communication parfois maladroite dont fait preuve ce milieu. Un dispositif que notre ministre de l'Ecologie souhaite complètement remettre à plat dans les années à venir.
Dans la nuit du 7 au 8 juillet, un dysfonctionnement d'une installation de la Socatri (filiale d'Areva) sur le site de la centrale nucléaire du Tricastin (Vaucluse), lors d'un transfert entre deux cuves, avait donné lieu à un rejet d'effluents contenant environ 75 kg d'uranium dans les cours d'eau proches du site. L'incident a été classé au niveau 1 ("anomalie") sur une échelle de 7 niveaux évaluant la gravité des événements touchant les installations nucléaires.

Anne Lauvergeon, présidente du groupe Areva, a aussitôt remplacé Yves André, directeur général de la Socatri. Même s'il ne s'agit que d'un incident de niveau 1, l'audit interne mené par Areva a en effet montré des dysfonctionnements graves dans l'usine. "Un manque de coordination entre les équipes en charge des travaux et celles responsables de l'exploitation est à l'origine de l'incident. L'erreur de l'exploitant est aussi d'avoir attendu les résultats des mesures complémentaires pour prévenir les autorités, (soit) près de 3 heures", conclut l'audit. Des conclusions sévères confirmant les irrégularités pointées par l'ASN, l'Autorité de sûreté nucléaire, lors de son inspection sur place le 10 juillet.

Le 16 juillet, celle-ci déclarait que "les dernières mesures réalisées dans l'environnement semblent indiquer un retour à la normale pour la quasi-totalité des points surveillés dans les eaux superficielles et les eaux de nappe". Toutefois, deux points de mesure ayant montré des valeurs plus élevées que la valeur guide préconisée par l'OMS (Organisation Mondiale de la Santé) pour les eaux destinées à la consommation humaine ont retenu l'attention des experts. Le préfet de Vaucluse a ainsi décidé de maintenir les mesures de restrictions d'utilisation et de consommation de l'eau prises suite à l'incident. Des mesures finalement levées le 22 juillet, même si la surveillance de certains forages privés a été poursuivie.

Rebelote

Alors que le débat sur la sûreté nucléaire avait été vivement relancé par l'incident du Tricastin, un nouvel incident a eu lieu dans l'usine franco-belge FBFC à Romans-sur-Isère (Drôme). Le 17 juillet, une canalisation rompue a provoqué un épanchement d'uranium compris entre 120 et 750 grammes, selon l'ASN. Une fuite qui daterait de plusieurs années et qui n'avait pas été inspectée par l'exploitant depuis longtemps. Ironie de l'histoire, cette usine de fabrication de combustibles nucléaires appartient elle aussi au groupe Areva. "C'est un enchaînement qui est très atypique !", a sobrement réagi Anne Lauvergeon.

Dans son avis d'incident du 18 juillet, l'ASN note que "l'exploitant va procéder au nettoyage de la zone contaminée. Les inspecteurs lui ont demandé que la totalité des matériaux retirés soit analysée pour évaluer la masse d'uranium présente". Et pointe la non-conformité de la tuyauterie vis-à-vis des exigences de la réglementation applicable qui demandent une capacité de résistance aux chocs suffisante pour éviter leur rupture. En effet, "il n'y avait pas de double sécurité puisque la canalisation est en PVC, un matériau cassant, et que le caniveau qui a réceptionné les fuites n'était pas étanche", selon Bruno Chareyron, responsable du laboratoire de la Criirad (Commission de recherche et d'information indépendante sur la radioactivité). Celui-ci ajoutant que ce nouveau "dysfonctionnement" ne devrait à priori avoir qu'un impact "faible" sur l'environnement.

De son côté, le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, a déclaré vouloir "tout remettre à plat, notamment dans les dispositifs d'information, d'analyse et de sécurité". Il a ainsi appelé le Haut Comité pour la transparence et l'information sur la sécurité nucléaire, créé il y a peu, à revoir "l'ensemble du système des procédures, évaluer l'ensemble des nappes phréatiques sous les installations nucléaires et faire le point sur les déchets nucléaires anciens". Enfin, le ministre a rappelé qu'il s'agissait d'incidents de niveau 1 sur une échelle qui en compte sept et qu'il y avait chaque année une centaine d'incidents de ce genre. "On en a même compté 30 % de moins en 2007 qu'en 2006 où il y en a eu 114", a-t-il ajouté.

Jamais deux sans trois...

Une centaine d'employés de la centrale du Tricastin auraient été victimes le 23 juillet de l'échappée de radio-éléments d'un tuyau dans le bâtiment d'enceinte du réacteur numéro 4, à l'arrêt pour maintenance. "Un tuyau à l'intérieur du bâtiment a été ouvert dans le cadre de cette opération de maintenance et de la poussière radioactive s'en est échappée", a expliqué Alain Peckre, le directeur de la centrale nucléaire, qui a qualifié cet incident de "fait sans gravité". Les 100 employés qui auraient été "légèrement contaminés" ont eu droit à un examen complet afin de contrôler la présence d'éventuelles traces de contamination.


Laurent Perrin

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