Une maison dans une favela brésilienne sacrée par un prix d’architecture
C’est de prime abord une maison comme on en trouve par dizaines dans une favela brésilienne.
Pourtant la demeure de 66 m2 du quartier Aglomerado da Serra à Belo Horizonte (Brésil), tout en brique et toit en tôle ondulée, a gagné le titre de « maison de l’année », décerné dans le cadre du prix international d’architecture du site spécialisé Arch Daily. Elle l’emporte face à des constructions bien plus imposantes en Inde, au Mexique, au Vietnam et en Allemagne.
« Ce n'est pas la maison la plus chic du monde, mais c'est une bicoque de favela bien construite », souligne auprès de l’AFP, Kdu dos Anjos, propriétaire de la maison.
Une attention portée à la lumière naturelle et à la ventilation
Les plans de la « maison de l’année » ont été dessinés par Levante, collectif d’architectes et de designers offrant leurs services bénévolement ou à prix réduits à des projets de favelas.
« Elle ressemble beaucoup aux maisons voisines, mais elle est différente parce qu'on a pensé à des solutions pour qu'elle soit plus solide et plus respectueuse de l'environnement, notamment en termes de ventilation et de lumière naturelle », détaille Fernando Maculan, l'architecte qui a conçu le projet, sur cette parcelle acquise en 2017 par son propriétaire.
La différence de la « bicoque », par rapport aux habitats voisins, réside également dans l’« utilisation de briques horizontales couchées et superposées avec un léger décalage, et non de parpaings posés debout, ce qui permet une plus grande solidité et une meilleure isolation », rapporte l’AFP.
« Ce que les architectes ont fait ici, c'est magique. On a très peu de surface, 66 m2, mais j'ai déjà reçu près de 200 personnes dans des soirées », se réjouit son propriétaire, qui vit dans la maison depuis décembre 2020.
Un nouveau souffle architectural dans les favelas
D’une durée de huit mois, le chantier n’a pas été de tout repos car la maison est situé en haut d’une colline aux ruelles très étroites. « Les maçons râlaient parce qu'ils trouvaient ça trop long de poser les briques comme ça. Et on a également eu énormément de mal à faire monter tout le matériel, ça m'a coûté pas mal d'argent », raconte Kdu dos Anjos. Le coût de la construction s’élève à 150 000 réais, soit environ 27 000 euros.
Mais le jeu en vaut le chandelle pour le jeune homme de 32 ans, natif d’Aglomerado da Serra. « Quand j'étais petit, je vivais dans un habitat précaire, mal isolé. J'ai même été piqué par un scorpion, ma soeur aussi. C'est une grande victoire pour moi de gagner un prix d'architecture alors que j'ai souffert de problèmes architecturaux dans la maison où j'ai grandi », raconte-t-il à l’AFP.
Il abonde : « Je suis très fier de voir ma maison gagner ce prix, parce que la plupart des nouvelles sur les favelas parlent de violence ou de maisons détruites par des glissements de terrain. Aujourd'hui, ma maison est sur le toit du monde ! ».
Cela confirme la tendance de certains architectes à réinvestir dans les favelas brésiliennes. C’est le cas par exemple d’Oscar Niemeyer, qui a signé en 2009 un centre culturel à Niteroi, dans l’État de Rio.
Virginie Kroun
Photo de Une : Adobe Stock