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La forteresse des pestiférés

Publié le 12 août 2002

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L'hôpital Saint-Louis à Paris est aujourd'hui un havre de paix. Pourtant, quand Henry IV le construisit, c'était une forteresse. Mais une forteresse à l'envers, destinée à contenir les pestiférés de la capitale
La forteresse des pestiférés - Batiweb
La cour centrale de l'hôpital Saint-Louis dans le 10ème arrondissement de Paris ressemble trait pour trait à la magnifique place des Vosges. Ce n'est pas un hasard, car son initiateur fut, comme pour la célèbre place, le roi Henri IV. Le carré paisible et planté d'arbres de sa cours centrale n'à pratiquement pas changé depuis sa création, au XVIIème siècle. Pourtant, en y regardant de plus près, certains aspects des lieux font également penser à une place forte. Là non plus ce n'est pas un hasard. L'hôpital Saint-Louis fut en effet construit comme une ville dans la ville, véritable forteresse destinée à contenir et isoler les malades touchés par la peste. Si aujourd'hui on pénètre aisément dans l'espace intérieur, il n'en était pas de même à l'époque. L'hôpital devait être suffisamment clos pour empêcher les pestiférés d'en sortir. Loin d'être une prison, la vie si développait à l'image de la ville qui l'encadrait. Les contacts avec l'extérieur étaient limités au strict nécessaire. Les belles pelouses actuelles étaient alors des potagers destinés à satisfaire la vie autarcique des occupants. Sous les arcades intérieures, les échoppes et boutiques d'artisans recevaient quotidiennement leur clientèle de pestiférés. Quand la police sanitaire du roi faisait entrer un malade dans son enceinte, il n'en ressortait jamais. De hauts murs surveillés par des soldats en armes devaient décourager toute tentative d'évasion.

Les Robinson de Saint-Louis
L'administration elle-même, formée de quatre vastes bâtiments en forme d'équerre constituait également un rempart. Tandis que les rez-de-chaussée des bâtiments tenait lieu de réserves à grains, les malades résidaient dans les étages. Ils furent ainsi des milliers à devenir malgré eux des prisonniers de l'hôpital. Dans la communauté des malades, une organisation sociale et politique avait remplacé celle du royaume. Le seul point de contact et d'échange avec l'extérieur se situait dans la chapelle. Mis à l'écart par la mémoire collective des Parisiens, ces lieux furent longtemps ignoré s des réformes urbanistiques de la capitale. Un curieux destin qui cependant conduisit l'hôpital à être aujourd'hui un vaste lieu privilégié de silence et de sérénité au cœur de la ville. Pourtant, en 1818, il fut le premier à entrer dans le siècle de la lumière. En effet, la première usine à gaz fut construite par Louis Lebon en mitoyenneté avec la chapelle de l'hôpital. Pour réaliser la première canalisation de gaz, le ministère de la guerre offrit 1 500 tubes de fusils. Les malades de l'hôpital Saint Louis furent ainsi, le 25 décembre de cette année, à l'occasion de la messe de minuit, les premiers Français éclairés par le gaz. Un juste retour des choses pour un lieu repoussé et ignoré pendant tant de siècles.

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